"Le ciment", roman de Fedor Gladkov

[Byrrh]

Juste au passage, sur les exclusions et les épurations du parti. Un parti au pouvoir ou un parti puissant attire forcément des gens qui ne viennent pas sur les mêmes bases que ceux qui rejoignent un parti illégal, pourchassé, etc. De 1917-18 à 1923-24, le parti bolchévique a considérablement gonflé et a pu ressentir le besoin de réexaminer ses adhésions. Est-ce que ceux qui ont été exclus auraient dû l'être, c'est bien entendu une autre histoire...

Je suis évidemment d'accord. Ma remarque sur la commission d'épuration se rapportait au récit : dans le roman, elle est convoquée quelques jours après le retour de Glieb et sa grosse colère pour que le chantier de reconstruction de la cimenterie reprenne. On ne comprend pas pourquoi ce sont des "lampistes" qui sont exclus du parti, alors que les bureaucrates qui ont voulu saboter ce projet en l'absence de Glieb restent en poste. Mais sans doute la réunion de cette commission d'épuration n'a rien à voir avec le chantier de la cimenterie...

D'accord également avec toi sur l'intérêt de lire et faire lire ce roman, en avertissant tout de même les lecteurs du fait que certains aspects sont assez dégueulasses et sont une déformation de nos idées (un responsable de valeur qui se rend coupable d'un viol, on ne le laisse pas en place, on l'envoie devant un tribunal).

[Duffy]

En avertissant, c'est une possibilité.
On peut aussi faire confiance aux "lecteurs" pour réfléchir par eux-mêmes et faire en sorte qu'ils se sentent libres de dire ce qu'ils en pensent. Quitte à leur pointer le problème si nécessaire.

[Byrrh]

Il faut aussi faire confiance aux militants pour qu'ils ne racontent pas des sottises, par exemple en présentant comme des modèles les deux militants stals d'En un combat douteux...

[Duffy]

Ce serait en effet judicieux.
(Bien que le dévouement des deux staliniens en question ait, en même temps, un aspect admirable... ce qui rend le tout d'autant plus dramatique et révoltant.)

Souhaitons-leur donc de rencontrer des lecteurs capables de leur dire sans crainte ce qu'ils en pensent...

[Byrrh]

C'était une "private joke" faisant référence à quelqu'un qui était passé à peu près totalement à côté de l'intérêt de faire lire le roman de Steinbeck quand on est trotskyste... et qui du coup défendait le livre comme l'aurait fait une militante PCF des années 1930. Mais c'était il y a longtemps, et j'ai appris que cette personne ne militait plus, ce qui n'est peut-être pas un mal.

Oui, les deux staliniens du roman sont dévoués. Compte tenu de ce qu'ils font, j'ai du mal à voir quelque chose d'admirable dans leur dévouement. Ce sont de fieffés salauds, à dire vrai...

[Ottokar]

C'est toute l'ambiguïté du stalinisme, utiliser une révolté sincère et un dévouement à ce qu'on croit être les intérêts des travailleurs pour faire passer parfois une politique dégueulasse et surtout habituer ses militants à décider à la place des gens au lieu d'aider ceux ci à décider par eux mêmes.