Bon, je vais tenter une réponse au convive. J'en avais écrit une longue hier, puis misclick : j'ai tout perdu. Alors je recommence.
Sur les "idées" derrière la musique de Stockhausen : que dire, sinon répéter la même polémique qu'on a déjà eu sur le romantisme ou l'art contemporain ? Tu es persuadé que l'on doit "juger" une œuvre d'art en fonction de ce que seraient les idées philosophiques, politiques de l'artiste, ou en tout cas celles qui déterminent son esthétique. Je ne suis pas d'accord avec ça. Stockhausen était un mystique du type délirant, "je suis originaire de la planète Sirius et je compte bien y retourner". Et alors ? Bach aussi était un mystique, Messiaen aussi plus près de nous. Faut-il bruler leurs œuvres sous prétexte de lutter contre la religion ? J'espère bien que non !
Les "idées" de Stockhausen qui nous intéressent sont des idées musicales (au sens large puisque Stockhausen a aussi écrit des opéras et de nombreuses pièces où le côté "performance théâtrale" compte beaucoup, par exemple le "Quatuor en hélicoptère" ci-dessus). Par exemple, le "Klavierstuck IX" cité au début de ce fil par Jul repose sur une idée simple : 19 fragments de partitions répartis sur une page. L'interprète commence par un fragment au hasard, enchaîne sur un autre au hasard, etc... jusqu'à ce qu'il joue un fragment pour la 3ème fois, et là la partition s'arrête ; de plus, à la fin de chaque fragments il y a des indications de tempo et de dynamique à suivre pour l'exécution du fragment suivant. Est-il nécessaire de connaître cette technique de composition pour apprécier sa musique ? Je ne le pense pas, pas plus qu'il n'est nécessaire de comprendre la technique de composition d'une fugue (passablement plus compliqué et mathématique) pour apprécier Bach, ni toute la théorie de l'harmonie tonale pour apprécier toute la musique "occidentale" de la Renaissance à nos jours... Mais bien sûr ça peut aider.
Et puis Stockhausen ne vient pas de n'importe où et n'est pas un cas isolé. Tu as mentionné Schoenberg et Webern comme prédecesseurs, et tu as vu juste, mais il faudrait aussi parler de ses contemporains comme Boulez, Ligeti, Berio, qui forment avec lui et quelques autres ce qu'on a appelé parfois l'"école de Darmstadt" du nom de cette ville allemande où ils expérimentaient ensemble la musique électronique au début des années 50, et confrontaient leurs idées musicales. De cette époque, il ne reste plus que Boulez...