cognitivisme et comportementalisme

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par Wapi » 21 Mars 2005, 17:48

Pour fêter le retour de Caupo, un petit cadeau qui, j'espère, lui plaira :



a écrit :                                   
                    Léon Trotsky, "Culture et Socialisme", publié en 1926-1927

(Extraits)

La critique marxiste de la science doit être non seulement vigilante mais également prudente, sinon elle pourrait dégénérer en un véritable sycophantisme, en une famousovtchina [*] . Prenons par exemple la psychologie. L'étude des réflexes de Pavlov se situe entièrement sur la voie du matérialisme dialectique. Elle renverse définitivement le mur qui existait entre la physiologie et la psychologie. Le plus simple réflexe est physiologique, mais le système des réflexes donnera la " conscience ". L'accumulation de la quantité physiologique donne une nouvelle qualité, la qualité " psychologique ". La méthode de l'école de Pavlov est expérimentale et minutieuse. La généralisation se conquiert pas à pas depuis la salive du chien jusqu'à la poésie (c'est-à-dire jusqu'à la mécanique psychique de celle-ci et non sa teneur sociale), bien que les voies vers la poésie ne soient pas encore en vue.

C'est d'une manière différente que l'école du psychanalyste viennois Freud aborde la question. Elle part, tout d'abord, de la considération que les forces motrices des processus psychiques les plus complexes et les plus délicats s'avèrent être des nécessités physiologiques. Dans ce sens général, cette école est matérialiste, si l'on écarte la question de savoir si elle ne donne pas une place trop importante au facteur sexuel au détriment des autres facteurs (mais c'est déjà là un débat qui s'inscrit dans le cadre du matérialisme). Pourtant, le psychanalyste n'aborde pas expérimentalement le problème de la conscience, depuis les phénomènes pri. maires jusqu'aux phénomènes les plus élevés, depuis le simple réflexe jusqu'au réflexe le plus complexe; il s'évertue à franchir d'un seul bond tous les échelons intermédiaires, de haut en bas, du mythe religieux, de la poésie lyrique ou du rêve, directement aux bases physiologiques de l'âme.

Les idéalistes enseignent que l'âme est autonome, que la " pensée " est un puits sans fond. Pavlov et Freud, par contre, considèrent que le fond de la " pensée " est constitué par la physiologie. Mais tandis que Pavlov, comme un scaphandrier, descend jusqu'au fond et explore minutieusement le puits, de bas en haut, Freud se tient au-dessus du puits et d'un regard perçant, s'évertue, au travers de la masse toujours fluctuante de l'eau trouble, de discerner ou de deviner la configuration du fond. La méthode de Pavlov, c'est l'expérimentation. La méthode de Freud, la conjecture, parfois fantastique. La tentative de déclarer la psychanalyse " incompatible " avec le marxisme et de tourner le dos sans cérémonie au freudisme est trop simpliste, ou plutôt trop " simplette ". En aucun cas nous ne sommes tenus d'adopter le freudisme. C'est une hypothèse de travail qui peut donner – et qui incontestablement donne – des hypothèses et des conclusions qui s'inscrivent dans la ligne de la psychologie matérialiste. La voie expérimentale amène, en son temps, la preuve. Mais nous n'avons ni motif ni droit d'élever un interdit à une autre voie, quand bien même elle serait moins sûre, qui s'efforce d'anticiper des conclusions auxquelles la voie expérimentale ne mène que bien plus lentement. [**]

A l'aide de ces exemples, je voulais montrer, au moins partiellement, et la diversité de l'héritage scientifique et la complexité des voies par lesquelles le prolétariat peut en prendre possession. Si déjà, dans l'édification économique, l'affaire ne peut être résolue par un ordre et s'il faut " apprendre à faire du commerce ", le pur et simple commandement dans les sciences ne pourra amener rien d'autre que le préjudice et la honte. Ici il faut " apprendre à apprendre ".

                                                ____________


[*] Famousov, personnage de théâtre, petit bourgeois pédant, tout imbu de son pseudo-savoir (N. d. T.).

[**] Bien entendu, cette question n'a rien de commun avec la mode d'un certain freudisme qui n'est qu'espièglerie et polissonnerie érotique. Une telle démangeaison de la langue n'a aucun rapport avec la science et indique seulement un état de dépression : le centre de gravité se déplace du cerveau à la mœlle épinière... (L. T.).



Se pose bien sûr la question de "l'actualisation" de cette reflexion sur la psychologie ... mais ce texte là, quelle actualité !

Wapi
 
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Message par Cyrano » 21 Mars 2005, 18:26

et bien trotsky ne s'était pas trompé sur pavlov......

Par contre? Les points de suspension?...
......
C'est comme un soupir?...

Car Léon Trotsky ne s'était pas non plus trompé sur la psychanalyse...
C'est ballot, n'est ce pas?...
Cyrano
 
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Message par satanas » 21 Mars 2005, 21:16

Compte tenu du faible niveau de développement de la science et de la médecine en matière de recherche sur le cerveau ,on ne peut pas reprocher à Trotsky et à beaucoup d'autres d'avoir espéré des avancées du côté de la psychanalyse, d'autant que ces questions ne constituaient probablement sa "spécialité" ou sa préoccupation première......

Qu'il ait été curieux,intéressé et ouvert à des théories nouvelles ne dit évidemment pas qu'il cautionnerait aujourd'hui la psychanalyse , ses "résultats" et ses prétentions en matière de santé mentale,mis en perspectives avec les progrès (encore limités cependant) accomplis dans le domaine des connaissances et traitements EVALUABLES en psychiatrie .....

satanas
 
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Message par Jacquemart » 21 Mars 2005, 23:07

a écrit :En aucun cas nous ne sommes tenus d'adopter le freudisme. C'est une hypothèse de travail qui peut donner – et qui incontestablement donne – des hypothèses et des conclusions qui s'inscrivent dans la ligne de la psychologie matérialiste. La voie expérimentale amène, en son temps, la preuve.

Trotsky était certes prudent - et même, il considérait les conjectures (parfois "fantastiques") de Freud d'un oeil favorable. Mais pour ma part, je ne vois absolument pas dans ce texte le blanc-seing que d'autres veulent y lire en faveur de Freud, en n'en retenant que les phrases qui les arrangent et en oubliant les autres.
Il me semble que 80 ans après, on est en droit de réclamer la "preuve" qu'attendait Trotsky, non ? Et qu'en l'absence de celle-ci, on peut - et on doit - tirer quelques conclusions.
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Jacquemart
 
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