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Message Publié : 01 Oct 2004, 08:17
par pelon
a écrit :
Chômage et RMI en pleine croissance
Près de 2,5 millions de demandeurs d'emploi et plus d'un million de RMistes: malgré les discours sur le social, le gouvernement a échoué.


Par François WENZ-DUMAS
vendredi 01 octobre 2004



la croissance est là. Pourtant le chômage augmente toujours : + 0,5 % en août. Cela représente 2 453 100 demandeurs d'emploi, 2,2 % de plus qu'il y a un an. On objectera qu'il avait baissé de 0,5 % en juillet et que les statistiques d'un mois d'été sont peu significatives, les fameuses corrections des variations saisonnières (CVS) ne parvenant pas toujours à gommer les effets de calendrier. Selon les années, les nouveaux demandeurs s'inscrivent à l'Agence pour l'emploi fin août ou septembre. Mais les faits sont là : le chômage ne baisse pas.

Plus grave : le nombre de chômeurs de longue durée, ceux qui sont inscrits depuis plus d'un an à l'ANPE, a augmenté plus vite encore : + 0,2 % en un mois, + 2,5 % en un an. Et une étude publiée mercredi par la Drees (service statistique du ministère de la Santé et de la Protection sociale) montre qu'entre le 1er juillet 2003 et le 30 juin 2004 le nombre d'allocataires du RMI a explosé : + 10,5 %. Au début de l'été, ils étaient 1 039 300 (en données CVS) à vivre avec moins de 418 euros par mois. Un record absolu depuis la création de cette allocation par Michel Rocard en 1989. Ce constat dramatique pourrait donner raison à Jean-Louis Borloo, qui ne cesse de répéter que le vrai problème est celui «du chômage structurel et de l'exclusion qui l'accompagne». Le ministre délégué aux Relations du travail, Gérard Larcher, a aussitôt expliqué que cette hausse du chômage rendait «encore plus nécessaire la mise en place effective, rapide, du plan de cohésion sociale».

Aubaine. Hier, le président de la République est venu en personne à la Mutualité expliquer combien il soutenait l'action de son ministre de l'Emploi (lire page 8). Jean-Louis Borloo y avait réuni les représentants de l'ensemble des administrations pour leur expliquer son plan de cohésion sociale. La philosophie qui inspire ce plan est simple : ce n'est pas le sous-emploi conjoncturel qui menace la société française mais le chômage structurel, celui qui provoque l'exclusion d'une partie de la population. Il ne servirait donc à rien de mettre au point des dispositifs antichômage compliqués : seule la croissance économique fera baisser la courbe. Mieux vaut miser sur l'insertion et se concentrer sur les quartiers difficiles, les jeunes sans qualification, les exclus, sans trop se préoccuper de ceux qui peuvent espérer revenir rapidement sur le marché du travail.

François Fillon avait misé sur des dispositifs de baisse ciblée du coût du travail. Le retour plus tardif que prévu de la croissance est venu enrayer cette belle mécanique. Dans un marché du travail déprimé, les allègemennts Fillon n'ont pas servi à grand-chose. Et les 160 000 contrats jeunes en entreprise qui ont été signés depuis leur création il y a deux ans doivent beaucoup à l'effet d'aubaine. Pourquoi embaucher quelqu'un de plus 23 ans quand on est exonéré de charges s'il en a 22 ?

Bons sentiments. Dans le même temps, les emplois-jeunes de Martine Aubry ont été abandonnés. Ils n'ont pas été renouvelés quand ils arrivaient à échéance, au bout de cinq ans. Ce n'est pas un hasard si le nombre de demandeurs d'emploi de moins de 25 ans a augmenté de 0,4 % le mois dernier et de 6,4 % en un an. Pour les plus précaires, Fillon avait quand même évité le pire en préservant discrètement le volant de CES (contrat emploi-solidarité) dont disposait son prédécesseur, Elisabeth Guigou. Une façon de faire du traitement social du chômage sans le dire. Malgré cela, il y a bien eu, selon le commentaire du socialiste Gaétan Gorce, «une réduction spectaculaire des crédits consacrés aux emplois aidés en 2004». Et cette réduction est «directement responsable de la suppression de 60 000 emplois cette année». Le ministre de l'Emploi «ne peut pas faire une bonne politique de l'emploi uniquement avec de bons sentiments», ajoute le député de la Nièvre. Surtout si malgré les louables intentions affichées par Borloo le financement du plan de cohésion sociale ne suit pas (lire ci-contre).

L'affaire des «recalculés» montre qu'en matière de chômage les fausses manoeuvres se paient cher. A partir de janvier, la réduction de la durée d'indemnisation a basculé plus de 300 000 chômeurs de longue durée qui touchaient les Assedic dans le RMI. En mai, le rétablissement de leurs droits les a remis provisoirement dans le régime d'assurance chômage. A l'arrivée, le nombre de RMistes explose et celui des chômeurs indemnisés aussi : + 0,3% en août.

Pour ces chômeurs de longue durée, il faut souhaiter que les nouveaux «contrats d'avenir» et «contrats d'accompagnement dans l'emploi» prévus par le plan Borloo pour remplacer les autres dispositifs d'insertion soient rapidement opérationnels. Si ce n'est pas le cas, ce plan risque de se révéler un dangereux exercice d'apprenti sorcier.

http://www.liberation.fr/page.php?Article=242714



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