Chez les ex-LU, le vote PS n'est plus exclu

Tout ce qui touche de près ou de loin à l'actualité politique en France

Message par Barikad » 25 Mars 2004, 19:41

a écrit :
Ceux qui ne boudent plus la gauche
Ils n'avaient pas voté Jospin le 21 avril 2002. Dimanche, ils ont voté utile pour la gauche de gouvernement. Témoignages.


   
Par Emmanuel DAVIDENKOFF, Hervé NATHAN, Haydée SABERAN et Tonino SERAFINI

jeudi 25 mars 2004


   

Ils sont de retour. Nombre d'électeurs de la gauche de gouvernement s'étaient éparpillés le 21 avril 2002 dans l'abstention ou le vote d'extrême gauche. Dimanche dernier, ils ont glissé dans l'urne un bulletin de vote aux couleurs d'un ou plusieurs partis de l'ex-majorité plurielle. Le résultat est décapant: la gauche gouvernementale totalise plus de 40 % des suffrages, au détriment de l'extrême gauche, qui voit son score de 2002 divisé par deux. Les anciens électeurs LCR ou LO ont parfois choisi le PCF ou les Verts pour exprimer une sorte de vote protestataire «utile». D'autres ont regoûté au vote PS. Dans nombre de régions, ce choix efface non seulement le souvenir de la débâcle de Jospin, mais aussi la défaite municipale de 2001. Libération a interrogé ces «peuples de gauche» - fonctionnaires, ouvriers, enseignants, employés - revenus au bercail : ils ont tous voté pour rejeter la politique du gouvernement Raffarin. Sans plus. C'est-à-dire sans adhérer à un nouveau projet de gauche encore inexistant. Car si l'électeur est réapparu, il se méfie toujours.

Laurent, agent des impôts à Paris, 35 ans.
«Pour être contre, pas besoin de voter LCR»


«J'ai voté pour Besancenot en 2002. Je ne regrette pas, il y avait un manque de confiance dans Jospin. Comme un glissement général. Au ministère des Finances, on avait un souvenir douloureux avec la gauche sur ses projets de réformes, on n'a pas été entendus, cela a fait une cassure. Mais l'extrême gauche s'est décrédibilisée au lendemain du 21 avril en n'appelant pas à voter contre le FN. C'était le non-choix face au pire. Cette fois, je me suis renseigné, j'ai regardé les sondages, pour éviter un 21 avril. J'ai voté Huchon. C'est une adhésion partielle. Il a un bon parcours, il a institué la gratuité des livres scolaires, par exemple, et n'affiche pas d'ambitions personnelles. Et puis les socialistes ne sont plus au pouvoir. Pour être contre, pas besoin de voter LCR, le PS suffit.»

Corinne Guelle
Travailleuse sociale à Paris, 44 ans
«Chirac a profité des circonstances politiques»


«Le 21 avril 2002, j'avais voté Verts pour donner un avertissement sans frais à Jospin. Mais, pour moi, il était impensable qu'il soit balayé au soir du premier tour. Au second, j'ai voté Chirac un bouquet de roses à la main. Dimanche, j'ai voté utile, pour le PS. C'était absolument nécessaire pour inverser le rapport de force politique. Pour dire à Raffarin, qui n'a pas voulu nous écouter quand nous sommes descendus dans la rue, de faire attention. Cette majorité est en place pour trois ans encore : c'était le moment où jamais de se faire entendre. Le gouvernement doit cesser de croire que la France est derrière lui, sous prétexte que les gens ont voté massivement Chirac à la présidentielle. C'était un vote contraint, un vote républicain. Mais Chirac s'en est servi à des fins partisanes. Il a profité de circonstances politiques malheureuses pour faire passer des mesures inacceptables contre les chômeurs en fin de droits, les intermittents, les chercheurs. La majorité invoque des difficultés budgétaires, mais je note qu'il y a toujours de l'argent pour sa clientèle. Les baisses d'impôts ont surtout profité aux contribuables les plus riches. Aux autres, on leur a repris avec les taxes sur l'essence. J'ai voté pour dire au gouvernement que je n'adhère pas à ses thèses libérales, ni au programme de l'UMP qui les sous-tend.»

Laurent Binet
Professeur de lettres à Saint-Ouen, 31 ans
«La droite, ça fait vraiment mal»


«Le 21 avril, j'avais voté Besancenot et ce n'était pas la première fois que je votais LCR. Je m'étais promis de ne plus voter PS, même au deuxième tour : le discours est à gauche, mais la politique est de droite. Je n'ai pas pardonné le jour où Jospin a dit aux Michelin que «l'Etat ne peut pas tout faire». Je sais qu'il y a eu la CMU ou les 35 heures, mais les lois Pasqua n'ont jamais été abrogées. Trop de petites trahisons systématiques, en somme. Bref, c'était juré, je ne voterais pas PS. J'ai été servi... j'ai dû voter Chirac. Dimanche, j'ai voté Buffet (PCF). Je n'ai pas encaissé la position de l'extrême gauche sur le voile : pour des partis qui se réclament du marxisme, transiger avec la religion de cette façon ! Et puis, ils n'ont pas voté pour la taxe Tobin au Parlement européen. La fusion LO-LCR ne m'a pas plus séduit. La LCR, au moins, avait fini par appeler à faire barrage à Le Pen en 2002. Mais pas LO. Ils ne se mettent jamais en position de pouvoir changer les choses. C'est toujours la même histoire : il faut que la droite soit au pouvoir pour que je me dise qu'on est quand même plus tranquilles sous la gauche. Mais de là à voter PS directement, il y a un pas. J'ai des copains enseignants, à Paris, qui vivent dans des taudis tellement les loyers sont délirants. Delanoë, je l'aime bien, mais il fait quoi, au juste ? Et puis qui dit que le PS reviendra sur les réformes de la droite, par exemple sur les retraites ? Alors, finalement, face à la régression sociale que nous affrontons, j'ai choisi le PC. Presque par sentimentalisme. Parce que, malgré tout, historiquement, c'est le parti qui incarne les luttes sociales. Et les anciens ministres communistes n'étaient pas les moins bons ni les plus compromis. En somme, je suis un déçu de la gauche qui se remet à voter pour un parti de gouvernement parce que je me remémore que la droite, ça fait vraiment mal.»

Michel
Ouvrier à l'usine Noroxo de Harnes, 45 ans
«On fera pas de cadeau à la gauche si ça marche pas»


«Le 21 avril 2002, je n'ai pas voté, parce que je n'étais pas dans la région, mais si j'avais pu, j'aurais voté communiste pour sanctionner Jospin. Cette fois, j'ai voté PS, pour sanctionner la droite. Même si je suis convaincu que les socialistes, dans la même situation, ça n'aurait pas changé grand-chose. Les politiques s'amusent avec nous. La gauche, on lui redonne une chance. On lui tend la main, à elle de la prendre. C'est un appel au secours, on va voir ce qu'elle a dans le ventre, mais on lui fera pas de cadeaux, si ça marche pas. Le problème, c'est l'emploi. Les emplois-jeunes, c'était une façon habile de réduire le chômage. Les 35 heures, ça n'a pas créé d'emplois. Et ça n'a pas amélioré ma vie, c'est plus de stress et de fatigue. On a moins de temps, et autant de travail, voire plus à cause des compressions de personnel.»
Barikad
 
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