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Message Publié : 28 Avr 2005, 20:41
par Crockette
THE TAKE : doc d'avi Lewis et Naomi Klein, 1h27. Sortie le 27 avril 2005.

A la veille de l'effondrement économique en Argentine, trente ouvriers au chomage avaient pris en main leur usine abandonnée par leur patron.
En 2004, Nestor Kirchner (centre gauche) affronte Carlos Menem (droite libérale) et les ouvriers continuent à se battre pour garder leur coopérative.

En 1989, Carlos Menem met en place une politique libérale ultra : privatisations, fermetures d'entreprises, plans de licenciements, corruption, triplement du taux de chomage...le FMI et la Banque mondiale continuent, sans faillir, de soutenir cette politique.
En 2001, 55% de la population est touchée par la misère. Et c'est à cette époque que 15 000 emplois seront sauvés par des ouvriers récupérant leur entreprise.

Occuper, résister, produire sont les trois mots clefs de la démarche intéressant les co-réalisateurs, dont c'est le premier film.

Naomi Klein est économiste et a écrit "No LOGO" (editions acte sud).

Lors du tournage ils ont demandé à une ouvrière pour qui elle allait voter, elle s'est contentée de montrer alors un graffiti qui disait : "nos rêves n'ont pas de place dans vos bulletins de vote".

Message Publié : 08 Mai 2005, 10:28
par gipsy
Je viens de voir The Take et ca donne du baume au coeur. :D
Un film qui montre que les travailleurs ne sont pas des incapables et qu'ils peuvent au contraire organiser la société, même si ca reste dans ce film du domaine de la coopérative. Bref pas besoin de patron dans cette société.

Les limites de la coopérative sont présentes dans le film: problème judiciaire, intervention de l'Etat et de la police au service du patronat.

Y'a bien un amalgame genre, cette fois ce n'est ni comme en russie ni comme à cuba, c'est une expropriation qui vient d'en bas et qui n'est pas dirigé par des buros. Et la note finale reste quand même que la coopérative reste possible.

Malgré cela c'est un trè bon documentaire. :wub:
A voir et à faire voir et à discuter sans modération.

Message Publié : 08 Mai 2005, 17:27
par françois marcel
Bon, je l'ai trouvé intéressant, car il montre des ouvriers qui se rendent compte qu'ils peuvent faire mieux (au niveau salaire, temps de travail...) que le patron qui dirigeait l'usine avant eux. Seulement, on reste dans le même système, l'économie de marché, et dans le film, on remarque très vite que l'enjeu est : trouver des clients pour avoir de quoi produire. Lorsque la coopérative obtient un marché (une autre coopérative leur demande de produire des pièces), on voit alors le porte-parole (président) de la coopérative dire "on travaillera nuit et jour, samedi et dimanche s'il le faut".
J'avais vu il y a quelques mois un reportage sur Arte qui parlait des ouvrières de chez Bruckmann. Dans ce reportage, on voyait bien le cheminement politique des ouvrières, et aussi comment les quartiers avoisinants l'usine s'étaient organisés pour défendre celles-ci contre l'intervention policière. Tout cela montrait les liens tissés dans l'usine et hors de l'usine. Je trouve que "the Take" est assez pauvre à ce niveau-là.
The Take a une grande qualité : montrer la manipulation des tenants du jeu électoral : les bourgeois. comment ils achètent les voix des électeurs, etc...
C'est quand même un film qui donne la pêche !

Message Publié : 08 Mai 2005, 23:33
par gipsy
(françois marcel @ dimanche 8 mai 2005 à 18:27 a écrit : Bon, je l'ai trouvé intéressant, car il montre des ouvriers qui se rendent compte qu'ils peuvent faire mieux (au niveau salaire, temps de travail...) que le patron qui dirigeait l'usine avant eux. Seulement, on reste dans le même système, l'économie de marché, et dans le film, on remarque très vite que l'enjeu est : trouver des clients pour avoir de quoi produire. Lorsque la coopérative obtient un marché (une autre coopérative leur demande de produire des pièces), on voit alors le porte-parole (président) de la coopérative dire "on travaillera nuit et jour, samedi et dimanche s'il le faut".
J'avais vu il y a quelques mois un reportage sur Arte qui parlait des ouvrières de chez Bruckmann. Dans ce reportage, on voyait bien le cheminement politique des ouvrières, et aussi comment les quartiers avoisinants l'usine s'étaient organisés pour défendre celles-ci contre l'intervention policière. Tout cela montrait les liens tissés dans l'usine et hors de l'usine. Je trouve que "the Take" est assez pauvre à ce niveau-là.
The Take a une grande qualité : montrer la manipulation des tenants du jeu électoral : les bourgeois. comment ils achètent les voix des électeurs, etc...
C'est quand même un film qui donne la pêche !
D'accord avec toi, le film n'aborde le problème que du point de vue économique , càd la reprise de l'usine mais nul part part on ne voit le chemnienement plitique des ouvriers et ouvrières.

Message Publié : 12 Mai 2005, 21:18
par gipsy
Rosa Luxembourg dans "réformes sociales ou révolution" sur la coopérative ouvrière.


a écrit :]2. Les syndicats, les coopératives et la démocratie politique

Le socialisme de Bernstein tend, nous l’avons vu, à faire participer les ouvriers à la richesse sociale, à transformer les pauvres en riches. Par quelle voie y parviendra-t-on ? Dans ses articles parus dans la Neue Zeit et intitulés : " Problèmes du socialisme " il n’y faisait que de très vagues allusions. Dans son livre, en revanche, il nous donne sur cette question toutes les précisions désirables. Son socialisme dit être réalisé par deux moyens : par les syndicats ou, comme il dit, par la démocratie économique et par les coopératives. Grâce aux premiers il veut supprimer le profit industriel, par les secondes le profit commercial.

Les coopératives, et d’abord les coopératives de production sont des institutions de nature hybride au sein de l’économie capitaliste : elles constituent une production socialisée en miniature, qui s’accompagne d’un échange capitaliste. Mais dans l’économie capitaliste l’échange domine la production ; à cause de la concurrence il exige, pour que puisse vivre l’entreprise, une exploitation impitoyable de la force de travail, c’est-à-dire la domination complète du processus de production par les intérêts capitalistes. Pratiquement, cela se traduit par la nécessité d’intensifier le travail, d’en raccourcir ou d’en prolonger la durée selon la conjoncture, d’embaucher ou de licencier la force de travail selon les besoins du marché, en un mot de pratiquer toutes méthodes bien connues qui permettent à une entreprise capitaliste de soutenir la concurrence des autres entreprises. D’où, pour la coopérative de production, la nécessité, contradictoire pour les ouvriers, de se gouverner eux-mêmes avec toute l’autorité absolue nécessaire et de jouer vis-à-vis d’eux-mêmes le rôle d’entrepreneurs capitalistes. De cette contradiction la coopérative de production meurt, en ce sens qu’elle redevient une entreprise capitaliste ou bien, au cas où les intérêts des ouvriers sont les plus forts, qu’elle se dissout. Tels sont les faits. Bernstein les constate lui-même, mais visiblement sans les comprendre, puisqu’il voit après Mme Potter-Webb dans le manque de " discipline " la cause de l’échec des coopératives de production en Angleterre. Ce qui reçoit ici la qualification superficielle et plate de " discipline " n’est autre chose que le régime absolu qui est naturel au capital et que les ouvriers ne peuvent évidemment pas employer contre eux-mêmes [1].

D’où il résulte que la coopérative ne peut assurer son existence au sein de l’économie capitaliste qu’en supprimant, par un détour, la contradiction qu’elle recèle entre le mode de production et le mode d’échange, en se soustrayant artificiellement aux lois de la libre concurrence. Elle ne peut le faire qu’en s’assurant par avance un marché, un cercle constant de consommateurs, la coopérative de consommation lui en fournit le moyen. Voilà la raison - c’est Bernstein qui nous le révèle - de la faillite des coopératives de production autonomes, dont l’existence ne peut être assurée que par une coopérative de consommation ; cela n’a rien à voir avec la distinction entre les coopératives d’achat et de vente inventées par Oppenheimer.

On constate donc que l’existence des coopératives de production est liée actuellement à l’existence des coopératives de consommation ; il en résulte que les coopératives de production doivent se contenter, dans le meilleur des cas, de petits débouchés locaux et qu’elles se limitent à quelques produits de première nécessité, de préférence aux produits alimentaires. Toutes les branches les plus importantes de la production capitaliste : l’industrie textile, minière, métallurgique, pétrolifère, ainsi que l’industrie de construction de machines, des locomotives et des navires sont exclues d’avance de la coopérative de consommation et, par conséquent, des coopératives de production. C’est pourquoi, même en faisant abstraction de leur caractère hybride, les coopératives de production ne peuvent jouer le rôle d’une réforme sociale générale, pour cette raison que la réalisation générale implique d’abord la suppression du marché mondial et le morcellement de l’économie mondiale actuelle en petits groupes de production et d’échange locaux : il s’agirait, en somme, d’un retour de l’économie du grand capitalisme à l’économie marchande du Moyen-âge.

Mais, même dans les limites de la réalisation possible, dans la société actuelle les coopératives de production jouent le rôle de simples annexes des coopératives de consommation ; celles-ci sont donc au premier plan et apparaissent comme la base principale de la réforme socialiste projetée. De ce fait, la réforme socialiste basée sur le système des coopératives abandonne la lutte contre le capital de production c’est-à-dire contre la branche maîtresse de l’économie capitaliste et se contente de diriger ses coups contre un capital commercial et plus exactement le petit et le moyen capital commercial ; elle ne s’attaque plus qu’aux branches secondaires du tronc capitaliste.

Quant aux syndicats qui, dans la doctrine de Bernstein, sont un autre moyen de lutter contre l’exploitation du capital de production, nous avons déjà montré qu’ils sont incapables d’imposer l’influence de la classe ouvrière sur le processus de production, pas plus en ce qui concerne les dimensions de la production que ses procédés techniques.

Message Publié : 20 Mai 2005, 16:06
par eruditrotsk
A propos du cheminemenent "des ouvrières de Brukman", je crois qu'il ne faut pas pousser trop le bouchon. Si on parle bien du même documentaire (allemand je crois), avec cette scène ridicule d'une troupe de théâtre gauchiste allant mimer aux ouvrières de Brukman... leur lutte, on parle surtout du cheminement d'une ouvrière qui lit désormais Trotsky dans les transports en venant au boulot. Et, entre nous, si vous connaissiez le livre qu'elle lit (un pavé absolument monstrueux publié par un des groupes les plus intellos existant sur le marché trotskyste argentin), vous vous demanderiez ce qu'elle pourra bien en tirer.

Quant à "the take", il est à mon avis entaché par l'idéologie réformiste des altermondialistes. de ce point de vue, je trouve que "Recupérada" (projeté à la fête de Lo, et qu'on peut éventuellement se procurer auprès de Calpa) est bien plus sobre, et supérieur de ce fait. Il ne faut pas perdre de vue, afin d'éviter les grands discours gauchistes stériles, que les "récupérations" d'entreprises en Argentine qui représentent à tout casser 10 000 à 12 000 emplois s'inserrent dans toute l'économie parallèle qui s'est organisée pour permettre aux plus pauvres de survivre depuis le krach argentin. Ici, on crée une boulangerie dans une école abandonnée, là on tente de refaire partir son usine. Et cela marche d'autant mieux que les patrons ont foutu le camp en laissant la matière première, le tissu dans le cas de Brukman.

ET si cela débouche sur une coopérative viable pourquoi pas, mais ce n'est pas le socialisme...

Message Publié : 24 Mai 2005, 22:12
par françois marcel
j'ai trouvé ce documentaire allemand, si tu le dis, très intéressant, dans le sens où les ouvrières se mettent à la politique. "Recuperada", je l'ai vu aussi, mais si je l'ai apprécié, je le trouve indigeste dans la forme, trop de long discours, même si j'ai apprécié les témoignages directs.
Je suis d'accord avec toi, ces films ne parle pas de socialisme, simplement d'une alternative à l'abandon momentanée des patrons... mais la bourgeoisie guette, et le système reste "l'économie de marché".