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[center]Accélérer la désintégration radioactive par la transmutation[/center]
Cordis Nouvelles: 2008-01-30]
Alors que le débat sur les avantages et les inconvénients de l'énergie nucléaire fait rage dans de nombreux pays, quelque 30 nouvelles centrales nucléaires sont aujourd'hui en construction à travers le monde, y compris en Europe. Certains pays comme l'Allemagne et la Suède se sont engagés à renoncer progressivement au nucléaire, mais cet engagement est-il irrévocable?
Peu importe la réponse, il est plus que probable que l'élimination des déchets nucléaires reste à l'avenir un sujet épineux. Dans ce contexte, les membres d'un projet financé par l'UE s'efforcent de trouver des alternatives au stockage souterrain des déchets radioactifs par l'élaboration de procédés permettant de les transformer et d'accélérer la désintégration radioactive. Ils misent pour cela sur la transmutation, un concept qui nourrit depuis plusieurs dizaines d'années les réflexions des scientifiques.
Les partenaires du projet intégré EUROTRANS («Programme de recherche européen sur la transmutation de déchets nucléaires hautement radioactifs dans un système à accélérateur») étudient en particulier la faisabilité d'un centre de transmutation. Un tel centre pourrait contribuer à transformer environ 2 600 tonnes de déchets radioactifs hautement toxiques de longue vie - soit le poids de toutes les barres de combustible nucléaire utilisées dans l'Union européenne pendant un an - en produits de fission à vie plus courte ou stables.
Avant qu'une transmutation ne puisse être exécutée, les radioéléments de longue vie doivent être séparés des déchets radioactifs. À cette fin, une opération dite de spallation doit être réalisée: les noyaux d'atomes de métaux lourds sont mis en collision avec des protons de grande énergie au moyen d'un accélérateur, ce qui éjecte des fragments des noyaux et des nucléons. Ces «neutrons de spallation» réagissent ensuite avec le coeur radioactif des produits de fission, de telle sorte qu'ils sont transformés en d'autres nucléides, la radioactivité étant progressivement atténuée.
Une cinquantaine de partenaires issus de 14 pays sont mobilisés dans le projet EUROTRANS, qui est coordonné par le centre de recherche de Karlsruhe et associé à des projets similaires aux États-Unis, au Japon et en Corée du Sud. Le projet fait intervenir des équipes de recherche dans cinq domaines:
- le développement et l'optimisation de l'accélérateur;
- le couplage des composants;
- le développement de combustibles;
- les technologies des métaux liquides lourds;
- les données sur les matériaux.
Les chercheurs de l'université de la Ruhr à Bochum, en Allemagne, modélisent par exemple des mécanismes de transfert thermique. «Nous abordons cette partie du puzzle en simulant le transfert thermique d'une barre de chauffe à haute performance vers le réfrigérant utilisé ici, un bain de plomb et de bismuth», explique Marco Koch, professeur à l'université de la Ruhr à Bochum, dont l'équipe coopère avec dix autres groupes dans ce domaine. «Nous souhaitons déduire à partir de cette base les paramètres nécessaires à la modélisation des turbulences de l'écoulement.»
«Nous saurons ensuite comment concevoir les conduites d'écoulement et à quelle vitesse d'écoulement et à quelle différence de température l'installation de refroidissement sera optimale», ajoute Tilman Drath, ingénieur à l'université de la Ruhr à Bochum.
Alors que les recherches sur la transmutation ont déjà bénéficié de fonds du cinquième programme-cadre de l'UE, le projet EUROTRANS reçoit à présent 23 millions d'euros au titre du sixième programme-cadre (6e PC). Les travaux s'achèveront au printemps 2009 et les chercheurs espèrent qu'un centre expérimental de transmutation pourra ensuite voir le jour.