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CITATION Le tour de France de Laurent Fabius à la recherche du "peuple"
LE MONDE | 04.11.03 | 13h44
Le numéro deux du PS publie, jeudi 6 novembre, un ouvrage "personnel" intitulé "Cela commence par une balade", fruit de ses pérégrinations à travers le pays. Il marque une nouvelle étape sur la route de sa candidature à la présidentielle de 2007. Les autres responsables socialistes se préparent aussi.
En route pour 2007. Suivant pas à pas sa stratégie de candidat présumé pour la future élection présidentielle, Laurent Fabius publie, cette fois, un livre "personnel". Cela commence par une balade... - titre de l'ouvrage à paraître chez Plon jeudi 6 novembre - , est une étape supplémentaire dans l'itinéraire qu'a soigneusement balisé l'ancien premier ministre de François Mitterrand. Un objet clairement identifié, une démonstration : celle d'un Fabius partageant, à la table des Français, leurs préoccupations.
" J'ai eu besoin de retourner à la source. Et la source, c'est notre peuple", écrit en introduction l'actuel numéro deux du PS avant de se mettre en scène, sur une moto, à travers des routes de campagne. Les leçons politiques d'un postulant à l'Elysée, pas un programme. "Le temps n'est pas venu pour cela", assure l'auteur. Au préalable, "il faut, précise-t-il, une rencontre, une imprégnation physique, personnelle, avec notre pays et ses habitants". Il lui faut surtout se débarrasser de l'image lisse et froide du socialiste gestionnaire étiqueté social-libéral. Et, de ce côté-ci, l'ancien ministre de l'économie du gouvernement Jospin, n'a jamais caché qu'il y avait "du boulot".
A chacun sa méthode. Au PS, d'autres candidats virtuels se préparent. François Hollande a commencé une tournée "thématique" des régions ; Dominique Strauss-Kahn vient d'inaugurer de nouveaux locaux de campagne boulevard Saint-Germain, à Paris ; et Martine Aubry lance, en collaboration avec le sociologue Michel Wieviorka une nouvelle revue au titre évocateur, Proposer...
La "balade" de M. Fabius prend, elle, la forme d'un tour de France démarré en septembre 2002 et qui s'achève, 242 pages plus loin, en août 2003. Le voici en septembre dans la Meuse avec un producteur de viande biologique, membre de la Confédération paysanne. Arpentant une cité de 500 logements en Seine-Saint-Denis. Visitant, en octobre, en Dordogne, le centre de formation de la gendarmerie et une coopérative de noix. C'est là, dans la petite commune de Castelnaud-la-Chapelle, au contact de "maires ruraux" que lui vient l'idée de rendre le vote obligatoire. En novembre, il rencontre des pêcheurs dans l'Aude, - où il se porte acquéreur à la criée de "3 trois kilos de soles". Puis il se penche sur la justice et l'écologie à Nantes, sur l'éducation dans le Nord-Pas-de-Calais, se préoccupe d'exclusion et des emplois-jeunes à Limoges, échange avec des jeunes à Digne, avec des syndicalistes à Béthune, une famille monoparentale à Pau, des petits patrons à Roanne, et découvre les quartiers Nord à Marseille.
FAN DE "STAR ACADEMY"
Rien n'est oublié. Ni le sport (une étape du Tour de France), ni la musique (le festival de jazz à Marciac), ni la peinture (une exposition de Nicolas de Staël). A chaque fois, les personnages rencontrés, tout comme leur environnement - ici un corps de ferme, là un café, font l'objet d'une description façon reportage.
Dans une sorte de zapping textuel, M. Fabius mêle au fil des mois quelques réflexions tous azimuts, parfois intimes, parfois plus politiques mais toujours très calculées. Il consacre ainsi un chapitre à "la politique du XXIe siècle" et à "l'apparition d'une société du risque". Il y développe "à la lumière de -sa- propre expérience", celle du sang contaminé bien sûr mais qu'il ne mentionne pas, sa conception du principe de précaution et du rôle des politiques de demain. A la page suivante, sans transition, on apprend qu'il aime regarder l'émission Star Academy, cette "sorte de conte de fées moderne", car, écrit-il, "le fameux débat sur l'éloignement des couches populaires ne peut pas être tranché abstraitement (...) entre la Place Beauvau et la rue de Varenne". De la même façon, le thème de l'éducation se trouve curieusement précédé de quelques lignes sur la disgrâce de se trouver... chauve "à 18 ans". Qu'importe : "imagine-t-on Jules César avec une mise en plis ?" Ou "Valéry Giscard d'Estaing avec des rouflaquettes ?"
La sécurité voisine avec des "conversations sur le Maroc", Victor Hugo - l'orateur plus que l'écrivain - avec le kaïros, ce "moment propice" défini par les Grecs, la Gay Pride avec l'Irak.
Rien ou presque, en dehors de quelques sèches formules, sur la politique de Jean-Pierre Raffarin. Le chapitre "Jacques Chirac" comporte en tout et pour tout deux lignes toutes plates : "Injuste de le surestimer. Dangereux de le sous-estimer." Le seul intérêt de cette réflexion tient dans sa date : octobre 2002. A ce moment-là, le président de la République tenait tête aux Etats-Unis dans le conflit irakien, et se déclarait, à Troyes le 14 octobre, en faveur d'un "contrat d'intégration" pour les nouveaux immigrants et la création d'une autorité indépendante pour lutter contre les discriminations.
Mais octobre 2002 correspond surtout à la rumeur, propagée par quelques élus de droite... d'une nouvelle candidature de M. Chirac en 2007. On trouve donc bien, dans le livre de M. Fabius, un fil conducteur : celui qui consiste à présenter de façon mitterrandienne le profil d'un candidat qui "aime la France", "qui a la sensation de la France".
D'ailleurs, M. Fabius n'a rencontré que des Français aimables avec lui. Ayant pris goût, selon son entourage, à ces déplacements, il n'a pas l'intention de s'arrêter là. Dans les prochains jours, on l'annonce dans le Pas-de-Calais, dans le Tarn, en Gironde, puis en décembre dans l'Orne, la Manche et la Charente. Mais aussi, dès vendredi 7 novembre, dans l'émission "On ne peut pas plaire à tout le monde" sur France 3. Pour reprendre la formule de son ami Claude Bartolone, député de Seine-Saint-Denis : "Il n'y a que Fabius qui puisse arrêter Fabius."
Isabelle Mandraud
Cela commence par une balade..., par Laurent Fabius. Plon, 242 pages, 18,50 € .[/quote]
somme économisée : 18€50