Pour nous changer un peu
, un extrait de l'Anthologie de l'Amour sublime de B. Péret, plus précisemment de son introduction, titrée : "le noyau de la comète"
(Benjamin Péret @ . a écrit :De tous les sentiments, je ne vois de pleinement sacré que l'amour. Si l'amour humain est sacré, c'est qu'en réalité la notion même de sacré découle si directement de l'amour que, sans lui, aucun sacré n'est concevable (l'amour divin n'étant que détournement de l'amour humain à des fins, en somme, privatives). En vain, chercherait-on au sacré - jusque dans ses acceptions les plus irritantes (amour sacré de la patrie) ou les plus vulgaires (les liens sacrés de la famille) - une autre origine que l'amour humain, à travers toutes les déformations qui lui ont été infligées.
Maints hommes se montrent incapables d'aimer. Cette impuissance me semble si exceptionnelle chez la femme qu'on a le droit de n'en tenir aucun compte. C'est ce qui, aux yeux de l'homme, confère à la femme une capacité innée d'autosacralisation et le pouvoir de sacraliser l'objet de son amour. Elle dégage le sacré comme elle appelle l'amour. Je suis prêt à croire que, les conditions précédentes étant réunies, seuls peuvent éprouver l'amour sublime ceux dont le coeur est devenu sensible à cette émanation de sacré. Qu'on songe au premier baiser de la femme aimée ! Qui n'a éprouvé alors comme une vertigineuse illumination comparable à celle attachée à l'étreinte où « l'âme et le corps se touchent » ? Le temps d'un éclair, l'homme s'est surpris divinisé. Et il l'a réellement été par la femme dont, d'instinct, il découvre le pouvoir accru par l'amour qu'il lui porte. Si leur amour est sublime, l'homme, passé cet instant, ne retrouve plus son état antérieur. Il a été l'objet d'une soudaine métamorphose, à la faveur de laquelle ses impulsions charnelles ont reçu, de la femme aimée, une vie spirituelle.