a écrit :Exit les gènes microbiens
Des plantes transgéniques 100% végétales
Marc Mennessier
[24 août 2005]
Fini le mélange des genres ou plutôt des règnes. Deux chercheurs américains viennent de mettre au point une méthode permettant de ne plus recourir à des gènes «marqueurs» d'origine bactérienne lors de l'élaboration de plantes transgéniques.
Neal Stewart et Ayalew Mentewab, de l'université du Tennessee, annoncent dans la revue Nature Biotechnology à paraître le mois prochain qu'il est désormais possible de leur substituer le gène Atwbc19 issu de la plante modèle Arabidopsis thalania, une moutarde sauvage bien connue des biologistes. L'introduction d'un gène végétal – et non plus microbien – dans un autre végétal contribuera-t-elle à dissiper la crainte qu'inspirent les OGM (organismes génétiquement modifiés) ?
L'utilisation, jusqu'à la fin des années 80, de gènes de résistance à des antibiotiques comme la kanamycine ou l'ampicilline, provenant de la bactérie Escherichia coli, pour trier les plantes porteuses du gène d'intérêt (tolérance à un ravageur par exemple) inséré lors de la transformation, avait contribué à jeter le discrédit sur le génie génétique. Les opposants craignaient que ces gènes, une fois ingérés, passent dans le génome des bactéries contenus dans l'estomac ou l'intestin des animaux d'élevage ou de l'homme et aboutissent à la création de «supermicrobes» contre lesquels il aurait été difficile de lutter.
Bien que ce risque potentiel soit minime, la directive européenne 2001/18 a banni le recours à ces gènes à compter du 1er janvier prochain pour les variétés commerciales et à partir de 2009 pour les variétés expérimentales. Mais, dans les faits, les sélectionneurs ont tourné la page depuis longtemps.
La plupart des OGM actuellement commercialisés ont été fabriqués en employant des gènes marqueurs résistants à un herbicide d'ailleurs issu de la même bactérie. Au lieu d'appliquer un antibiotique, les expérimentateurs emploient cette fois un désherbant mais le résultat est le même : les cellules végétales qui survivent sont celles qui ont intégré le morceau d'ADN contenant le gène marqueur et le gène d'intérêt.
Une autre méthode de tri en cours de développement en Allemagne, au Danemark et en Suède consiste à utiliser un gène détoxifiant qui permet aux cellules porteuses de la transformation génétique de survivre tandis que les autres sont éliminées. Mais il s'agit là aussi d'un gène bactérien.
Au fond, l'originalité des travaux de Stewart et Mentewab est d'avoir découvert le premier gène marqueur d'origine végétale dont le mode d'action demeure rigoureusement identique aux précédents. Atwcb19 confère en effet une résistance aux antibiotiques qui permet de procéder aux opérations de tri en éliminant le risque de transfert vers un microbe.
Une autre méthode utilisée depuis cinq ans par la société française Biogemma est plus expéditive. Elle consiste à supprimer le gène marqueur une fois son office rempli, pour ne garder que le gène d'intérêt dans la variété commerciale. «Cela résout le problème et facilite le processus d'homologation», souligne son directeur, Michel Debrand.