décès de Mehmet Ulusoy

[titi]

Mehmet pour mémoire
Nous annonçons en page 18 la disparition du metteur en scène de théâtre Mehmet Ulusoy. Il s'est éteint mardi soir d'un cancer du poumon dans un hôpital parisien, à l'âge de 63 ans. Il préparait pour bientôt (c'était prévu en novembre prochain au Théâtre de la Tempête que dirige Philippe Adrien à la Cartoucherie de Vincennes) un de ces spectacles d'envergure qu'il affectionnait ; l'Eloge de la folie d'après l'oeuvre fameuse d'Erasme (1466-1536), le grand humaniste de la Renaissance. Il s'était déjà attaqué, dans la même veine, épique, volontiers baroque - sous le titre Dans les eaux glacées du calcul égoïste - à une représentation de certains chapitres du Capital de Marx. C'est à la fin des années 70 que Mehmet, venu de sa Turquie natale, se révéla soudain avec le Nuage amoureux, de Nazim Hikmet, dont il traita la poésie âpre et excquise de façon originale, en lui donnant en scène les couleurs chatoyantes des kilims anatoliens. De Nazim Hikmet encore, on lui doit Pourquoi Benerdji s'est-il suicidé ? et Légendes à venir, réalisations qu'il eut ces derniers temps l'occasion de monter enfin à Istanbul avec des acteurs turcs. On n'a pas oublié non plus, de Brecht, le Cercle de craie caucasien, auquel il prêta son sens de l'enluminure orientale. Denis Bablet, le regretté théâtrologue du CNRS, parlait à son propos de "spectacles montages". Sa collaboration avec le scénographe Michel Launay, si inventif, fit souvent merveille. Homme chaleureux, fraternel, à la fois gourmand et désespéré, Mehmet, parti trop tôt, aura amené sur la scène française le souffle d'un ailleurs bénéfique. Nous partageons le chagrin des siens.