Ma vie d'esclave

[Valiere]

« Ma vie d’esclave »
récit
de Mende Nazer
avec Damien Lewis
éditions l’Archipel
Mars 2005
19, 95 €
355 pages

VOYAGE DE L’ESCLAVAGE A LA LIBERTE


Cet ouvrage se lit comme un roman, mais ce n’est pas un roman...Il s’agit du récit de la vie adolescente de Mende.
Cela se passe, il y a peu de temps au milieu des années 90 et au début du troisième millénaire, au Soudan et en Grande Bretagne.
Les bouches commencent à s’ouvrir, quelques scandales ont été dénoncés, des condamnations ont été prononcées contre les « maîtres » souvent cadres d’ambassades qui avaient ou ont à leur service des esclaves.
Mende était l’une de ces esclaves. Enlevée par des brigands à 12 ans, violée puis livrée à une famille de nantis pour devenir sa « chose », « l’abib », elle a été martyrisée, frappée, humiliée et ceci pendant sept ans.
En toile de fond de cette histoire véridique, l’auteure nous évoque cette société multi raciale, où règne le racisme entre populations de différentes origines.
Le pouvoir en place n’est pas lavé de tout soupçon, loin de là, des militaires collaborent officiellement ou officieusement à l’enlèvement de Mende à sa famille.
L’auteure se transforme en actrice sociologue dans ce livre quand elle nous raconte son enfance dans sa tribu des Nubas, la vie dure, l’environnement religieux et les « coutumes »dictées par la charia qui conduisent ses parents à la faire exciser... mais aussi la solidarité qui existe entre les habitants de ce village et les autres... Jusqu’au moment où surgissent ces brigands qui en pleine nuit massacrent les adultes et capturent les enfants, voués à l’esclavage.
Durant tout le livre, Mende nous raconte ses souffrances, son isolement et ses questionnements comme celui-ci :
« Je repensai aux leçons de Coran que j’avais suivies à l’école. Le Coran disait que tous les musulmans doivent se respecter les uns les autres. Qu’il n’y a aucune différence entre les Blancs et les Noirs, que tous les êtres sont égaux. Il disait que les seules différences entre les êtres humains se situent dans leurs actes, qu’on les juge à leur attitude altruiste et pieuse et à leur respect envers Dieu »
Mais voilà : Entre les textes et les actes, il y a des écarts énormes...Ses geôliers étaient comme elle, musulmans mais formaient une caste dirigeante, raciste et intégriste.
D’ailleurs elle ne confond pas la religion, celle qu’elle garde et ceux qui détenant le pouvoir lui ont volé son enfance.

Le Soudan comme beaucoup d’autres pays a ratifié la Convention Internationale des Droits de l’Enfant tout en couvrant de fait les agissements de celles et de ceux qui poursuivent la traite d’esclaves( !?)
Ce livre, poignant et passionnant est un témoignage que l’on ne peut oublier.

Valière