L'art lyrique

Message par lavana » 30 Juin 2011, 07:53

(Docteur No dans la discussion sur les séries a écrit :Si l'opéra t'intéresse il y a youtube où tu peux trouver Lemeshev peut-être le plus grand tenor lyrique du siècle, Koslovsky qui le suit de près, Shtokolv basse profonde surement le meilleur du siècle, Reisen, bariton qui chantait à 90 ans et magnifiquement l'aire de Prince Gremin du Eugene Oenguine et tant, tant d'autres que j'oublie.


Je rebondis sur cette remarque du Docteur. Récemment dans une émission de radio (la tribune des critiques de disques) des spécialistes (en musique) déploraient le fait que depuis 30 ans, il n'existait plus de basse profonde. Le rôle était souvent tenu par des barytons basses qui n'avaient pas les qualités voulues.

Ils ignoraient les raisons de cette disparition.

J'ai remarqué que sur le forum; il y avait des connaisseurs du sujet. Est-ce que quelqu'un a une explication ?
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Message par Doctor No » 30 Juin 2011, 09:16

Non, j'en ai pas. Mais cela m'intéresse. Si quelqu'un peut apporter je le remercierais du fond du cœur.

Sur youtube on en trouve si on cherche, mais pour moi la plus impressionnante, la plus velouté, la plus populaire, la plus juste, la plus expressive tout en restant "classique" aussi a été la voix de Shtokolov (qu'on peut trouver sur youtube) Soviétique vu que son répertoire était populaire et classique. Il est simplement insurpassable.

Je ne sais pas si on peut parler de Boris Kristoff comme d'une base profonde, Ghiaurov ne l'est pas. Bon ces deux là ne chantent plus d'ailleurs. Plus récents, je ne connais pas des remarquables.
Des anciens, Ezio Pinza, Titta Ruffo sont magnifiques mais "profonds" je ne crois pas.
Chaliappine a été, en "occident" le dernier à mon avis, mais lui ne vaut pas un Shtokolov.

Il faut entendre aussi les baritons soviétiques et il y a à foison (le roumain Hélea aussi)
Reisen, d'autres dont j'oublie leurs noms.

Beaucoup des artistes qui ne pouvaient concurrencer les vrais grands sont passés en occident et on profité de l'ombre jetée sur "l'art stalinien" en fait soviétique. Il y a un monde d'arts de tout ordre à découvrir de l'autre coté du rideau de fer lancé par Churchill.

Hélas il est très inaccessible et il faut batailler pour en avoir des bribes. J'avais trouvé (et perdu) une pinacothèque des peintres soviétiques ( qui m'ont touché bien plus que les carrés de couleur sur fond du même couleur et autres absurdités de l'idéalisme subjectif jetés sur les tableaux); la musique on trouve de plus en plus sur youtube.
Des directeurs d'orchestre Svetlanov ( qu'on s'arrache aujourd'hui après l'avoir snobé parce que soviétique) il y en avait des meilleurs que Karajan (le seul qui trouve vraiment grâce à mes yeux est C.Kleiber, hélas décédé et avare des enregistrements) Gergeiev est un pur produit de cette école et peut-être le plus grand aujourd'hui.

Quant aux concertistes, il y avait aussi un monde de très grands. C'était un souci permanent de donner tous les moyens aux créateurs et au génie. Non seulement l'éducation, mais les spectacles et le public. Un effort incroyable vu les moyens disponibles.

Le ballet peut se trouver sur des sites comme VAI déjà posté etc. C'est, à coté de l'école de danse française (quoique de caractéristiques et d'orientation politique et esthétique différente, cela se voit) la meilleure du monde et il y en avait des corps de ballet partout. J'ai un enregistrement de "Don Quijote" de la ville de Perm! Et il est de première qualité avec Nina Ananiashvili. Et ne parlons pas de la Plisetskaia des Fadeyechev et tant d'autres magnifiques produits d'un art tout tendu vers la satisfaction des gouts des grandes majorités.

Un vrai monde à découvrir. Mais hélas difficile à trouver.

Quant à s'expliquer que les chanteurs d'aujourd'hui courent derrière le star système et le pognon sauf de très rares exceptions, alors cela s'explique...
La basse profonde a un répertoire limité, russe ou proche. Quelle rôle de basse profonde en Verdi, Pucini ou Wagner?. Il y en a pas tout simplement à ma connaissance. Fiesco ...Sparafucile...peut-être, je ne pense pas, quelques notes basses, mais "profond"?

Pourquoi pas des basses profondes. Peut-être que cela ne s’achète pas chez l'apothicaire et que c'est un registre qu'on ne peut que posséder par des qualités propres à la configuration propre des cordes vocales de l'individu? Je n'en sais rien, mais j'aimerais le savoir.
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Message par Jacquemart » 30 Juin 2011, 10:10

Plus de basses profondes ? Je suppose que si je propose Josh Turner, je vais me faire allumer ? :-P
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Message par Doctor No » 30 Juin 2011, 10:52

(Jacquemart @ jeudi 30 juin 2011 à 11:10 a écrit : Plus de basses profondes ? Je suppose que si je propose Josh Turner, je vais me faire allumer ?  :-P

Bella voce de basse mais lavana parlait "d'art lyrique".

Wikipedia parle de Kurt Moll, Marti Talvela et de Otto Edelman pour ce que j'ai entendu. Moll peut-être, Edelman et Tavela pas, à mon modeste avis. Peut-être ils ont chanté des roles "profonds" mais je vois une différence nette entre ces voix (Moll à part pour sa capacité à toucher des notes basses) et celle de Schtokolov.

Il dit que les rôles de Hagen et de Fafner sont "profonds"...peut-être, mais je les entendu chantés basso tout court.

Quant à Sarastro et Osmin de Mozart, alors là je suis bien plus d'accord, Sarastro surtout. C'est une question de nuances vu que "profonde" veut dire aller aux notes le plus basses du répertoire. Mais aussi, à mon avis, le faire "naturellement", sans efforts presque, par disposition naturelle (et travail, sans cela il n'y a rien) de la voix.

Pur avis d'amateur d'ailleurs. Cela me plait, mais je n'ai jamais étudié musique.
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Message par lavana » 30 Juin 2011, 11:45

Pour préciser mon propos.

J'ai parlé de basses profondes et il s'agissait de basses italiennes. Je ne sais pas s'il faut intégrer les basses du répertoire russe dans la déploration de l'absence actuelle. Mais j'ai supposé que si les basses italiennes n'existaient plus, les basses profondes non plus et j'ai peut-être fait erreur.

J'ai retranscrit les passages de l'émission où le sujet n'était évoqué qu'en passant.

Emission consacré à l'écoute de 6 versions des Vêpres siciliennes.

a écrit :
- "La voix est trop claire pour le rôle à mon avis. On entend quelqu'un qui essaye de s'inventer un poids qu'il n'a pas. La couleur est belle mais c'est écrit pour une grande basse d'école française type Marcel des Huguenots. On entend plutôt un baryton basse qui essaye de jouer à la grande basse profonde (…)"

- "La race des grandes basses italiennes est  finie, morte et il n'y en a plus depuis, il n'y en a jamais eu depuis.
Le dernier était Cesare Siepi qui est mort récemment. Dernier héritier de cette haute lignée. Ce chanteur (il parle de Ruggero Raimondi en 1973) là n'est ni baryton, ni basse."


A propos d'un autre chanteur après l'avoir critiqué.  ( Il respire mal, il respire partout, il fait de grands effets de manche. La voix est splendide mais le style n'y est pas...)

- "Aujourd'hui, avec toutes ses limites on lui ferait un pont d'or parce qu'on a même pas ça dans ce répertoire-là, je ne parle pas de Procida  des Vêpres siciliennes mais si on a aujourd'hui dans le monde un Philippe 2 ou un Ramfis un Padre Gardione de cette taille-là et bien j'aimerais bien savoir où il se trouve et pourtant ce n'était déjà plus ça à l'époque."

- "Et pourquoi alors ?"

- "Je ne sais pas grande question métaphysique"

- "Les profs de chants existent toujours, les écoles de chant existent toujours, les belles voix existent toujours" (…)

- "Où sont passés les basses italiennes ? Je n'en sais rien."


(Il s'agit de Boris Christoff en 1950)
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Message par Doctor No » 30 Juin 2011, 12:16

Je n'en sais rien, mais en fait depuis pas mal de temps on entend cette chanson.

Que les artistes, que les écoles, que l'enseignement ne fait que préparer des ténors, baritons, sopranos etc. pour le star système en mettant de coté toute technique véritable, tout précaution dans l'emploi de la voix pour des rôles difficiles ou "dangereux, toute progression des rôles, etc.

Alfredo Krauss ténor lyrique espagnol de grande qualité qui a mené une carrière très longue grâce à sa technique et au soin qu'il a pris pour chanter toujours le même répertoire, en faisait son cheval de bataille contre les stars Pavarotti, Carreras, Domingo (pas ouvertement).

Le polémique entre ténors "populaires" et ténors "raffinés" elle est vieille, déjà du temps de Caruso et De Retzke.
C'est devenu une opinion généralisée, juste à mon avis, voire les déboires de Rolando Villazon qui avec une belle voix (qui nécessitait travail et patience) l'a cassé en quelques années pour chanter tout et trop souvent.

Jonas Kaufman, le meilleure que j'ai entendu ce dernier temps, semble souffrir un peu malgré du soin qu'il met justement à ne pas se trouver sans voix.

Les basses italiennes, leurs rôles peuvent être chantés par des bases tout court et des fois on entend même des barytons-basses à la place.

C'est un art très difficile qui nécessite beaucoup de travail, une technique impeccable (que les grincheux disent qu'on n'enseigne plus) et avancer petit à petit pour attaquer des rôles chaque fois plus "lourds" selon l’empattement (ou vieillissement, perte de la fraicheur, de l'agilité etc. de la voix).

Des basses il y en aura, le chant à horreur du vide; autrement je te suggère d'aller sur youtube et écouter Ezio Pinza, Titta Ruffo surtout, pour des italiens de plus grands.

Et bien sur Schtokolov que l'on devrait montrer dans les écoles. A coté de Paul Robeson baryton basse étasunien, communiste et (pire pour certains) stalinen. Mais une grand voix et un grand camarade.
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Message par lavana » 30 Juin 2011, 12:44

A propos de Villazon, on lisait dans la presse qu'il s'est abimé la voix à vouloir suivre l'exemple de Domingo qui serait le seul capable de chanter partout et tout le temps en conservant la santé (pour faire vite).

C'est vrai que le système a usé jusqu'à la corde (?) des tas de chanteurs. On citait récemment le cas de Cheryl Studer dans les années 90 qui a été victime de ce procédé.

Je vais essayer de voir un peu tout ça.

Sinon cette remarque des commentateurs ne serait qu'une fausse polémique de grincheux ?
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Message par Doctor No » 30 Juin 2011, 13:52

(lavana @ jeudi 30 juin 2011 à 13:44 a écrit : A propos de Villazon, on lisait dans la presse qu'il s'est abimé la voix à vouloir suivre l'exemple de Domingo qui serait le seul capable de chanter partout et tout le temps en conservant la santé (pour faire vite).

C'est vrai que le système a usé jusqu'à la corde (?) des tas de chanteurs. On citait récemment le cas de Cheryl Studer dans les années 90 qui a été victime de ce procédé.

Je vais essayer de voir un peu tout ça.

Sinon cette remarque des commentateurs ne serait qu'une fausse polémique de grincheux ?
J'aimais bien Villazon, sa manière simple d'être. Sa voix est autre chose, beaucoup des possibilités mais il manquait, à mon avis, du temps. Il aurait dû choisir soigneusement ses rôles, se ménager, continuer à étudier la technique. Il ne l'a pas fait, ce qui a été courageux même téméraire de sa part.

C'est comme un coureurs léger qui se met à faire du décathlon. C'est intéressant d'entendre A.Krauss parler du sujet dans quelques classes magistrales sur youtube.D'ailleurs pour ce qui s'intéressent c'est un aperçu intéressant. Voir aussi la Zeanni qui est la plus grande soprano de la II eme moitié du siècle XX (je connais mal les soviétiques) qui faisait des classes avec son mari le baryton italien Lemeni- Rossi.

Domingo est un super doté de la voix. Beaucoup des gens avaient prédit (d'ailleurs dans l’ancêtre de l'émission que tu écoutes) qu'il casserait sa voix quand il s'est mis à chanter l'Otelo de Verdi qui est un rôle "lourd" "Essultate!, l'orggoglio etc...". Mais lui rigolait. On le pensait pour des rôles Puciniens, Wagneriéns, mais pas trop Verdiens. Pourtant il avait chanté presque dès le début Radamnés. Depuis il a tout chanté (avec un bonheur inégal à mon modeste avis) et il se porte comme un charme à ses pas trop loin de 70 ans. Un miracle de la nature.

Je ne pense pas que ce soit des grincheux, ces gens connaissent beaucoup des choses et j'ai pas mal appris d'eux. Le public et encore plus la critique de l'opéra est d'un très bon niveau à mon modeste avis, les gens savent et apprécient à juste titre.

Il faut voir comment ils applaudissent et quand. Rarement ils se trompent et quand s'est vraiment bon (un critique chilien disait "l'opéra est sublime ou affreuse" et cela m'est resté) , alors la ils cassent la baraque sous les acclamations et les applaudissements.

De même les critiques sont assez justes, sauf quand il s'agit, pour certaines, de brosser dans le sens du poil (ergo, quand elles s'adressent "au large public"...à tort, vu que le large public a aussi des oreilles justes)

Cette émission est intéressante, je l'entends quand je peux (cela fait un moment que non, pas le temps) et on en apprends beaucoup.
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Message par lavana » 30 Juin 2011, 17:16

(Jacquemart @ jeudi 30 juin 2011 à 11:10 a écrit : Plus de basses profondes ? Je suppose que si je propose Josh Turner, je vais me faire allumer ? :-P
Personnellement je suis incapable de savoir de quelle genre de basse il s'agit.

La distinction, comme souvent, dans le lyrique est délicate. Certains se refusent à affronter certains rôles. Je pense par exemple à Garança qui est une mezzo-soprano très courue en ce moment et qui ne veut pas être soprano alors qu'elle pourrait le faire...dit-on.

C'est une gestion de carrière qui regarde chacun.

( Docteur No a écrit :C'est intéressant d'entendre A.Krauss parler du sujet dans quelques classes magistrales sur youtube.D'ailleurs pour ce qui s'intéressent c'est un aperçu intéressant.

je suppose que c'est en espagnol ???


( Docteur No a écrit :Je ne pense pas que ce soit des grincheux, ces gens connaissent beaucoup des choses et j'ai pas mal appris d'eux. Le public et encore plus la critique de l'opéra est d'un très bon niveau à mon modeste avis, les gens savent et apprécient à juste titre.


C'est ce qui me semblait aussi. Donc une question à creuser.

A propos de l'émission reprise depuis 3 ans, elle va changer de formule à la rentrée.

Mais c'est vrai que c'est à suivre pour la qualité des intervenants. Il y a bien sûr des considérations techniques de musicologues qui m'échappent pas mal mais ça reste accessible. Et elle est podcastable comme on dit. Donc on peut l'écouter à temps perdu.
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Message par Doctor No » 30 Juin 2011, 17:57

a écrit :QUOTE ( Docteur No)
C'est intéressant d'entendre A.Krauss parler du sujet dans quelques classes magistrales sur youtube.D'ailleurs pour ce qui s'intéressent c'est un aperçu intéressant.

je suppose que c'est en espagnol ???

Je crois, mais il y a des master classes de lui en italien. Il y a un tas par différents interprètes. Schartzkopf, Domingo, Berganza et d'autres. Ainsi que des "conférences" de L.Bernstein . Une sur Beethoven, très bonne (en allemand traduite au français)
En tout cas, sur youtube, on lit souvent des commentaires sur des performances, quelques uns très bien.

J'ai entendu Garança, c'est le type même des stars du moment. Ce n'est pas une critique mais voila je préfère la Berganza ou la Simionatto, la Bambry, la Baltza, la Von Stade qui chantaient 20 ans en arrière grosso modo, sauf la dernière.

Dans les années 80 il y avait sur cette émission un critique qui j'aimais bien, Jacques Bourgeois (mort depuis je crois) qui savait des tonnes et qui regrettait la disparition (à l'époque) du chant français.
GeorgesThill et Ninon Vallin (pour nommer ce que j’apprécie) qu'il disait "étaient d'une une école magnifique (Thill est peut-être un de plus grands ténors du siècle, quoique élève de De Lucia) élégante, raffinée avec toute la grâce française". J'étais assez d'accord avec ça et quant à la différence nationale des styles de chant. Le chant italien n'est pas le même que le français, et l'allemand du russe, etc. Et le chant français bien chanté est vraiment particulièrement fin, élégant, gracieux.
Doctor No
 
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