Je ne pense pas qu'on puisse dire que la petite bourgeoisie soit LA classe révolutionnaire du siècle passé malgré le nombre de révolutions dont elle a pris la tête. L'analyse de Trotsky sur l'incapacité de la bourgeoisie des pays sous-développés (trop liée à l'impérialisme, trop peur des masses) de mener à bien les tâches de la révolution bourgeoise pour purger ces pays de leurs survivances féodales nous sert pour comprendre le rôle essentiel qu'aura à jouer le prolétariat des villes et des campagnes dans ces pays.
Mais à aucun moment cette analyse ne dit qu'on pourra se passer de la construction du parti communiste, seul outil à même de mener le prolétariat des tâches de la révolution bourgeoise à celles de la révolution prolétarienne. Si les travailleurs ne sélectionnent pas une direction qui soit vraiment leur, il est clair que leur lutte risque d'être dévoyée par l'autre classe qui souffre de l'impérialisme, soit la petite bourgeoisie, radicalisée par la situation d'étouffement dans laquelle l'impérialisme condamne les pays pauvres et donc elle-même.
S'il est évident que cette lutte qui est directement tournée contre l'impérialisme qui domine le pays pauvre ne pourra être victorieuse sans un large soutien de la classe ouvrière et de la paysannerie, l'inexistence d'un parti qui défende réellement les intérêts du prolétariat ne peut aboutir qu'à des solutions batardes où la petite bourgeoisie essaye d'appliquer un programme qui pourrait lui faire faire des sauts dans l'histoire, lui faire rattraper son retard par rapport aux pays impérialistes arrivés plus tôts dans l'arêne de la compétition capitaliste internationale (enfin c'est ce qu'elle espère).
Elle se met à rêver à un avenir national dans le cadre du capitalisme. Et même si prise dans cette contradiction originelle de la petite bourgeoisie, elle prend des mesures directives pour son économie, cela n'en fait pas une classe révolutionnaire pour autant, cela n'en fait que signaler plus crûment encore le diagnostic de Trotsky sur la crise de la direction du prolétariat. Car tout ça ne sont que des songes, des projets inaboutis et ces pays ne peuvent pas échapper au giron du capitalisme, seulement s'y extraire un moment pour tenter de souffler.
Ni la bourgeoisie, ni la petite bourgeoisie ne peuvent réellement remettre en cause le système capitaliste, et dans ce sens on ne peut pas dire que ce soient des classes révolutionnaires. Mais tant que durera la "crise de la direction du mouvement ouvrier" les révolutions dont les troupes seront fournies par la classe ouvrière et les paysans pauvres seront indéfiniment confisquées par d'autres classes, dont, ce qu'on peut appeler la petite bourgeoisie radicalisée.
Enfin c'est comme ça que je vois la chose...