http://www.wnyc.org/shows/heresthething/2012/jul/02/
L'émission de radio dont je parle, en anglais.
Et une transcription : http://www.wnyc.org/shows/heresthething/20.../02/transcript/
a écrit :
Revenons aux bases : qu’est ce que la pleine conscience ? C’est la pleine conscience du moment présent, de ce qui s’y trouve. Porter notre attention sur un élément du corps (la respiration, différentes sensations corporelles) ou sur un élément extérieur (des sons) nous situe dans le moment présent. Se présentent alors des pensées, des images mentales, car dans notre espace mental, nous avons cette « machine à penser et à résoudre les problèmes » qui travaille en permanence. Ces pensées se présentent, elles font donc partie du présent, et nous les observons aussi. Notre activité mentale allume des émotions, et ces émotions, nous les laissons être ce qu’elles sont, nous observons leurs effets corporels, nous suivons leur évolution.
Ce « training » nous conduit à nous habituer à nos pensées et nos émotions sans les éviter, sans faire appel à des conduites qui ont en dernière analyse pour fonction de masquer pensées et émotions pénibles (boulimies, prises alimentaires exagérées, travail, télévision, sport, toute activité produisant des sensations de préférence intenses peut être utilisé).
On s’habitue à avoir toutes sortes de pensées qui ne plaisent pas à notre être conscient. Mais cet « être conscient », ce « je », ce « moi observateur », ou pour parler comme les neurophysiologistes, cet espace de travail, ou encore pour le dire à la façon des croyants, cette âme, ce n’est pas ce qui pense en nous, c’est ce qui observe. Là où je pense, je ne suis pas, là où je suis, je ne pense pas.
On s’habitue aussi à ses émotions, à ces sensations physiques qui les constituent. Lorsque ces émotions sont intenses, elles prennent un tour désagréable. Un tour inquiétant, même. On peut alors prendre peur à propos de ce qu’on ressent. Ou bien nos pensées, nos émotions génèrent de nouvelles pensées et émotions, dites secondaires. On a peur d’avoir peur, on est en colère face à ses pensées, ou bien on est coupable, honteux…
Pour toutes ces raisons, on peut préférer ne rien vouloir savoir de tout cela, de son monde intérieur, de ses émotions, s’en détourner et les éviter.
Malheureusement, cela ne les empêche pas d’exister. Les émotions se révèlent alors à nous, non pas par des pensées, par des signaux physiques, mais par des sensations physiques qui s’emballent : boule dans la gorge, dans le ventre, troubles visuels, malaises, douleurs et fatigue.
Voilà pourquoi il est bon de se mettre à écouter son monde intérieur, à écouter notre corps qui nous signale ce que nous ressentons et que nous appelons des émotions. Nous pouvons alors adapter nos conduites, nous sommes motivés à certains apprentissages afin de ne pas nous trouver démunis dans telle ou telle situation.
Lorsqu’on fait ces exercices de pleine conscience, il est fondamental de ne pas chercher à « faire passer » les pensées et émotions. Faute de quoi, on n’est plus dans le mode « être », cette position de l’observateur, et on en est revenu au mode « faire ». On veut que les émotions disparaissent, ou on veut les « canaliser ». C’est là un piège courant, et peut-être le plus difficile dans cette affaire de pleine conscience. Il convient au contraire de laisser nos pensées être ce qu’elles sont, et nos émotions de même, de se contenter de les observer, de près, de tout près, sans chercher à les faire partir. Oh, elles partiront, lorsqu’elles le voudront. Et lorsqu’elles partiront, nous ferons ce constat : elles sont passées en nous et nous sommes intacts.
Imaginez que votre espace mental est comme le ciel, et que vos pensées et émotions sont comme le temps qu’il fait. Le temps est variable, parfois au beau, parfois à l’orage. Il se peut même qu’il y ait du barouf, des éclairs, du tonnerre. Le ciel contient tout cela, sans en être atteint. À tout moment, vous pouvez vous élever dans le ciel et contempler les nuages, l’orage, et même la tempête de plus haut. On ne cherche pas à modifier le temps qu’il fait, on attend que ce temps évolue de lui-même.
Manger en pleine conscience, pas seulement pour le plaisir, mais aussi pour le réconfort que cela apporte, est parfaitement légitime. Dans la mesure où on n’est pas dans l’évitement émotionnel, dans la recherche d’une annulation de ses émotions. Dans la mesure où nos sensations gustatives constituent cet élément qui nous recentre sur le moment présent. On accepte alors les pensées qui nous rendent visite, les émotions qui s’allument, comme autant d’éléments du présent, toutes choses à observer.
Alors, cher zapretender, peut-être est-ce là ce qui vous empêche d’avancer, ce qui fait que vous avez ces réactions dites psychosomatiques : vous cherchez à contrôler vos états mentaux et vos émotions.
Je sais que ce n’est pas facile d’abandonner le mode « faire » et de se situer dans le mode « être », d’être là, en pur observateur de ses états mentaux. Mais si vous y parvenez, tout d’abord un peu, puis de plus en plus (sans jamais y arriver complètement), alors sans doute les choses bougeront-elles dans le bons sens.
Encore un petit mot : nombreux sont ceux d’entre vous qui ont constaté que ne plus se réfugier dans la nourriture aboutissait à ressentir davantage. Et que ce n’était pas forcément agréable ! Et justement, la pratique de la pleine conscience permet d’accepter de mieux en mieux ses émotions, sans les craindre, de s’y habituer sans les fuir, de ne plus avoir besoin d'anesthésie.
À se rappeler : je ne suis pas mes pensées (verbe être, verbe suivre), « je » ne suis pas responsable de mes émotions, dont « je » ne suis que l’observateur.
Bonne journée à tout le monde, et bonne continuation.
G. Apfeldorfer
a écrit :Ayant perdu 27 kilos, le principal problème que j'ai est qu'on peut arrêter de fumer mais pas de manger; c'est bête à dire, je sais.
a écrit :Et dernier point: il n'y a pas d'addiction aux aliments. Par contre, il y a une addiction comportementale aux conduites d'évitement émotionnel et les boulimies et autres excès en font partie. On est donc addict en raison de son hypersensibilité émotionnelle, dans ce cas de figure.
a écrit :Nous recommandons de ne pas chercher à bouleverser d'emblée son comportement alimentaire en début de programme car effectivement, il y a ce risque, de lâcher le contrôle sans encore avoir la possibilité de lui substituer une autre méthode de contrôle du comportement alimentaire par le biais des sensations.
(clavez @ dimanche 18 novembre 2012 10:35 a écrit :
Je vais de temps en temps avec ma nièce à la pâtisserie viennoise de la rue de l'école de médecine
a écrit :
GROSInfo n°9 janvier 2013: Spécial Congrès
Mon incarnation me permet d’être en interaction avec le monde, ce qui m’occasionne des sensations. Par là même, je me sens vivant, présent, et qui plus est, je suis à même d’en prendre conscience.
Personnellement, je ne m’en lasse pas. Vivre, c’est épatant. Aujourd’hui, par exemple, j’ai un peu mal au dos et je me tiens tout tordu. Eh bien, lorsque je le vois, ce mal de dos, comme un rappel de ma condition d’être incarné, je le trouve acceptable, voire réjouissant. J’explore ma douleur, j’en repère les saillies, et je me dis que ce mal de dos est mieux que rien, ce rien du néant qui, à un moment ou un autre, m’aspirera, comme il se doit.
Oserais-je faire le rapprochement avec le corps gros qui nous occupe tant ? Ce corps peu conforme, si difficilement aimable ? Et si, finalement, aimer son corps n’était pas le point crucial ? Si l’important était plutôt de le reconnaître comme objet de son incarnation ? C’est par ce corps-là que j’existe, et tel est l’objet de ma re-connaissance.
Bon, me direz-vous, et tous ces stéréotypes, ces discours à plume et à poil qui l’inondent, ce corps ? Discours sociaux et médicaux d’appel à la conformité, jugements à l’emporte-pièce, verbalisations de soignants empêtrés de mots ? Bah, laissons les crapauds baver tandis que la caravane passe.
Nos Rencontres 2012 m’ont rappelé à quel point les discours sur le corps sont insignifiants, à quel point les thérapies purement verbales manquent de corps. Mon corps n’est pas non plus un objet dont il suffirait de contrôler les entrées et les sorties, ou qu’on sculpterait à son gré. Non, mon corps est ma maison, et demande à être habité. Mon corps demande à vivre : telle doit être sa thérapie, et cela, il me semble, a été largement démontré durant cette journée et demi.
Quelle que soit la forme de mon incarnation a prise, son aspect extérieur, quels que soient les sensations, émotions, pensées, agréables ou désagréables qui m’habitent, c’est par ce corps que je suis au monde, que je me frotte aux autres, que je ressens, que je pense, que j’agis, que je m’engage dans des actions qui, à mes yeux, en valent la peine, qui font la richesse de ma vie. La souffrance qui découle de cela, oui, je l’accepte car elle fait corps avec ma vie.
Bon, quoi qu’il en soit, je vais tout de même prendre une ou deux aspirines. Bonne année à tous !
Gérard Apfeldorfer
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