Tadeusz Kantor aurait 100 ans

Tadeusz Kantor aurait 100 ans

Message par com_71 » 06 Avr 2015, 20:35

http://institutfrancais.pl/culture/2015 ... sz-kantor/

https://www.youtube.com/watch?v=xSoE8V1ObuE

un sommet : la classe morte https://www.youtube.com/watch?v=-p870MeyJuw

médiapart a écrit :In memoriam Tadeusz Kantor, dynamiteur dévotieux du théâtre

06 avril 2015 | Par Antoine Perraud

Ressouvenir du peintre et metteur en scène polonais Tadeusz Kantor (1915-1990), en ce centième anniversaire de sa naissance. Ses séances dramatiques, entre chemins de croix et spectacles forains, troquaient l'aveuglement collectif de nos vies pour les illusions de l'art total. Dans une radicalité d'écorché irréductible...

Ce 6 avril 2015 marque le centenaire de la naissance d'un génie des arts de la scène, le Polonais Tadeusz Kantor (mort à 75 ans le 8 décembre 1990). Il dut attendre la soixantaine pour être connu et reconnu en France. Nous sommes en 1975, au Festival mondial de théâtre de Nancy, que dirige un personnage appelé à devenir considérable : Jack Lang. Tadeusz Kantor, déjà venu en 1971 présenter La Poule d'eau, offre La Classe morte à la vue et à l'ouïe d'un public médusé. Le choc est difficile à imaginer.

Jouée 1 600 fois sur tous les continents une quinzaine d'années durant, La Classe morte (Umarła klasa) offrait la vision follement ritualisée d'un monde aux noirceurs séraphiques. Se signalait, d'abord et toujours, la présence de Kantor lui-même, démiurge saccadé marquant de ses gestes la scène. Il s'y intronisait l'air de rien avant même le début du spectacle : en septembre 1983, le maître, comme habité de cauchemars, regardait, fût-ce en lui tournant le dos, s'installer le public dans la salle du centre Pompidou à Paris. Kantor s'animait soudain histoire de faire un baise-main mécanique et pourtant aérien à madame Pompidou, pour ensuite retourner dans son coin, marmonner ou rouler des pensées silencieuses, dans un décor encore vide d'acteurs, ces amateurs qu'il dirigeait et congédiait de la main, transformant en partition cette pâte humaine archétypale, elle-même guidée par une musique entêtante.

Marquée par une esthétique du rebut, un bredouillage prophétique, des naufrages légendaires, alliant happening et baraque foraine, La Classe morte créait à la fois hypnose et réflexion collectives, comme si la pièce, cathartique, lavait le public des traumas les plus enfouis nés d'enfances cahotées. Quand s'élevait la Valse François et qu'apparaissait la soldate blafarde brandissant sa baïonnette, comment ne pas chavirer ?

Jean-Pierre Thibaudat, qui tient aujourd'hui (remarquable) blog dans Mediapart, doit à Kantor d'être devenu journaliste : « Nous étions à l'automne 1977. J'avais vu La Classe morte au Théâtre de Chaillot. Mon émoi était si grand que j'attendais le compte-rendu de Libération, dont j'étais un lecteur militant. Ne voyant rien venir, je fulmine auprès d'un pigiste du journal que je croise et qui me pousse à proposer mes services à mon quotidien préféré afin d'y faire passer ma passion. Je me pointe au service culture, qui devait compter quatre personnes au maximum, et là, Rémy Kolpa Kopoul qui n'allait jamais au théâtre, fait de moi sur-le-champ un critique dramatique ! »

Avec Michelle Kokosowski (ancienne directrice artistique du festival de Nancy), Jean-Pierre Thibaudat anime le 13 avril prochain, au théâtre de l'Odéon à Paris, une soirée Tadeusz Kantor. Y sera projetée la captation audiovisuelle de La Classe morte réalisée en 1989 par feu Nat Lilenstein (par ailleurs auteur, en 1983, d'un des plus grands documentaires qui soit : Les Révolutionnaires du yiddishland). Auparavant, les comédiens Marcel Bozonnet, Ariel Garcia-Valdès et Micha Lescot liront des textes de Kantor, traduits par Marie-Thérèse Vido-Rzewuska : après Ma Pauvre Chambre de l'Imagination (Kantor par lui-même), un deuxième volume (sur trois) est publié, ce 13 avril, par Les Solitaires intempestifs, sous le titre Écrits 1 (Du théâtre clandestin au théâtre de la mort).

Se tiennent par ailleurs deux colloques : l'un en Sorbonne (14 et 15 avril), l'autre à l'université de Toulouse II (du 13 au 17 avril). Sans oublier l'exposition proposée jusqu'au 23 avril à la Bibliothèque polonaise de Paris, en attendant de partir à Metz pour le festival Passages en mai, puis à l'hôtel La Mirande d'Avignon, cet été, pendant le festival.

Pour ceux qui passeront par Cracovie, il faut se dépêcher, avant que l'Église ne prenne possession des lieux, d'aller au 5 de la rue Kanonicza, siège du théâtre Cricot 2, où gisent les archives de Kantor (Cricothèque) – voir sous l'onglet “Prolonger”. Aux heures d'ouverture, on y rencontre un ou deux anciens de la troupe, qui font parfois visiter la cave où se tenaient les répétitions. Tout est minuscule : « Le confort tue l'art et Kantor fut grand aussi d'avoir dû se battre pour trouver des salles où se produire », nous confiait cet automne un fidèle comédien rencontré là...

À Cracovie, grâce aux subventions européennes, Tadeusz Kantor a droit à un nouveau musée, ouvert l'an dernier. Il faut traverser l'ancien quartier juif de Kazimierz, passer sur l'autre rive de la Vistule et entrer dans un complexe moderne et labyrinthique débouchant sur l'univers inaltérable du chaman né voilà cent ans, alors que la Galicie habsbourgeoise vivait ici ses derniers mois. Kantor croyait à « la puissance d'action primitive » du théâtre, dont il faisait une cérémonie, un rite, une sorcellerie...
© AP© AP

À Cracovie, un pèlerinage s'impose au cimetière Rakowicki où gît Tadeusz Kantor, sous un bronze adéquat : une sentinelle éternelle de La Classe morte. Poète, peintre, metteur en scène, Kantor considérait le théâtre tel « l'endroit qui dévoile, comme quelques gués secrets à travers les fleuves, les traces des “passagers de l'autre côté” de notre vie »...

L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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com_71
 
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