Yahoo! Actualités Culture
samedi 22 février 2003, 11h16
"Abd el-Kader et l'Algérie au XIXe siècle" au musée Condé de Chantilly
CHANTILLY (AFP) - Le musée Condé, au château de Chantilly (Oise), présente jusqu'au 21 avril dans la salle du Jeu de Paume près de 130 tableaux, objets d'art, armes et manuscrits issus de la collection liée au Maghreb du XIXe siècle du duc d'Aumale, parmi lesquels de nombreux objets ayant appartenu à l'émir Abd el-Kader.
Organisée dans le cadre de "Djazaïr, une année de l'Algérie en France", cette exposition évoque le destin croisé de deux personnalités férues de culture, qui se sont affrontées, mais aussi respectées.
Fils du roi Louis-Philippe, Henri d'Orléans, duc d'Aumale (1822-1897), propriétaire du château de Chantilly qu'il léguera en 1884 à l'Institut de France, a vécu de 1839 à 1848 en Algérie, dont l'armée française a entamé la conquête en 1830.
A partir de 1842, le duc sillonne le pays à la recherche de l'émir Abd el-Kader (1807-1883), stratège hors pair qui s'oppose depuis 1832 à l'entreprise coloniale de la France. Vivant dans une ville de tentes en constant déplacement, la smalah, il tient d'abord en échec l'armée française, avant d'être vaincu par le duc d'Aumale, qui s'empare de la "capitale nomade" en 1843.
Réfugié au Maroc, Abd el-Kader fera sa reddition en 1847. Au mépris d'un accord conclu avec le duc d'Aumale contraint à l'exil en Angleterre par la révolution de 1848, l'émir sera interné pendant 5 ans en France. Il finira sa vie à Damas (Syrie), où il s'illustrera en 1860 en protégeant des chrétiens menacés, ce qui lui vaudra la Légion d'honneur.
Le butin de guerre amassé lors de la prise de la smalah a constitué le point de départ d'une nouvelle collection pour le duc d'Aumale, qui n'aura de cesse de l'enrichir.
Parmi les pièces maîtresses sorties des réserves et restaurées pour l'exposition figurent la grande tente caïdale de l'émir et de délicates pièces de marqueterie de nacre, écaille et ivoire (coffres, tablettes), productions tunisiennes et syriennes qui témoignent de la vitalité des échanges dans le bassin méditerranéen.
Plusieurs objets usuels ayant appartenu à Abd el-Kader sont d'origine européenne. Une longue-vue, un miroir et même un flambeau en cristal taillé de Vonèche (Belgique) côtoient ainsi des babouches, des sacoches richement brodées et une écuelle algérienne en argent.
Les armes figurent évidemment en bonne place, parmi lesquelles d'élégants sabres, dont un fut offert par le roi de France à Abd el-Kader en 1838 après le traité de la Tafna.
Trente-sept manuscrits arabes issus de la bibliothèque de l'émir, richement calligraphiés, sont également présentés pour la première fois au public.
Parallèlement, une quarantaine de tableaux et dessins reflètent la vision occidentale de l'Algérie colonisée, de Henri-Felix-Emmanuel Philippoteaux à Alfred Decaen ("Prise de la smala") en passant par Eugène Fromentin ("La chasse au héron"), Horace Vernet ("Chefs arabes en conseil") ou encore Eugène Delacroix.