a écrit :"Valse avec Bachir" : Freud au chevet de soldats israéliens dans la guerre du Liban en 1982
LE MONDE | 16.05.08 | 08h22 • Mis à jour le 24.06.08 | 10h47
Un film d'animation au palmarès : ce coup d'éclat réalisé l'an dernier par Marjane Satrapi, auteur de Persepolis, sera-t-il réédité par Ari Folman ? La chose est envisageable car cette œuvre d'art originale ne ressemble à rien de comparable dans l'histoire du cinéma. Valse avec Bachir arbore des arguments séduisants.
Le film mêle astucieusement le documentaire politique et la chronique autobiographique, le film de guerre et la psychanalyse, la transcription de rêves – réminiscences, fantasmes – et l'animation graphique flamboyante. Cette fresque explosive explore l'inconscient d'un Israélien – Ari Folman, confessant que ce film est son "histoire personnelle" – dont les nuits sont troublées par des hallucinations. Jadis soldat expédié à Beyrouth lors de la première guerre du Liban, en 1982, il entend comprendre ce qui le hante, remonter à la source de ses tourments, retrouver trace de ce qu'il a vu, vécu et occulté.
Imaginaire et objectivité sont les deux ingrédients épicés de ce cocktail qui a nécessité quatre ans de travail. Dans un premier temps, Ari Folman a interviewé ses anciens compagnons d'armes pour leur demander d'exhumer leurs propres souvenirs, puis une série de psychiatres qui décryptent leurs visions et cauchemars.
Dans un second temps, ces témoignages ont été transformés en dessins animés, non par le système du rotoscope qui permet de repeindre l'enregistrement vidéo, mais au fil d'une création graphique réaliste (il faut rendre hommage au directeur artistique, David Polonsky) qui permet de reconnaître le profil des protagonistes. A cette enquête se sont ajoutées des scènes de vie privée et des évocations d'épisodes de guerre, eux aussi composés sur une palette graphique vouée à projeter des flashes de terreurs et des songes irréels.
TUERIE DANS UN VERGER
C'est par une séquence fantastique que débute le film : une meute de chiens fous court, tous crocs menaçants, à travers une ville jusqu'à la demeure d'un ancien guerrier. Les spécialistes de la mémoire inventée permettent à Folman et à ses anciens compagnons d'armes d'entamer une thérapie médicale et cinématographique, de dénicher des images effacées du disque dur de leur mémoire. Ils aboutissent aux massacres des Palestiniens dans les camps de Sabra et Chatila par les phalangistes chrétiens de Béchir Gemayel, pour venger l'assassinat de ce dernier.
Valse avec Bachir est un film sur la peur et sur la culpabilité qui ose montrer ces soldats israéliens comme victimes. Cette interprétation de la guerre par des soldats quelconques met l'accent sur le stress post-traumatique qui les habite, leur culpabilité de rescapés, la douleur d'avoir été impuissants à empêcher cette boucherie non commanditée par leur hiérarchie militaire. Culpabilité attisée par une hantise : ils n'ont pas participé aux massacres mais ne sont-ils pas suspects d'avoir endossé le rôle des nazis durant la seconde guerre mondiale, se demande Folman. Leur chaos psychologique met en effet en regard Sabra et Chatila et le ghetto de Varsovie.
Outre ces morceaux de bravoure que sont l'attaque d'un tank israélien par des milices palestiniennes, une tuerie dans un verger, l'entrée stupéfiante de soldats israéliens dans Beyrouth sous les rafales de snipers, une scène récurrente ne cesse de renvoyer ces jeunes fantassins à l'horreur des camps de concentration : trois hommes surgissant nus de la mer, squelettiques, sortis de l'enfer.
Rien de glamour ni de glorieux dans cette épopée d'hommes qui ne retrouvent leurs ombres que grâce aux expertises freudiennes. Valse avec Bachir est d'ailleurs truffé de signes illustrant le désir et la mort, la sensualité féminine et le refuge marin... Jusqu'à ce que quelques dernières images – des documents d'archives en vidéo et photo cette fois – authentifient les blessures en faisant basculer le film du dessin au drame réel.
Jean-Luc Douin
a écrit :"Valse avec Bachir" : dans l'inconscient douloureux d'un soldat d'Israël
| 24.06.08 | 16h18 • Mis à jour le 07.07.08 | 16h47
Ce fut l'un des événements du dernier Festival de Cannes. Troisième film de l'Israélien Ari Folman, Valse avec Bachir est un mélange détonant entre dessin animé, enquête documentaire, journal intime et chronique de guerre. L'enchaînement de ses deux premières séquences suffit à annoncer l'amplitude de son registre.
La première saisit le spectateur à la gorge. Une meute de chiens noirs aux yeux jaunes sème la panique dans les rues d'une ville charbonneuse sur laquelle s'appesantit un ciel ocre. Puis la horde, babines révulsées, s'immobilise devant un immeuble à une fenêtre duquel apparaît soudain le visage d'un homme apeuré. Cette scène d'apocalypse trouve son explication dans la séquence suivante, située dans l'atmosphère feutrée d'un bar de nuit où un homme décrit à l'un de ses amis, prénommé Ari, ce qui se révèle être un cauchemar récurrent. Conscrit lors de la première invasion israélienne du Liban, en 1982, il avait pour mission d'abattre tous les chiens qui, postés à l'entrée des villages, signalaient par leurs aboiements l'arrivée des soldats.
Ce récit inaugural par la manière dont il ménage la sensation brute de l'effroi et l'épanchement de la parole définit le projet narratif et esthétique du film. Il enclenche par la même occasion le récit, en suscitant chez cet ami cinéaste, alter ego animé d'Ari Folman, la prise de conscience de cette période pour laquelle il ne possède plus aucun souvenir. Il faisait pourtant partie de la troupe qui encerclait les camps palestiniens de Sabra et Chatila, où les phalangistes chrétiens, alliés des Israéliens, massacrèrent des centaines de civils pour venger l'assassinat de Bechir Gemayel, leur chef charismatique.
Ari n'aura dès lors de cesse de retrouver la mémoire, recueillant, sur les conseils d'un ami psychanalyste, les témoignages de ses anciens camarades de troupe. Ces rencontres, Ari Folman les a faites et filmées dans la réalité durant les quatre ans qu'a duré la préparation de ce film thérapeutique. Chacune d'entre elles, dont le dessin animé garde la trace documentaire par la présence de la voix réelle et le mimétisme du dessin, ouvre sur la mise en scène d'un flash-back qui dévoile un fragment de ce qui s'est passé voici plus de vingt ans sur le champ de bataille. L'addition de ces fragments finit par reconstituer la guerre d'Ari, avec sa présence à Sabra et Chatila en point d'orgue.
La richesse de Valse avec Bachir tient à la singularité de sa fabrication, à sa dénonciation par l'absurde de la guerre ou au phénomène de catharsis artistique qu'il met en oeuvre. Sa marque la plus profonde et brûlante est pourtant ailleurs.
Elle tient en deux idées liées. La première, sur un plan stylistique, est celle de la déréalisation. Tout le film contribue à entretenir cette sensation, depuis la distorsion fantasmatique des témoignages jusqu'à l'hyperréalisme halluciné des scènes de guerre. La seconde, sur le plan moral, tient à la question de la responsabilité israélienne face au massacre de Sabra et Chatila.
Ces deux plans se rejoignent car, en dépit des apparences, le film, hanté par le motif de la résurrection des morts, porte moins sur Sabra et Chatila que sur la manière dont ce drame réveille une problématique plus souterraine : celle du traumatisme de la Shoah sur l'inconscient du soldat Ari. Valse avec Bachir brisera l'effet de miroir que certains voudraient voir entre ces deux réalités. Paradoxe : cette inquiétude, qui l'honore, ne l'aura-t-elle pas aussi empêché de considérer politiquement l'événement ?
(canardos @ mercredi 25 janvier 2012 à 19:14 a écrit : j'aime aussi la guerre des etoiles,avatar psychose shutter island, la maison du docteur Edwarwes, et le seigneur des anneaux bref les films de fantasy et de science fiction...
Pas bien convaincant tout cela ... L'histoire que raconte le film est donc selon toi de la pure science-fiction, en tous cas quelque chose qui n'est absolument pas crédible, du même niveau que la guerre des étoiles ?
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