Je recommande aux nombreux érudits qui fréquentent ce forum l’ouvrage suivant : « Les racines sociales et économiques des Principia de Newton » de Boris Hessen édité chez Vuibert (30 euros pour 240 pages).
Boris Hessen (1893-1936) était un physicien et bolchevik russe (après octobre 1917 il fut soldat de l’Armée rouge et secrétaire du soviet de sa ville natale) membre de la délégation soviétique au deuxième congrès international des sciences et des techniques qui se tint à Londres en 1931. Le livre contient une introduction du traducteur, le texte de la contribution de Hessen à ce congrès et une postface. Il s’agit d’après le traducteur de la première traduction française.
On ne présente plus Newton (1642-1727), auteur de la loi de gravitation universelle (vous savez bien : le coup de la pomme qui vous tombe sur la tête pendant votre sieste sous un pommier) et d’une multitude d’autres lois de la physique. Il fut aussi l’un des inventeurs du calcul différentiel nécessaire à l’établissement de ses résultats en physique (polémique célèbre avec Leibniz (1646-1716) quant à la paternité).
Les Principia dont le titre complet est : « Les principes mathématiques de la philosophie naturelle » ( au XVII ième siècle la philosophie naturelle désigne la science) , publié en 1687, est le livre majeur de Newton dans lequel il expose, parmi d’autres choses, la fameuse loi d’attraction : deux corps possédant une masse s’attire proportionnellement à l’inverse du carré de leur distance mutuelle. Cette loi déduite par Newton des lois de Kepler rend compte, entre autres, des mouvements planétaires (sous certaines approximations toutefois).
L’un des intérêts du texte de Boris Hessen et ce pour quoi j’en parle sur le FALO repose, comme son titre l’indique, sur la volonté de l’auteur de rendre compte en historien matérialiste du travail scientifique d’Isaac Newton en le situant dans son contexte socio-économique et très précisément en liant les lois de Newton aux besoins techniques qu’entraînait le développement du capitalisme pendant le XVII ième siècle. Certains trouveront probablement l’argumentation de BH réductrice, néanmoins l’histoire des sciences comptant peu de matérialistes militants ce livre me semble aussi rare que précieux. Il convient de préciser que le texte de B.Hessen n’est pas une présentation du contenu des « Principia » dont la lecture, je devrais dire l’étude, est pour le moins ardue.
L’introduction et la postface, également utiles, s’attachent à expliciter l’exposé de BH et ses multiples enjeux qu’ils soient scientifiques ou bien politiques. Hessen sera l’une des nombreuses victimes de la bureaucratie stalinienne, il sera accusé « d’activités contre-révolutionnaires trotskystes-zinoviévistes » et passé par les armes.
Je clos en mettant en garde contre :
1) le sous-titre stupidement racoleur de la première de couverture : « Une rencontre entre Newton et Marx à Londres en 1931 ».
2) ma première phrase qui semble exclure les non-érudits. Or il n’en est rien puisque j’ai lu le livre !