La gauche peut-elle tirer des leçons du brésil ?

Message par faupatronim » 20 Jan 2003, 15:34

• LE MONDE | 20.01.03 | 12h31

La gauche peut-elle tirer des leçons du modèle brésilien ?

Luiz Inacio "Lula" da Silva, élu président du Brésil le 27 octobre 2002, a constitué un gouvernement allant des mouvements trotskistes aux sociaux-libéraux. En France, la question des alliances et d'une candidature unique à l'Elysée divise toujours l'opposition.

"Une seule gauche au Brésil et deux à Paris ?": cette petite musique prend des allures de scie au siège du Parti socialiste français, rue de Solférino. Pour plusieurs hauts responsables du PS, l'élection de Luiz Inacio "Lula" da Silva à la présidence de la République, le 27 octobre 2002, n'est pas seulement une bonne nouvelle pour la gauche en général qui mérite d'être saluée comme il se doit.

Elle offre aussi un argument politique de choix à destination de la gauche radicale et hexagonale.

C'est Jean-Christophe Cambadélis, proche de Dominique Strauss-kahn et inventeur du concept de "gauche plurielle", qui a tiré le premier. " Comment peut-on dire, pas de participation au gouvernement, sauf si celui-ci adopte un programme de rupture anticapitaliste, en France, comme l'a fait Olivier Besancenot dans une tribune récente à Libération, et le faire au Brésil ?", feint de s'interroger M. Cambadélis. Et de remarquer que la composition du gouvernement de Lula, s'il était transposé en France, irait de la LCR aux sociaux-libéraux.

"COMME MITTERRAND EN 1981"

De là à faire de la recette brésilienne un modèle pour une recomposition de la gauche en France, il n'y a qu'un pas que M. Cambadélis n'est pas loin de franchir. " Le cas Lula porte une interrogation pour toute la gauche et notamment pour l'extrême gauche", estime-t-il, en pointant " les difficultés stratégiques de la LCR". Pour M. Cambadélis, cette dernière, "en panne de partenaire, tente de s'adresser aux oppositions dans chaque composante de la gauche plurielle, tout en continuant à dire qu'il y a deux gauches infongibles. C'est peu compréhensible. Il y a matière pour elle à réfléchir, au Brésil". Le premier secrétaire du PS se veut plus prudent. Pour François Hollande, on ne peut employer le terme de modèle brésilien. " En revanche, explique-t-il,le processus qui a permis la victoire de Lula est intéressant. La gauche brésilienne était plutôt éclatée, sans culture de coalition, mais avec une culture de compétition. Et c'est la présidentielle qui provoque le rassemblement de la gauche au Brésil, comme Mitterrand l'avait fait en 1981. Nous, nous avons fait l'inverse en jouant le rassemblement à partir des législatives, en 1997 et en 2002." L'affaire brésilienne porterait en germe une réflexion sur une candidature unique de la gauche à l'horizon 2007. Le numéro un du PS d'insister sur le fait que, pour l'emporter, Lula a mis de l'eau dans son vin. " C'est sa posture trop à gauche qui l'avait empêché de l'emporter lors de ses précédentes tentatives", assure M. Hollande. Du coup, le Parti socialiste est parfois tenté de s'approprier "l'ami Lula". Rue de Solférino, on bataille désormais ferme pour faire entrer le Parti des travailleurs brésilien au sein de l'Internationale socialiste. " Ils sont arrivés à concilier l'engouement de 1981 et le réalisme de 1983 -date du tournant vers la rigueur-", s'exclame, admiratif, Régis Passerieux, membre du secrétariat national du PS.

PAS TRANSPOSABLE EN FRANCE

Cet activisme brésilien de la Rue de Solférino commence à provoquer des remous. Si Jean-Luc Mélenchon, qui coanime avec Henri Emmanuelli le courant Nouveau Monde au PS s'en amuse– "le modèle d'un gouvernement allant de Bayrou à Krivine n'est pas vraiment transposable en France", estime-t-il —, d'autres commencent à s'agacer. " Ce n'est pas du tout la même réalité", insiste la secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet. " On n'aura jamais un truc comme cela en France", soutient Alain Lipietz, député Vert européen, qui tire une leçon différente de la victoire de Lula. " Il a gagné en étant en prise sur les mouvements sociaux et s'est construit une image internationale à partir de Porto Alegre", explique-t-il. En revanche, à l'instar du PS, Noël Mamère, député Vert, retient, pour enseignement, que " l'extrême gauche brésilienne ne rejette pas l'expérience gouvernementale".

Evidemment, du côté de la Ligue communiste révolutionnaire, cela agace. " Ce n'est pas la France de 1981, le Chili de 1973 ou je ne sais quoi, mais le Brésil de 2003", s'énerve Olivier Besancenot, porte-parole de la LCR. " Lula, à la différence des sociaux-démocrates européens, est sensible à la pression populaire", explique pour sa part Daniel Bensaïd qui se dit " encore traumatisé par les débats des années soixante-dix où l'on raisonnait sur l'Amérique latine par analogie avec ce qu'on connaissait en Europe". Or, indique-t-il, " cela n'a rien à voir. C'est un gouvernement de crise dans une situation instable". Et d'ajouter : " Le parti brésilien des travailleurs, notre courant a contribué à le construire. C'est difficile de se dérober au moment de la prise de responsabilité, même si, personnellement, je suis plutôt réticent sur notre participation gouvernementale là-bas." Pour François Sabado, membre de la direction de la LCR, " la question n'est pas tant celle de la participation au gouvernement, mais de la politique qui va être menée". Il poursuit : "La nomination de Rosetto au ministère de la réforme agraire a très bien été accueillie par le mouvement des paysans sans-terre. Ce dossier est pour nous déterminant, comme l'est celui de la ZLEA, ce projet de zone de libre échange sous domination américaine, que Lula a toujours dénoncée." De toute façon, assure Christophe Aguiton, " Rosetto n'est pas Gayssot. C'est plus un Chevènement dans sa manière de gérer ses éventuels désaccords gouvernementaux. Si cela ne va pas, il partira".

Et la LCR d'affirmer qu'il n'y aura en aucun cas de jurisprudence brésilienne, n'en déplaise au PS. "Lula", rassembleur de la gauche au Brésil, échoue pour le moment dans l'Hexagone.

Caroline Monnot
faupatronim
 
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Message par emma-louise » 20 Jan 2003, 15:40

l'ironie et le cynisme des campbadélis et mélanchon ravissent la presse tant mieux ça nous incite à réagir et à empécher les dérives :bounce: :bounce: :bounce:
emma-louise
 
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