a écrit :
[center]La "Terre boule de neige" fond comme neige au soleil[/center]
Par Jonathan Toubeau, Futura-Sciences, le 11/04/2007
Cette hypothèse que la Terre aurait subi une glaciation globale au Néoprotérozoïque pourrait bien fondre comme neige au soleil. C'est en tout cas ce que prétendent des chercheurs en apportant la preuve que des périodes de chaleur se sont produites durant cette ère.
Notre Terre, une boule de neige ? Un modèle qui ne fait pas tout à fait l'unanimité...
Crédits : NASA
En analysant des roches sédimentaires glaciaires en provenance d'Oman, une équipe anglo-suisse a mis en évidence des cycles « chaud-froid » entre -850 et -544 millions d'années, au Cryogénien. Pour caractériser la composition chimique et minérale des roches et y détecter toute trace d'un changement de climat, les chercheurs ont fait appel à l'indice chimique d'altération. Un indice élevé est synonyme d'une forte désagrégation chimique, favorisée par des conditions humides ou chaudes ; à l'inverse, un indice bas indique un environnement sec et frais.
Ils ont d'abord identifié trois intervalles à faible taux de désagrégation, témoins d'un climat froid, mais une alternance avec des périodes à fort indice d'altération est vraisemblablement le signe d'ères interglaciaires avec des climats plus chauds. Malgré la sévère glaciation subie par la Terre à cet instant de son histoire, cela signifie que l'englaciation complète suggérée par les théories Snowball Earth n'a jamais eu lieu. Le Professeur Philip Allen, chef du projet au Department of Earth Science and Engineering de l'Imperial College à Londres, explique : « Si la terre était devenue entièrement gelée pendant une longue période, ces cycles climatiques ne pourraient exister. En fait, une fois entièrement gelée, il est difficile de créer les bonnes conditions pour causer un dégel, puisqu'une grande partie du rayonnement solaire incident serait réfléchi par la neige et la glace. La preuve de cycles climatiques est donc hostile à l'idée d'une Terre boule de neige ».
Comprendre comment le climat de la Terre a évolué par le passé alimente aussi en données les modèles qui étudient les variations de notre climat. Pour le Professeur Allen, il ne s'agit pas seulement de curiosité à l'égard du passé : « cela fournit des indices sur la manière dont notre système climatique fonctionne dans des conditions extrêmes. Mais ces conditions extrêmes ne furent probablement pas une englaciation globale. »
En défiant l'hypothèse d'une « Terre boule de neige », ces résultats font également surgir une nouvelle question : comment la Terre a-t-elle pu s'approcher si près du désastre pour finalement parvenir à l'éviter ? « C'était la glaciation la plus grave éprouvée par la planète au cours des derniers milliards d'années, et la grande question est : comment la glace a-t-elle pu se frayer un chemin vers les tropiques mais ne pas finir le boulot ? » s'interroge le Professeur Allen. Si tel avait été le cas, le chemin emprunté par l'évolution aurait sans doute était très différent...
rappelons en quoi consiste le stade "boule de neige" qu'a traversé la terre il y a 750 millions d'années, sans qu'heureusement les océans n'aient jamais été totalement glaçés à l'équateur, car sinon le processus aurait difficilement été réversible...
sur le site du CNRS:
a écrit :
17 mars 2004
[center]La Terre « boule de neige » : avis de grand froid il y a 750 millions d'années[/center]
Configuration continentale à - 750 millions d'années.
Il y a environ 750 millions d'années, la Terre aurait été entièrement recouverte de glace, une hypothèse connue sous le nom de glaciation « boule de neige ». Les causes de cet événement climatique majeur étaient jusqu'à présent mal connues. Dans un article à paraître le 18 mars dans la revue Nature, deux équipes du CNRS et du CEA (1) proposent un outil de modélisation novateur, le modèle GEOCLIM. Premier modèle à coupler, à l'échelle du million d'années, l'évolution du cycle du carbone, du climat (température, cycle de l'eau : précipitation et ruissellement) et de la position des continents, GEOCLIM permet d'expliquer quantitativement cette glaciation.
En 1992 et 1998 des scientifiques émettent l'hypothèse que la Terre aurait connu à la fin du Protérozoïque un épisode glaciaire majeur et unique en son genre. Les calottes polaires auraient atteint l'équateur comme l'indiquent des dépôts glaciaires caractéristiques retrouvés sur le pourtour du globe. L'équateur englacé, une terre « boule de neige », de quoi intriguer les climatologues… L'hypothèse d'un changement d'obliquité de la Terre ayant été éliminée, seule une diminution de la concentration en CO2 de l'atmosphère a paru plausible aux spécialistes. Quelle peut être la cause de cette diminution du CO2 atmosphérique ? Les auteurs de cette publication montrent que la dislocation du super continent Rodinia a pu, à elle seule, avoir provoqué un refroidissement majeur de la planète.
En effet, il y a 800 millions d'années, à l'ère du néo-Protérozoïque, les continents de la planète étaient groupés en un super continent, la Rodinia, centré sur l'équateur et s'étendant des latitudes 60° nord à 60° sud. La Rodinia commence à se fracturer dès cette époque, probablement du fait d'une activité volcanique importante, et les blocs continentaux, qui vont donner naissance aux continents actuels, se dispersent le long de l'équateur. Cet événement majeur s'accompagne d'une part de l'ouverture d'océans et de bras de mer, créant de nouvelles sources d'humidité à proximité des continents, et d'autre part d'éruptions volcaniques créant d'importants épanchements basaltiques à la surface des continents. L'augmentation des précipitations et du ruissellement sur les continents entraîne alors une dissolution accrue de l'ensemble des roches continentales, y compris des surfaces basaltiques. Or, les surfaces basaltiques, quand elles s'érodent sous l'effet de l'humidité, consomment 8 fois plus de carbone qu'une même surface granitique. On observe alors une chute du CO2 atmosphérique déposé in fine sous forme de carbonates sédimentaires au fond des océans. Cette réaction en chaîne va donc provoquer un refroidissement de l'atmosphère, résultat attendu d'une diminution du CO2 atmosphérique.
A partir de l'ensemble de ces données géochimiques et géophysiques, l'outil de modélisation GEOCLIM, mis au point dans le cadre du programme interdisciplinaire du CNRS ECLIPSE-1 (3), permet d'estimer quantitativement le climat et la teneur en CO2 atmosphérique (2) et ainsi de reconstituer précisément le scénario d'entrée en glaciation.
Le fractionnement de la Rodinia et l'augmentation des précipitations et du ruissellement aurait provoqué dans un premier temps une baisse de la température globale d'environ 8 °C. En tenant compte de l'érosion des surfaces basaltiques, estimées à 7 millions de km2, et de l'apparition de calottes glaciaires jusqu'à 30° de latitude, la teneur en CO2 atmosphérique serait alors descendue jusqu'à un seuil critique où le climat, devenu instable, se serait refroidi brutalement, perdant environ 50°C au total et initiant une glaciation « boule de neige » aux alentours d'il y a 750 millions d'années.
Les auteurs de l'article présentent donc un scénario simple de l'occurrence d'une glaciation globale au cours du néo-Protérozoïque, qui serait la conséquence naturelle du fractionnement de la Rodinia aux moyennes et basses latitudes. Ce scénario permet par ailleurs de comprendre pourquoi de telles glaciations ne se sont pas renouvelées au cours des derniers 570 millions d'années, marqués entre autres par l'apparition de la vie multicellulaire, une configuration exclusivement équatoriale des continents ne s'étant plus jamais reproduite.
Outil novateur, le modèle GEOCLIM pourra aussi être utilisé pour expliquer d'autres événements climatiques plus récents.
Notes :
(1) Yannick Donnadieu et Gilles Ramstein, Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement, CNRS-CEA, Gif-sur-Yvette ; Yves Goddéris et Anne Nédélec, Laboratoire des Mécanismes et Transferts en Géologie, CNRS-Université Paul Sabatier-IRD, Toulouse ; en collaboration avec Joseph Meert, Université de Floride, USA.
(2) Aucune méthode expérimentale ne permet de mesurer ces valeurs il y a 750 millions d'années. Les mesures effectuées sur les carottes polaires permettent de remonter au climat et à la teneur atmosphérique en CO2 d'il y a 800 000 ans au maximum.
(3) Site du programme ECLIPSE : Consulter le site web
Références :
A « snowball Earth » climate triggered by continental break-up through changes in runoff. Yannick Donnadieu, Yves Goddéris, Gilles Ramstein, Anne Nédelec & Joseph Meert. Nature, Paru le 18 mars 2004.