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[center]Victimes de surpêche, les populations de requins diminuent de manière dramatique[/center]
LE MONDE | 30.01.07 |
Si les captures de requins de toutes espèces continuent au rythme actuel, on risque, dans quelques années, de ne plus voir glisser dans les océans les silhouettes profilées de ces prédateurs.
Shark Alliance (qui regroupe plus de vingt associations non gouvernementales luttant pour la survie des requins) et l'Association pour l'étude et la conservation des sélaciens ont tiré, lundi 29 janvier, la sonnette d'alarme au Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) pour dénoncer une situation jugée catastrophique.
En raison de prélèvements excessifs effectués depuis plusieurs décennies, le nombre de requins pêchés en Europe, par exemple, a diminué de 66 %, a expliqué Bernard Séret, spécialiste des requins à l'Institut de recherche pour le développement et au MNHN. Un phénomène qui va s'accentuer, car ces poissons cartilagineux se reproduisent lentement. La disparition de ces grands carnivores aura de graves répercussions sur l'équilibre des écosystèmes océaniques. Situés en haut de la chaîne alimentaire, ils jouent en effet - avec les thons et les espadons - un rôle important dans la régulation des populations de leurs proies. Les prélèvements effectués par l'homme sont énormes : plusieurs dizaines de millions de tonnes par an. Souvent pêchés de manière indirecte par les longues lignes et les immenses filets dérivants des navires hauturiers, ces poissons sont tout de même appréciés pour leur chair, l'huile de leur foie et leurs ailerons, dont la demande explose dans les pays asiatiques. Lors des captures artisanales, les pêcheurs prélèvent les ailerons et jettent le reste de l'animal. Ce qui représente un gaspillage énorme.
MARCHÉ DES AILERONS
Même si des pays asiatiques comme l'Indonésie, Taïwan et l'Inde restent en tête des pêches mondiales, l'Union européenne a sa part de responsabilité dans la baisse significative du nombre de requins, estime Shark Alliance. L'UE est en effet un acteur important dans le commerce international des requins et sa participation au marché mondial des ailerons de Hongkong est en augmentation.
En Europe, les principaux pays "producteurs" sont l'Espagne qui a pêché 51 000 tonnes de requins en 2004 (sur un total européen de 114 000 tonnes), la France (21 600 tonnes), le Royaume-Uni (16 000 tonnes) et le Portugal (12 000 tonnes).
Les associations de protection des requins reprochent à l'UE - qui pourrait jouer un rôle d'exemple - d'imposer peu de limitation des captures de requins dans les eaux communautaires. Un plan de gestion de la pêche des requins a bien été promis, mais n'a jamais été réalisé. Par ailleurs, l'Europe a interdit en 2003 le prélèvement des seules nageoires de ces poissons à bord des bateaux de l'UE. Une interdiction contournée, car des permis de pêche peuvent être délivrés pour stocker séparément les ailerons et les carcasses.
La France a sa part de responsabilité dans ce gâchis de la biodiversité. Les requins les plus consommés sont la petite roussette, l'aiguillat commun, l'émissolle et le requin-taupe. Sur l'étal des poissonniers, les trois premières espèces apparaissent sous le terme de saumonette, et la quatrième sous le nom de veau de mer. Ce qui n'indique en rien leur appartenance au monde des requins.
Christiane Galus