a écrit :De sa vie, XXXXXXXXXXXXX n'avait jamais vu au seigle une teinte brun foncé d'aussi mauvaise augure: c'était une couleur de vieil or terni. Moissonné à temps, le seigle est bien plus clair.
Ces champs couleur de feu qui parraissaient brûler sans flamme, ces champs muets qui parraissaient crier leur détresse, un ciel immense les entourrait de sa froide sérénité, un ciel tourné déjà vers l'hiver, parcouru sans arrêt, comme un visage par des ombres, par de longs nuages de neige, feuilletés, noirs au milieu, blancs sur les bords.
Et tout était animé d'un mouvement lent et régulier. La rivière coulait. La route allait en sens inverse. Sur cette route, marchait XXXXXXXXXX. Des nuages cheminaient dans la même direction que lui. Mais les champs non plus ne restaient pas immobiles. Quelquechose se mouvait à leur surface, ils étaient animés d'un grouillement menu et infatigable, qui donnait la nausée.
(pelon @ jeudi 10 novembre 2005 à 10:12 a écrit :J'ai lu d'autres livres de Russell Banks. Il est comment celui-ci ?
a écrit :Dans les champs, les mulots avaient proliféré; leur nombre avait atteint des proportions fantastiques, inconnues jusque là. Ils allaient et venaient sur le visage et les mains du [le héros], ils pénétraient dans ses manches et dans les jambes de son pantalon lorsque la nuit le surprenait dans les champs et qu'il lui fallait s'arrêter pour dormir à leur lisière. Dans la journée, d'innombrables troupeaux de mulots repus couraient sur la route au pieds mêmes du voyageur et se transformaient, lorsqu'on les écrasait, en une bouillie glissante qui remuait encore en glapissant.
Le [le héros] était suivi de loin par une meute de chiens de garde campagnards, sauvages et velus, effrayants, qui parraissaient échanger des regards complices, comme si ils se concertaient pour décider du moment où ils allaient se jeter sur lui et l'égorger. Ils se nourissaient de charogne, mais ne dédaignaient pas non plus les mulots qui grouillaient dans les champs, et, épiant de loin le [le héros], le suivaient avec assurance et parraissaient toujours attendre quelque chose. Pourtant, ils n'entraient pas dans la forêt, et à mesure que le [le héros] s'en approchait, ils se laissaient distancer peu à peu, puis faisaient demi-tour et disparraissaient.
a écrit :Etait-il amiral ? S'appelait-il Violette ? En somme, s'agissait-il de l'amiral Violette ?Je ne sais plus. Il est possible que je fasse une espèce de synthése entre un amiral, une violette et un gouverneur général. Mais tout cela n'a pas la moindre importance
a écrit :La forêt offrait alors avec les champs un contraste absolu. Les champs désertés par l'homme paraissaient en détresse, son absence semblait les avoir livrés à la malédiction. Délivrées de l'homme, les forêts resplendissaient comme des prisonniers rendus à la liberté.
Les noisettes, en général, n'ont pas le temps de mûrir : les gamins des villages les cueillent encore vertes. Maintenant, les flancs des collines et des ravins de la forêt étaient entièrement tapissés d'un feuillage intact, rugeux et doré, que le hâle de l'automne paraissait avoir couvert de poussière et dépoli. De ce feuillage sortaient des noisettes qui poussaient par trois ou quatre, coquettement écartées en éventail, comme des bouquets noués de rubans, mûres, prêtes à tomber de leurs enveloppes vertes. xxxxxxxxxx XXXXXXXXXXXX ne cessait d'en casser pour les grignoter. Ses poches en étaient bourrés, sa musette en était remplie. Pendant une semaine, les noisettes furent la base de son alimentation.
a écrit :Le docteur avait l'impression de voir les champs dans la fièvre et le délire d'une grave maladie, et les forêts dans la sérénité de la convalescence. La forêt, semblait-il, était habitée par Dieu, tandis que dans les champs serpentait le sourire moqueur du démon.
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