par Barnabé » 13 Août 2008, 14:07
Je suis d'accord avec canardos... sur les conseils de lecture.
Sinon je trouve étonnante ta volonté de défendre à tout prix Dawkins, non contre des idéalistes, des religieux, ou des relativistes en sciences, mais contre la fraction des biologistes qui tentent de développer sur les bases du darwinisme, une conception non seulement matérialiste mais aussi dialectique de l'évolution (en particulier Rose ou Lewontin).
Peut-être Lewontin, Rose et Kamin tordent-ils quelque peu le bâton dans leur critique de Dawkins.
Le problème n'est pas que de dire que Dawkins penserait que les gènes déterminent directement le comportement. Il y en a qui le font, mais Dawkins est indéniablement plus subtile que cela.
Toi-même tu utilises les formules "gènes, où l'information est codée", "les gènes codent le gros cerveaux" etc. Et si ces expression sont pratiques et utiles pour faire de la vulgarisation générale, elles amènent aussi des confusions. Réduire le phénotype à l'expression d'une information contenue dans le génotype, ça c'est du réductionnisme (ce qui ne signifie pas que l'ADN et les gènes ne jouent aucun rôle). Les interactions en jeu, entre gènes, entre cellules, entre individus d'une population, avec le milieu etc. qui font que des gènes vont "s'exprimer" de telle ou telle manière, sont bien plus complexes. Surtout derrière l'idée du gène-code, il y a celle du plan pré-établi de l'organisme, du primat de l'information sur la matière. Je te renvoie là dessus à Ni Dieu ni gènes de Sonigo et Kupiec, à Lifelines de Rose ou à certains articles de Biology Under The Influence de Lewontin et Levins. Ces derniers pouvant difficilement être taxés de ne pas être des matérialistes, et des darwiniens.
Sur la notion de "mème", comme plus généralement les diverses tentative d'"évolutionnisme culturel", elles ont certes le mérite de refuser la socio-biologie à la Wison. Il n'échappera à personne ici qu'elles sont anti-marxistes, et conduisent à une conception idéaliste de l'histoire culturelle.
Il y a certainement bien des choses à discuter sur Gould. Le NOMA est indéniablement une forme de concession, mais enfin, ce n'est quand même pas comme si Gould n'avait pas, par la popularité de ses écrits, très largement (plus que Dawkins) contribué à populariser des arguments darwiniens contre le mysticisme et le créationnisme. Et si la discussion est sur la manière de lutter vraiment contre la religion, ce n'est ni comme Gould (en développant une science darwinienne sans attaquer directement les bases de la religion), ni comme Dawkins (en essayant de démontrer scientifiquementl'inexistence de Dieu)... mais en militant pour la révolution communiste ... et en se servant des écrits des uns et des autres pour fournir, dans une certaine limites, des arguments scientifiques.
Quand à présenter les théories de Gould comme la "remise en cause de la sélection naturelle comme moteur de l’évolution au profit du hasard et de la contingence historique" c'est au moins d'aussi mauvaise foi que de dire que Dawkins prétend que les gènes déterminent intégralement le comportement humain (et je ne suis pas d'accord pour autant avec la tendance au relativisme de Gould).
Tout cela n'enlève rien aux qualité de Dawkins comme polémiste, défenseur du darwinisme en particulier contre les créationnistes, et comme pourfendeur des superstitions religieuses. Mais que certains l'ai surnommé le pittbull de Darwin (en référence à T.H. Huxley qui était son bulldog), ne doit pas laisser croire que tous ceux qui sont en désaccord avec lui seraient des anti-darwinien. On peut penser que pour efficace (et donc salutaire face aux ennemies du darwinisme) qu'elle soit, une défense de pitbull n'est peut-être pas la plus fine des défenses possibles...