a écrit :Conférence nationale de la LCR
Orientations pour 2007
Les 24 et 25 juin prochains, la LCR réunira une conférence nationale qui débattra du projet de Manifeste en cours d’élaboration et décidera de l’orientation de l’organisation pour les échéances électorales du printemps 2007 (élection présidentielle et élections législatives).
C’est l’application d’une des décisions du XVIe Congrès de la LCR, tenu en janvier dernier. Comme un congrès, une conférence nationale est un espace de débat démocratique et de consultation des militants et des militantes. Des délégués seront élus dans les assemblées générales de base, à la proportionnelle des positions en présence. À la différence d’un congrès, la conférence nationale est convoquée sur un ordre du jour limité à une ou deux questions. Elle ne réélit pas la direction. Et, conformément aux statuts, ses votes ont une valeur consultative. Mais, naturellement, notre tradition démocratique veut que la direction nationale entérine les votes de la conférence nationale.
« Rouge » publie donc trois tribunes représentant les trois orientations entre lesquelles les membres devront choisir. Les lecteurs intéressés peuvent retrouver les résolutions sur le site de la LCR ... a écrit :POSiTION A (PLATEFORMES 1 ET 2)
Présenter Olivier, poursuivre la bataille unitaire
La profondeur des résistances, depuis 1995, pousse légitimement à l’unité des forces antilibérales et anticapitalistes. La crise sociale et politique n’arrête pas de rebondir : victoire du « non » de gauche, révolte des banlieues, levée en masse victorieuse contre le CPE. Elle met à l’ordre du jour la préparation d’un mouvement d’ensemble du monde du travail et de la jeunesse. Question fondamentale : celle des perspectives pour ces résistances. Seront-elles cristallisées dans une dynamique anticapitaliste ? Ou bien seront-elles détournées et rendues politiquement et socialement compatibles avec le social-libéralisme ? La LCR est entièrement partie prenante de la volonté unitaire pour aller dans le premier sens et pour empêcher le second. Les conditions pour avancer ensemble sont connues : battre la droite et sa politique, ne pas reproduire la stratégie de la gauche plurielle, rompre avec la direction socialiste, construire l’unité pour la généralisation des luttes. À ce jour, malgré nos efforts, les nécessaires clarifications politiques n’ont pas eu lieu. Plus : les positionnements adoptés par les forces politiques à la gauche du PS constituent autant d’obstacles. Lutte ouvrière n’est pas intéressée par une approche unitaire et a déjà annoncé la candidature d’Arlette Laguiller. Les socialistes du « non » ont rallié la « synthèse », sous la houlette de François Hollande. José Bové a pris soin de préciser que toute « plateforme [unitaire] devra aussi créer les conditions favorables à une négociation de second tour avec le PS ».
N’avons-nous donc rien appris du passé ? Peut-on réconcilier le « non » de gauche avec les dirigeants sociaux-libéraux du « oui », comme le laissent entendre les formules utilisées par Marie-George Buffet (« rassembler toute la gauche sur une base antilibérale ») ? Dans le prolongement du sens profond du « non » de gauche, une candidature unitaire doit, au contraire, s’engager à refuser la participation à un gouvernement avec la direction socialiste comme toute alliance parlementaire dans ce même cadre. En principe, toute la LCR en convient. S’il y a accord pour considérer que la rupture avec la direction du PS est le préalable, non négociable, d’une candidature unitaire antilibérale conséquente, alors il faut bien admettre que les conditions ne sont pas réunies pour le moment. Force est de constater que les dernières déclarations de Marie-George Buffet - « Quant aux décisions d’être ou non dans une majorité, d’être ou non au gouvernement, on verra après » - ne vont pas dans le bon sens...
La perspective anticapitaliste doit être présente avec le maximum de force. La candidature d’Olivier Besancenot incarne une présence militante dans les principaux mouvements des dernières années (campagne contre le traité constitutionnel européen, lutte contre le CPE). Renoncer aujourd’hui à cette candidature, alors même que M.-G. Buffet et J. Bové ont annoncé leur « disponibilité » - et A. Laguiller sa candidature -, nous empêcherait de peser pour une véritable unité anticapitaliste. Repousser la décision à la fin 2006, c’est se soumettre au calendrier du PCF, dont le conseil national fixera la position fin octobre. C’est aussi, alors même que M.-G. Buffet est déjà en campagne, handicaper gravement notre propre campagne. Sur le plan matériel : difficultés considérables dans le recueil des 500 parrainages d’élus pour un candidat virtuel, impossibilité de désigner un mandataire financier et d’être remboursé des frais occasionnés. Sur le plan politique : en cas d’échec unitaire, la campagne présidentielle serait limitée, pour la LCR, aux quelques mois précédant le scrutin. Repousser la décision de présenter Olivier revient, en pratique, à renoncer à cette candidature. Fin 2006, la seule chose que la LCR pourrait encore décider, c’est quel autre candidat, porte-parole d’un autre parti et porteur d’une autre orientation, elle pourrait soutenir !
Nous proposons de décider maintenant de présenter Olivier tout en poursuivant la bataille pour des candidatures unitaires : un accord sur le fond permettra aisément de résoudre les problèmes de casting. Si nous ne surmontions pas les obstacles, nous sommes certains qu’Olivier Besancenot saura exprimer la recherche d’une alternative réellement anticapitaliste et indépendante du social-libéralisme. Sa candidature sera ouverte à tous les soutiens se situant sur cette orientation unitaire et anticapitaliste. Elle œuvrera au rassemblement de tous ceux et de toutes celles qui aspirent à mener ce combat politique, à construire une véritable alternative pour le monde du travail et les classes populaires.
PF 1, PF 2
a écrit :POSITION B (PLATEFORMES 3 ET 4)
Un espoir de changer la donne à gauche
Voici venu le rendez-vous fixé par la PF1 lors du congrès : une conférence nationale (CN) pour décider de notre orientation électorale pour 2007. C’est-à-dire, pour elle et la PF2, l’annonce de la candidature d’Olivier Besancenot à la présidentielle !
Certes, une telle décision, si elle devait être majoritaire, fera grand bruit. Chaque parti n’est-il pas déjà en campagne, ou se déchirant sur cette même question : quel présidentiable propulser ?
Mais ce serait surtout beaucoup de dégâts. Car l’urgence n’est pas à trouver place dans le cirque présidentiel, mais à provoquer l’inédit : un changement de la donne politique. Et ce, par un refus que l’offre politique se réduise à un face-à-face entre une droite dure, ultralibérale, et une gauche sociale-libérale, qui n’hésite pas à reprendre à son compte les thèses sécuritaires. Avec, à l’affût, une extrême droite toujours prompte à rafler la mise de la désespérance sociale.
La LCR doit confirmer le message du congrès : sa volonté de lever les obstacles à des candidatures unitaires dans la continuité du « non » de gauche au traité constitutionnel européen. Une orientation qui fut décidée contre les camarades de la PF2, qui affirmaient que parier sur les acquis du 29 Mai relevait de l’illusion, que le rassemblement opéré à cette occasion était sans avenir autre que réformiste, et qu’il ne restait, avec ou sans Lutte ouvrière, qu’à mener une campagne « révolutionnaire »...
La majorité du congrès et la PF1 avaient alors jugé judicieux d’attendre pour annoncer une candidature 100 % LCR, et proposé l’orientation indiquée ci-dessus qui, à notre sens, n’a pas été mise en application, comme le confirme la réponse hostile faite à l’appel pour des candidatures unitaires.
Pourtant, le mouvement anti-CPE a confirmé la puissance du rejet du libéralisme. Et, donc, la nécessité de construire une alternative au social-libéralisme, seul horizon proposé par le PS. Cette profonde aspiration sociale explique que les collectifs unitaires ont perduré et viennent d’élaborer une charte antilibérale qui témoigne qu’un programme de rupture avec le libéralisme peut être partagé par des forces diverses, bien au-delà de la LCR.
Le PCF lui-même a compris qu’il fallait maintenir un discours unitaire et, donc, surseoir à l’annonce d’une candidature communiste. Il en est venu à soutenir un appel dans lequel est affirmé le refus de participer à un gouvernement dominé par le social-libéralisme. Cela ne suffit pas à dissiper des ambiguïtés importantes, tant sur la question des alliances envisageables avec le Parti socialiste que sur la volonté d’imposer Marie-George Buffet comme candidate unitaire. Mais si rien ne garantit l’avenir, se trouve confirmée une réelle aspiration à ce que se constitue un front antilibéral, porteur d’un programme de rupture avec le libéralisme et de candidatures unitaires pour le défendre.
La LCR ne peut mépriser une telle opportunité. Or, n’est-ce pas ce que vient de faire la direction majoritaire en refusant de signer le texte de l’appel unitaire ? Ce, sous prétexte qu’il n’inclut pas une formule explicite sur le refus de participer à une majorité parlementaire avec le PS, qu’elle ne s’est pas même donné la peine de proposer comme amendement. Et, avec sa décision de ne pas participer de plein droit aux collectifs d’initiative qui se mettent en place, se contentant du statut mineur d’observateur, ce qui n’est pas la meilleure position pour faire avancer ses propositions...
La CN doit redresser la situation et relancer la démarche politique offensive qui aurait dû être celle de la LCR depuis des mois. La CN doit :
décider de poursuivre la bataille pour des candidatures unitaires à la présidentielle et aux législatives, sur la base d’un programme de rupture avec le libéralisme et le social-libéralisme, ce qui exclut la constitution de toute majorité parlementaire avec le Parti socialiste en soutien à un gouvernement social-libéral et, a fortiori, toute participation gouvernementale avec le Parti socialiste ;
décider de participer sur cette base aux collectifs unitaires, national et locaux, avec le souci de clarifier les problèmes politiques qui demeurent et avec la volonté de favoriser une dynamique susceptible de changer radicalement la donne à gauche, pour les mobilisations et dans les élections.
affirmer Olivier Besancenot comme l’un des porte-parole des possibles candidatures unitaires, et comme étant appelé à être le candidat de la LCR en cas d’échec de cette démarche, ce qui implique de récolter rapidement les 500 promesses de parrainage permettant de garantir, en tout état de cause, notre présence à la présidentielle.
Léonce Aguirre, Vanina Giudicelli, Céline Malaisé, Christian Picquet
a écrit :POSITION C (PLATEFORME 5)
Répondre à une double exigence
Notre intervention ne déterminera pas l’issue des scrutins à venir, mais elle y sera un facteur essentiel pour aider à faire surgir une alternative des salariés et de la jeunesse. Dans cette voie, les choix de la conférence nationale devront répondre à une double exigence : a) affirmer sur la scène politique une gauche antilibérale conséquente qui n’ait pas peur de s’en prendre aux intérêts patronaux, ne s’incline pas devant les institutions antidémocratiques, s’appuie sur les luttes et favorise leur développement ;
pour cela, disputer l’hégémonie politique dans le mouvement large antilibéral aux courants qui défendent des programmes illusoires d’humanisation du capitalisme et finissent d’une façon ou d’une autre par se soumettre au social-libéralisme (voir l’exemple du PRC italien). Le récent appel pour des candidatures communes est électoraliste, inconsistant sur le plan du programme, ambigu quant aux rapports avec le PS. Mais, comme il n’y en avait pas d’autre (une « bouffe à quatre », par définition, ne peut mobiliser plus de quatre personnes), les militants s’en sont emparé. Une chose est la ligne politique des initiateurs, autre chose est l’aspiration qui s’exprime par en bas. Ne considérer que le premier aspect conduit à l’abstentionnisme sectaire, le relativiser au profit du second, à l’opportunisme.
Le PCF ne cache pas son intention de donner un vernis unitaire à une candidature Buffet qui ne décolle toujours pas ; sans se départir de son soutien à Fabius, PRS hausse le ton face à la « blairisation » du PS qu’incarne l’opération Royal ; la gauche des Verts lutte pour sa survie après avoir été laminée à l’intérieur de son parti : tout cela est évident, mais ce n’est qu’une partie de la réalité. Car ces directions ne se seraient pas positionnées de la sorte si elles n’étaient pas confrontées à la puissance du mouvement antilibéral, mise en évidence par la victoire sur le CPE, un an après celle du référendum.
La pseudo-théorie des deux gauches, selon laquelle « entre Hollande et Besancenot, il n’y a pas de troisième voie », niait la capacité d’action autonome de cette gauche antilibérale inconséquente : l’épreuve des faits a été sans pitié ! Désarçonnée, la LCR doit maintenant réagir. Mais abandonner le terrain pour se réfugier dans son pré carré, bardé de défenses identitaires (comme l’inédite revendication de l’anticapitalisme « contre » l’antilibéralisme), n’est pas la solution. Se rallier avec armes et bagages, non plus.
Sans cautionner par sa signature un mauvais texte d’appel, la LCR doit participer au collectif national d’initiative, comme, naturellement, aux collectifs locaux. Ne pas se contenter d’« observer » mais agir, avec pour objectif d’aboutir. Proposer de débattre d’un programme d’action, pour les luttes et pour les élections, conséquemment antilibéral et, de ce fait, nécessairement anticapitaliste, à l’opposé des projets qui, ressuscitant les recettes obsolètes de l’époque des Trente Glorieuses, imaginent une intervention vertueuse de l’État qui relancerait l’économie et réduirait les inégalités sans affrontements de classe majeurs.
L’accord sur un tel programme, ainsi que sur le rejet de toute alliance avec les sociaux-libéraux, permettrait la mise en place d’un front social et politique - pas une simple et éphémère coalition électorale -, dont émaneraient alors des candidatures communes. Comme Olivier Besancenot l’a indiqué à plusieurs reprises, ce qui est décisif est le scénario, non le casting.
De Marie-George Buffet à José Bové, les prétendants ne manquent pas pour représenter un rassemblement antilibéral à la présidentielle. La LCR a un bon candidat, qui ne serait certainement pas moins légitime. La conférence nationale doit annoncer la précandidature d’Olivier Besancenot. Précandida-ture, parce que nous poursuivons la bataille unitaire et souhaitons mettre nos forces au service de candidatures communes sur les bases indiquées. La précampagne de notre porte-parole renforcera cette bataille, en même temps qu’elle développera nos propres réponses politiques et programmatiques.
En fin d’année, il reviendra à la direction nationale de tirer le bilan des efforts entrepris et d’arrêter une position définitive. Si notre combat pour l’unité est couronné de succès, tout le mouvement et la LCR en son sein auront franchi un grand pas. Si, finalement, nous devons nous présenter seuls, ce sera avec l’acquis de cette bataille unitaire et de clarification politique.
Sylviane Charles, Jean-Philippe Divès, Jean-Louis Marchetti, Virginia de la Siega