Je poste ici les différents éditos de la semaine (j'ai un peu hésité entre les différents fils):
LO:
a écrit : L'ESPOIR N'EST NI DANS LA VIOLENCE STÉRILE NI DANS LA RÉSIGNATION
Après la banlieue parisienne, la flambée de violence dans les quartiers populaires a touché d'autres villes. Et ce ne sont certainement pas les cyniques propos de Chirac sur "l'égalité des chances" qui peuvent toucher les jeunes ! Quant à Sarkozy, chaque fois qu'il ouvre la bouche, il propulse dans les rues de nouveaux contingents de jeunes, voire de gamins.
Cette flambée de violence est stérile. Brûler les voitures de ses propres parents ou voisins, brûler des autobus qui desservent les quartiers populaires, saccager des écoles maternelles témoigne de la part de ceux qui le font d'une absence de conscience sociale et de solidarité. Rendre la vie plus invivable encore pour les siens, simplement par imitation des autres, n'est pas la seule façon d'exprimer sa colère, et sûrement pas la meilleure.
Mais comment les dirigeants politiques, ceux qui sont au pouvoir comme ceux qui rêvent d'y revenir, pourraient-ils convaincre ces jeunes que, malgré leur vie présente, il y a un espoir d'avenir ?
La pauvreté des quartiers transformés en ghettos, le chômage, l'absence criante d'infrastructures n'expliquent pas la forme prise par la révolte mais en constituent le terreau. Comment oser prétendre que l'on fait quelque chose pour les quartiers populaires lorsque les jeunes qui y vivent constatent jour après jour que rien n'y change, si ce n'est en pire ? Et que l'État n'y apparaît que sous la forme, en bas, de contrôles policiers au faciès ou d'interventions massives de CRS, en haut, de ministres méprisants vis-à-vis de tout ce qui est pauvre ?
La majorité de droite et l'opposition socialiste se retrouvent aujourd'hui à faire appel, en même temps qu'à la matraque, à "l'idéal républicain". Mais comment les jeunes de ces quartiers pourraient-ils prendre cette République pour idéal alors qu'elle est faite pour les riches et les puissants ? Comment donner en exemple ceux qui s'en sortent par le travail alors que ceux qui en cherchent n'en trouvent pas ?
Comment arracher les jeunes des quartiers populaires à l'influence des petits parasites qui vivent de trafics de toutes sortes alors que la vie ne sourit qu'aux grands parasites qui dominent la société ? Et comment les convaincre qu'il est stupide de brûler des écoles dans les quartiers populaires alors qu'à côté d'une école brûlée, combien d'autres, indispensables pourtant, n'ont même pas été construites parce que ceux qui nous gouvernent ne consacrent pas d'argent à cela ? Pendant qu'il y a des milliards dépensés en faveur des riches, les écoles des quartiers populaires sont surchargées, avec des enseignants débordés, dans l'impossibilité matérielle de transmettre à tous ce minimum d'éducation que les familles n'ont pas les moyens de transmettre - ne serait-ce que savoir lire, écrire et parler correctement. Et, de toute façon, les années passées en classe ne débouchent sur rien, pas même sur un emploi.
Les travailleurs n'ont pas à se réjouir de la forme que prend cette explosion, et pas seulement parce qu'ils sont les premiers à en souffrir. La jeunesse, c'est l'avenir. Mais de quel avenir une jeunesse déboussolée peut-elle être l'artisan ?
Ce ne sont pas ceux qui nous gouvernent qui peuvent donner un espoir à la jeunesse des quartiers pauvres. Car la seule perspective dont ils sont les porteurs, c'est, au mieux, la réussite individuelle pour quelques-uns et la résignation pour les autres.
Pour que la jeunesse pauvre n'en soit pas réduite à l'alternative entre la résignation dans l'exploitation et la violence stérile, il faudrait que le mouvement ouvrier retrouve sa capacité de lutte et surtout la volonté politique d'incarner un espoir de transformation sociale.
Ce qui se passe dans les quartiers populaires ne signifie pas seulement la faillite d'un gouvernement. Il signifie plus encore la faillite de l'organisation capitaliste de la société, pourrie d'inégalités, d'injustices, et qui ne peut mener la vie sociale qu'à la décomposition.
Arlette Laguiller
Bulletins l'étincelle de la fraction:
a écrit :Lundi 7 novembre 2005
Y a le feu… pour entrer en lutte tous ensemble !
C’est la révolte d’une fraction de la jeunesse ouvrière qui en une douzaine de jours s’est étendue dans les quartiers où vivent les familles en situation la plus précaire dans le travail comme les conditions de vie.
C’est la révolte de la génération qui est appelée à venir nous rejoindre à l’usine, au chantier ou au bureau ; et nous rejoint parfois déjà… par intermittence, parce que tout ce qu’on lui offre c’est petits boulots ou postes d’intérim. Que nous soyons français de longues générations ou immigrés de date récente, ce sont nos enfants, nos frères, nos sœurs, ou les futurs camarades de nos enfants, ceux avec qui ceux-ci devront partager une vie de galère ou de dignité… suivant ce que nous en aurons fait.
C’est bien d’ailleurs la rage contre cette vie de galère et l’envie de dignité qui poussent ces jeunes dans la rue chaque soir. Pour venger la mort absurde des deux adolescents de Clichy-sous-bois, pour riposter aux insultes de Sarkozy les traitant de « racaille » ou prétendant nettoyer leur quartier au karcher, pour faire payer les brimades et les vexations d’une police hostile et méprisante.
Sans moyens, sans travail, sans éducation (ou quand ils en ont une, les employeurs s’en foutent), ils ne voient souvent de perspective que dans l’individualisme, la débrouillardise, les trafics, petits ou grands. Pas étonnant que lorsqu’elle explose, leur révolte reste aveugle dans ses cibles, qu’ils cassent pour casser, brûlent pour brûler, caillassent les bus, les trains ou les pompiers comme les policiers…
Le gouvernement et les capitalistes, les vrais responsables de la situation des banlieues, sont à l’abri de leurs pierres. Leurs voitures comme leurs résidences sont protégées de leurs cocktails molotov.
Ils ne le seraient pas d’un mouvement de colère de l’ensemble des salariés. Celui-là d’ailleurs n’aurait pas besoin de jeter des pierres ni de mettre le feu. Il aurait d’autres moyens, plus efficaces, pour mettre les puissants à genoux, de la grève jusqu’au soulèvement massif qui pourrait être d’autant plus pacifique qu’il serait puissant : même des dizaines de milliers de policiers ne peuvent barrer les rues à des millions de travailleurs. Mai 68 a atteint sa vigueur maximum quand l’insurrection étudiante (qui avait aussi brûlé des voitures) a débouché sur la grève générale.
Certes les jeunes sont loin d’être tous conscients que leur révolte aurait intérêt à déboucher sur un mouvement bien plus large de tout le monde du travail. Beaucoup n’ont même aucun sentiment d’appartenir à ce monde du travail. Les plus inconscients, ou les plus stupides, semblent même se contre-foutre du reste de la population, quand ils brûlent les voitures des gens de leur cité par exemple. Ils montrent même parfois une hostilité aux autres travailleurs, quand ils caillassent trains ou bus avec voyageurs et conducteurs.
C’est là l’impasse, et pour eux et pour nous tous. Mais les œillères et les préjugés d’une jeunesse sans tradition politique ni éducation sociale, ne tomberont pas toutes seules si ce monde du travail ne montre pas une détermination au moins aussi grande que la leur d’en découdre avec nos ennemis commun. Et tant que ceux qui passent pour ses dirigeants seront aussi lâches ; tant que la gauche proposera… d’attendre les élections ; tant que les dirigeants syndicaux feront tout pour éteindre nos luttes ou isoler les plus radicales, comme ils viennent de le faire avec les marins et les traminots Marseille.
Seuls nous, travailleurs, pouvons donner une perspective à la révolte des jeunes. En entamant une lutte aussi déterminée que la leur, mais avec d’autres moyens, pour imposer les objectifs qui changeraient immédiatement leur vie… et la nôtre : augmentation de tous les salaires, interdiction des licenciements et des contrats de précarité, augmentation de tous les salaires de 300 euros par mois, remboursement des milliards de subventions reçus par les patrons pour créer des centaines de milliers de nouveaux emplois dans les services publics, réquisition des logements vacants des riches.
Alors nous n’aurions plus à craindre pour nos écoles, nos bus ou nos voitures.
Tract de la semaine de la LCR:
a écrit :Jeunes en colère, habitants des quartiers, solidarité contre le gouvernement !
Chirac et le gouvernement persistent et signent. Loin de désamorcer la crise, en donnant des réponses d’urgence sociale, le pouvoir décide d’aggraver la répression. Sarkozy continue ses provocations. Révoltés par la tragédie de Clichy, où deux adolescents ont trouvé la mort, les jeunes de dizaines de cités, dans tout le pays, affrontent depuis plusieurs nuits consécutives les forces de police. Si la colère de jeunes, sans formation, sans emploi (Citroën Aulnay vient de renvoyer 700 jeunes intérimaires), victimes du racisme et de la discrimination est compréhensible, ils se trompent de cibles lorsqu’ils incendient les voitures des habitants, des écoles, des gymnases ou des crèches. L’ennemi, c’est la politique du gouvernement et c’est tous ensemble, jeunes en colère et habitants des quartiers, qu’il faut lutter contre Sarkozy, et toutes les politiques qui ont cassé les quartiers depuis plus de vingt ans.
Le gouvernement, responsable de la situation créée
La politique de Villepin et Sarkozy, c’est le chômage de masse et la précarité qui alimentent une misère grandissante. À la périphérie des grandes villes, la formation de véritables ghettos sociaux va de pair avec des discriminations toujours moins supportables. On démantèle l’école publique, ce qui généralise l’échec scolaire. Dans la logique des politiques de déréglementation, les services publics de proximité sont mis en pièces. On ne cesse de réduire les crédits consacrés à la prévention. Le logement social est partout sacrifié. Voilà le quotidien d’une grande partie de la population de ce pays. Pendant ce temps-là, à l’Assemblée nationale, la majorité allège l’impôt sur la fortune ou exonère les dividendes des actionnaires.
Sarkozy, le pompier-pyromane, doit partir !
Complément logique de cette politique de classe qui s’affiche sans vergogne, les contrôles policiers se font chaque jour plus odieux et violents. Le racisme répand son poison, encouragé par les propos provocateurs de Sarkozy. Emporté par sa volonté de criminaliser toute une jeunesse, le ministre de l’Intérieur va jusqu’à l’insulter en la traitant de « racaille » et de « gangrène ». En campagne pré-électorale permanente, soucieux de se rallier les faveurs des électeurs de Le Pen, il annonce qu’il se rendra chaque semaine dans une nouvelle banlieue. Ce qui aura pour seul effet d’accentuer la pression policière sur les zones concernées et d’y rendre la situation plus explosive encore. Et ce climat de violence, insupportable pour les populations, ne fera qu’accroître leurs difficultés quotidiennes. Décidément, Sarkozy, l’incendiaire des banlieues, doit partir !
La mobilisation populaire s’impose ! Tous ensemble contre le gouvernement !
Ce n’est pas par l’intervention incontrôlée de la police qu’on réglera les problèmes, mais par l’intervention de la population. La mobilisation des forces progressistes est décisive. Il faut arrêter les provocations policières et agir en faveur de mesures immédiates favorisant une vie solidaire dans nos quartiers et nos cités. Devant les désastres sociaux provoqués par des années de libéralisme, i l faut exiger que la priorité soit donnée à la création d’emplois stables, aux services publics, à l’école, au logement, à la prévention. L’action de ce gouvernement sème la misère et engendre le désespoir. Rien n’est plus urgent que de le mettre en échec. C’est ce à quoi appelle la LCR. Le 7 novembre 2005