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Message Publié : 23 Jan 2009, 16:38
par artza
Négociant toulousain protestant Calas fut accusé d'avoir tué son fils pour l'empêcher de se convertir au catholicisme.

Torturé, condamné à mort après un procès truqué, Calas fut démembré et brûlé vif.

C'était au XVIIIème siècle. Les protestants étaient persécutés en France et pendant encore longtemps ils furent victimes de préjugés.

C'est bien oublié aujourd'hui, sauf dans les familles protestantes.

Convaincu de l'innocence de Calas et de l'iniquité de la Justice, Voltaire mena une courageuse campagne pour la réhabilitation de Calas et contre l'intolérance et l'obscurantisme catholique en signant une de ses oeuvres majeures, Traité de l'intolérance et dressa l'opinion publique contre la justice royale.
La Justice dut se déjuger. Calas fut réhabilité en 1765. 24 ans avant la prise de La Bastille. Mine de rien, la révolution était en marche.

Arte présente ce soir un téléfilm sur cette affaire et l'action de Voltaire.

Message Publié : 23 Jan 2009, 19:07
par Wapi
Le bouquin de voltaire, c'est le traité sur la tolérance, pas de l'intolérance ! ;)

C'est effectivement du meilleur Voltaire. C'est bien mieux que quand il s'acharne contre Jean-Jacques.

Message Publié : 23 Jan 2009, 20:54
par Cyrano
Ne pas oublier une "Caméra explore le temps" d'auguste mémoire. "L'affaire Calas" de Stellio Lorenzi, en 1963, avec Pierre Asso (vieux briscard coco) jouant magnifiquement Voltaire. Et ça durait plus de deux heures, et en direct... Ça reste encore très regardable.

Message Publié : 24 Jan 2009, 09:03
par artza
Je n'ai pas vu l'émission de Lorenzi en 63.
Je n'avais la télé à l'époque et je méprisais beaucoup ceux qui passaient une soirée devant cet outil de la propagande gaulliste.

J'ai enregistré le téléfilm proposé hier soir et je l'ai regardé dès mon retour.

C'est pas mal, faire parler les souvenirs de la petite fille de Corneille pupille de Voltaire n'est pas une mauvaise idée.

Voltaire est bien montré, son égoïsme, son autoritarisme, son sens des affaires aussi.
Un sens qu'il partageait avec Beaumarchais mais pas avec son ennemi Rousseau.

Justice et police n'ont pas tellement changé finalement!

On a fréquemment des exemples.

Par contre les "intellectuels" c'est plus ce que c'était.

Message Publié : 24 Jan 2009, 10:43
par Wapi
Le téléfilm était très bien, malgré quelques imprécisions, mais ce n'est pas grave du tout. Claude Riche joue vraiment un rôle fait pour lui, et Voltaire n'est en fait montré que par ses bons côtés. Le piège dans lequel est tombé le réalisateur est de montrer que sa haine de Rousseau n'est qu'apparente, qu'il n'est question que de l'un qui ferait de l'ombre à l'autre ... vieille mythologie bourgeoise qui voudrait bien réconcilier ses deux figures tutélaires contre leur grès.

Du coup je me demandais quelles étaient les interventions notables d'intellectuels en France pour s'élever contre les abus du pouvoir ... Voltaire, Zola, et un peu Sartre au moment de la guerre d'Algérie ... mais je ne vois rien d'autre. A peine un par siècle, ça ne fait pas lourd quand même.

Message Publié : 24 Jan 2009, 12:12
par clavez
mais BHL ne fait que ça....

Message Publié : 24 Jan 2009, 15:23
par Vérié
(Wapi @ samedi 24 janvier 2009 à 10:43 a écrit : Du coup je me demandais quelles étaient les interventions notables d'intellectuels en France pour s'élever contre les abus du pouvoir ... Voltaire, Zola, et un peu Sartre au moment de la guerre d'Algérie ... mais je ne vois rien d'autre. A peine un par siècle, ça ne fait pas lourd quand même.

A mon avis, le problème est mal posé de cette façon.

Ce qu'il conviendrait d'examiner, c'est le système de médiatisation des intellectuels. Comment un intellectuel parmi beaucoup d'autres devient-il suffisamment médiatique pour avoir la parole dans une société donnée ?

Aujourd'hui, à côté de BHL, Finkielkraut et cie, nous avons des intellectuels brillants qui prennent des positions... disons plus sympathiques. Exemple : Esther Benbassa (qui est quelque chose à l'école des hautes études), qui a dénoncé le carnage de Gaza, qui dénonce l'intrumentalisation du génocide de la seconde guerre mondiale et de l'antisémitisme. Elle a droit à des tribunes dans lLe MOnde et Libération, mais elle n'est évidemment pas aussi médiatique que BHL.

Alors, pourquoi BHL est-il plus médiatique que Benbassa ou Gilles Perrault (à qui on ne donne plus souvent la parole depuis qu'il a appelé à la désertion pendant la première guerre du Golfe.) Pour commencer, BHL est immensèment riche, ce qui lui a apporté la gloire médiatique plus sûrement que son intellect. IL a pu, entre autres, financer la revue Tel Quel et des intellos comme Sollers, qui lui ont renvoyé l'ascenseur.

Déjà, à l'époque de Zola, les écrivains et intellos médiatiques étaient ceux qui, non seulement avaient du talent, mais savaient bien faire leur pub. Zola qui, entre parenthèses était une sombre canaille (1), en dépit de sa célèbre défense de Dreyfus, était particulièrement doué pour sa pub.

Alors, il faudrait se demander comment Voltaire ou Rousseau on atteint la célébrité en leur temps. Par quels processus ? Je ne connais pas assez bien l'ancien régime pour répondre, mais il est permis de penser qu'ils étaient portés par la bourgeoisie montante dans son opposition à la monarchie, donc par un puissant courant social. Quelqu'un pourra peut-ëtre apporter des précisions.

Aujourd'hui, il n'existe pas de puissant courant social "révolutionnaire" ou même "gauchisant". Il est donc logique que les intellectuels proches de ces idées soient rélégués à un rang médiatique mineur. De plus, la bourgeoisie a tous les moyens pour médiatiser ceux qui la servent. Du temps où le PCF était puissant, ses intellos et compagnons de route étaient évidemment beaucoup plus médiatiques : Aragon, Vaillant et même le médiocre André Stil.

Ce ne sont donc pas les intellectuels qui ont changé. La plupart d'entre eux continuent à préférer défendre les valeurs des courants sociaux dominants, ou du moins influents. Mais c'est la façon de les médiatiser qui a sans doute évolué, même si, en apparence, notre société leur laisse davantage de libertés que l'ancien régime...



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1) Lire Les écrivains contre la Commune et Zola l'imposteur.

Message Publié : 24 Jan 2009, 17:30
par Matrok
(Wapi @ samedi 24 janvier 2009 à 09:43 a écrit :Du coup je me demandais quelles étaient les interventions notables d'intellectuels en France pour s'élever contre les abus du pouvoir ... Voltaire, Zola, et un peu Sartre au moment de la guerre d'Algérie ... mais je ne vois rien d'autre.

Ajoutons Victor Hugo contre la peine de mort, pas mal de poètes (Seghers, Eluard, Aragon...) aux côtés de la résistance pendant l'occupation, Simone de Beauvoir pour l'IVG...

Message Publié : 24 Jan 2009, 19:00
par Wapi
Bon, pour Hugo, tu as sans doute raison pour sa réquisition contre la guillotine, quoi que je ne sais pas s'il n'a pas critiqué les communards pour leurs "fusillades"; et c'est également vrai que Simone de Beauvoir s'est elle aussi courageusement exposée pour la défense du droit des femmes à disposer de leur corps. Mais les poètes staliniens et patriotes qui ont rangé les ouvriers résistants derrière les dirigeants gaullistes ce n'étaient pas des intellectuels toujours plus ou moins bourgeois engagés contre l'injustice, mais bien des "ingénieurs des âmes" conformément à ce que Staline voulait qu'ils fussent, de vraies sombres crapules en fait (en tous cas Eluard et Aragon).

Message Publié : 24 Jan 2009, 19:16
par Matrok
(Wapi @ samedi 24 janvier 2009 à 18:00 a écrit : ...les poètes staliniens et patriotes... de vraies sombres crapules en fait (en tous cas Eluard et Aragon).

Je vois que tu as le sens de la nuance ! :altharion: En bref il fallait être trotskyste, ou se taire ?!
À part ça, comme "sombre crapule", Voltaire en était une. Lui qui luttait contre les superstitions à Paris, avait installé une église avec des reliques dans son domaine de Ferney. En voila une crapule !