a écrit : Mais vous, vous êtes contre le projet de constitution européenne, oui ou non?
La question semble s'addresser à LO en tant que telle. Donc à toutes fins utiles, au delà des positions individuelles, voici ce qui a été voté au dernier congrès de LO (extrait du texte "situation internationale"):
a écrit :
Les partisans les plus convaincus de l'union de l'Europe parmi les forces politiques de la bourgeoisie ont beau pousser dans le sens d'une Constitution européenne, un texte constitutionnel, même accepté par tous, est d'un poids bien insuffisant pour contrebalancer les divergences d'intérêts, voire les rivalités entre puissances impérialistes d'Europe.
Si le texte de ce projet de Constitution a été finalement accepté par tous les gouvernements, c'est précisément parce qu'il n'est guère contraignant pour ce qui est des relations entre puissances impérialistes de l'Union européenne. Quant aux autres pays, en particulier les pays de l'Est nouvellement adhérents, ils n'ont guère, eux, que le droit d'exprimer leurs réticences. Le projet de Constitution consacre « l'Europe des États », et nullement les « États-Unis d'Europe ». Il officialise aussi une Europe à plusieurs vitesses, permettant à un groupe d'États d'établir des relations plus poussées entre eux qu'avec d'autres États de l'Union. C'est déjà le cas : la « zone euro » n'inclut que 12 États de l'Union européenne sur 15 (et bientôt sur 25). L'espace dit de Schengen regroupant les États qui ont supprimé entre eux les contrôles aux frontières intérieures n'inclut, de son côté, que 13 des 15 États de l'Union - sans la Grande Bretagne et l'Irlande, donc, mais avec en plus la Norvège et l'Islande qui, elles, n'adhèrent pas à l'Union européenne.
Bien plus nombreux sont encore les cas de « coopération renforcée » entre certains États de l'Union, et pas d'autres, dans les domaines des grandes négociations économiques, de la diplomatie ou de la politique de défense.
L'issue des récents démêlés des gouvernements français et allemand avec la Commission européenne au sujet du déficit budgétaire élevé de ces deux pays (eu égard aux critères de Maastricht) rappelle que, dans cette Europe où les États sont censés être égaux, il en est qui sont « plus égaux que d'autres ».
Les discours « libéraux » ou « anti-étatiques » ne sont proférés par les gouvernements d'Europe que pour justifier leur désengagement croissant des services publics. Mais l'argent ainsi économisé au détriment des classes populaires est réinjecté par l'État dans l'économie en subventions et aides au patronat et en cadeaux fiscaux à la bourgeoisie. C'est précisément au moment où les gouvernements, de France et d'Allemagne notamment, font des coupes claires dans les budgets sociaux et dans les crédits aux services publics, que les déficits budgétaires s'envolent dans les deux pays au point de dépasser les 3 % autorisés par le traité de Maastricht.
La Commission européenne, si chatouilleuse sur les critères de Maastricht quand il s'agit de petits pays, se contente dans ce cas de quelques admonestations.
En réalité, si la stagnation économique se poursuit en Europe, les bourgeoisies impérialistes de l'Union continueront à s'asseoir sur les critères de Maastricht. À moins qu'elles parviennent à imposer aux institutions européennes d'aider davantage « l'industrie européenne », c'est-à-dire le grand patronat. Une évolution dans ce sens est déjà perceptible. Mais, si les principales puissances impérialistes d'Europe, la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne en particulier, parviennent à imposer leur volonté aux autres, il leur est plus difficile de s'entendre sur le partage entre elles.
En officialisant la pratique de la « coopération renforcée » entre certains États de l'Union, le projet de Constitution légalise aussi l'association des puissances impérialistes dominantes de l'Europe en petit comité pour marchander entre elles des prises de position communes que les petits États - notamment les dix pays nouvellement intégrés - n'auront plus qu'à accepter.
L'appartenance à l'Union européenne n'a pas mis fin à la domination du grand capital d'Europe occidentale sur les pays de l'Est européen, elle a seulement réglementé la rivalité entre prédateurs impérialistes.
Leur projet de Constitution non seulement n'est pas démocratique vis-à-vis des peuples, mais il consacre sur le plan juridique une réalité : la mainmise des trois principaux impérialistes, allemand, français et britannique, sur les petites nations de l'Union européenne.
Pour ce qui est de cette Constitution européenne, nous sommes fondamentalement contre, non pas parce qu'elle est européenne, mais parce qu'elle est bourgeoise, c'est-à-dire destinée à préserver la propriété privée, l'exploitation et la domination de la bourgeoisie sur la société. Mais, la Constitution européenne n'est ni plus ni moins bourgeoise que celle de la France, et nous n'avons pas à choisir entre les deux Constitutions.
Si le projet de Constitution est soumis à référendum - à en juger par les réticences de Chirac et du gouvernement, ce n'est pas le plus vraisemblable -, nous appellerons les travailleurs à s'abstenir. Nous refusons de mêler nos voix à celles de l'un ou l'autre des deux camps de la bourgeoisie : celui qui se prononce pour une Constitution européenne et celui qui la refuse par « souverainisme » de droite ou de gauche. Mais, la Constitution européenne n'est ni plus ni moins bourgeoise que celle de la France, et nous n'avons pas à choisir entre les deux Constitutions.
Si le projet de Constitution est soumis à référendum - à en juger par les réticences de Chirac et du gouvernement, ce n'est pas le plus vraisemblable -, nous appellerons les travailleurs à s'abstenir. Nous refusons de mêler nos voix à celles de l'un ou l'autre des deux camps de la bourgeoisie : celui qui se prononce pour une Constitution européenne et celui qui la refuse par « souverainisme » de droite ou de gauche.