Cet accord est encore pire que pas d'accord du tout car il entérine le soutien gouvernemental à des dépassements de 250% désormais considérés comme normaux et acceptables.
Cela évitera à Marisol Touraine la ministre de la santé des engueulades avec son frère, professeur de médecine et membre d'un comité de l'Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé), agence dépendant du ministère. En effet, Philippe Touraine, le frère en question, endocrinologue et diabétologue n’accepte pas la carte Vitale et, surtout, pratique des tarifs de consultation de 130 à 150 euros, soit entre 5 fois et demi et six fois et demi les tarifs sécu....
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Les gagnants et les perdants de l'accord sur les dépassements d'honoraires
LE MONDE | 24.10.2012
Par Jean-Baptiste Chastand et Laetitia Clavreul
Les praticiens de secteur 2 qui s'inscriront dans le nouveau "contrat d'accès aux soins" devront faire payer leur consultation au tarif de la Sécu
Au forceps, médecins et assurance-maladie ont accouché d'un accord sur la limitation des dépassements d'honoraires, mardi 23 octobre, après plus de 21 heures de négociations. L'accord a été qualifié "d'événement historique" par plusieurs syndicats de médecins et de "tournant majeur" par la ministre de la santé, Marisol Touraine. Certes, il ouvre la voie, pour la première fois, à un frein à la hausse constante des dépassements. Mais tout le monde n'y gagnera pas forcément dès maintenant.
Les patients se sentiront-ils moins démunis face aux dépassements d'honoraires ? Certains clairement. Les praticiens de secteur 2 qui s'inscriront dans le nouveau "contrat d'accès aux soins" devront faire payer leur consultation au tarif de la Sécu non plus seulement aux cas d'urgence et aux bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU, pour les plus démunis), mais aussi à ceux éligibles à l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS), soit plus de 4 millions de personnes ayant des revenus inférieurs à 900 euros par mois.
Pour leurs autres patients, les médecins qui ont signé le contrat devront plafonner leurs dépassements au niveau de ceux qu'ils pratiquaient en 2012. Mais comme leur consultation sera remboursée 5 euros de plus, la somme déboursée par le patient sera moindre. Pour entrer en vigueur, l'accord prévoit qu'il faut qu'au moins 30 % des 25 000 médecins qui pratiquent des dépassements inférieurs à deux fois le tarif Sécu aient signé ce contrat. Difficile de savoir s'ils suivront en nombre. Pour les médecins qui ne signeront pas, il n'y a aucune régulation des dépassements, sauf en cas d'excès.
"LES ASSOCIATIONS ONT L'IMPRESSION D'AVOIR PERDU"
Le gouvernement voulait que les médecins pratiquant des dépassements 2,5 fois supérieurs au tarif de la Sécu puissent être sanctionnés. Un casus belli pour certains syndicats de médecins qui ne voulaient pas entendre parler d'un seuil maximum. Au final, ce taux ne fait plus figure que de "repère " et "pourra faire l'objet d'adaptations dans certaines zones géographiques". "Il n'était pourtant pas très bas", estime Claude Leicher, le président du syndicat de généralistes MG France (gauche). Rien ne dit comment les zones à dépassements plus élevés seront définies, - cela promet encore de longs pourparlers. "A part Paris, il n'y a pas eu de demande de dérogations de la part des médecins", nous indique la ministre, qui se veut rassurante.
Autre problème, ce sont des commissions paritaires, constituées de syndicats et de représentants de l'assurance-maladie, qui pourront sanctionner les abus. Elles seront saisies non directement par les patients mais par l'assurance-maladie. "Les associations, qui avaient fondé beaucoup d'espoir, ont l'impression d'avoir perdu", s'inquiète Christian Saout, président du Collectif interassociatif sur la santé (CISS).
LES MÉDECINS REVALORISÉS
Ce n'est pas un hasard si la quasi-totalité des syndicats se préparent à signer l'accord. Ils ont réussi à imposer une revalorisation de leurs tarifs en secteur 1 (sans dépassements), à hauteur de 320 millions d'euros. Cette hausse bénéficiera également aux médecins de secteur 2 qui auront signé le "contrat d'accès aux soins" et dont les cotisations seront en partie prises en charge. Le gouvernement a aussi accepté de satisfaire une vieille revendication des médecins : le passage en secteur 2 de plusieurs centaines d'anciens chefs de cliniques bloqués en secteur 1. Ce qui augmentera le nombre des médecins à honoraires libres.
Les complémentaires santé se sont engagées à mettre 150 millions d'euros sur la table pour le secteur 1, mais les médecins auraient aimé qu'elles financent davantage les dépassements des contrats d'accès aux soins. "Nous dépensons déjà 800 millions d'euros pour les dépassements, il aurait été contradictoire d'en financer encore plus alors que le but est de les limiter", a expliqué Patrice Henry, le président de l'Unocam, qui les représente.
En fait, les mutuelles préfèrent aider au financement du secteur 1, contrôlé par la Sécu, que le secteur 2, aux dépassements totalement imprévisibles. Mais comme elles ont intérêt à ce que le "contrat d'accès aux soins" soit attractif, elles promettent que les 800 millions d'euros iront prioritairement vers les médecins signataires du contrat.
COUPS DE POKER
Le gouvernement ne sort pas forcément renforcé de la négociation, car il a dû reculer plusieurs fois pour obtenir un accord coûte que coûte. Il a notamment cédé sur la non-inscription d'un seuil de dépassements abusifs, même s'il se peut, comme l'espère la ministre, que le facteur de 2,5 soit gravé dans les esprits.
En passant par la méthode traditionnelle des négociations avec les syndicats médicaux, le gouvernement s'est exposé par ailleurs aux rebondissements tragi-comiques qui leur sont propres : vrais-faux départs des négociateurs et coups de poker se sont multipliés au prix d'un manque de transparence.
Les patients, eux, sont restés à la porte. Et à plusieurs reprises, Michel Yahiel, le conseiller social de François Hollande est intervenu directement pour sauver une des principales promesses de campagne du président.