Ils ont déjà manifesté contre M. Raffarin

Message par faupatronim » 31 Mars 2004, 15:39

(Le Monde @ 31 mars 2004 a écrit :
Ils ont déjà manifesté contre M.  Raffarin, ils sont prêts à se remobiliser



Réformes du système de santé, décentralisation des personnels de l'éducation nationale, budget de la recherche, politique pénale... Les porte-parole des mouvements qui ont contesté le gouvernement ces derniers mois espèrent de nouvelles réponses et affichent leur détermination.

Comment la reconduction de Jean-Pierre Raffarin est-elle accueillie par ceux qui ont contesté ses décisions et ses méthodes ? Les porte-parole des différents mouvements qui ont défilé et pétitionné contre le gouvernement reviennent sur les conflits de ces deux dernières années et annoncent d'autres mobilisations.

# POLITIQUE SOCIALE
"La pression est là"

Alain Olive, secrétaire général de l'UNSA : "Le conflit de la réforme des retraites a montré une incompréhension entre une partie des salariés, de l'opinion publique et le gouvernement ; à la fois sur la forme et sur le fond. Et, à partir de la question des retraites et de celle de la décentralisation des personnels techniques et ouvriers de l'éducation nationale, la situation s'est dégradée. Parallèlement à cette politique sociale, le gouvernement a décidé de baisser les impôts, d'aider les restaurateurs... Quand on dit aux fonctionnaires qu'on ne peut pas les augmenter et qu'on donne 1,5 milliard d'euros aux restaurateurs, il y a une contradiction difficile à expliquer. Raffarin III ne doit pas répéter Raffarin II en matière de politique sociale, d'emploi, de rigueur salariale. Sur l'assurance-maladie, tout le monde peut comprendre qu'il faille faire des efforts. A condition qu'ils soient partagés et amènent à plus de justice.

Nous souhaitons que les revendications du Medef, qui prône la déréglementation et la flexibilité du travail, ne soient pas suivies. Et, vu son attitude ultralibérale, nous ne voyons pas comment nous pourrions conclure un accord avec lui.

Pour aborder les réformes à venir, le gouvernement n'est pas dans une position excellente. Il ne s'agit pas d'organiser un troisième tour social, mais la pression est là. Et, lors de la journée européenne de manifestations pour les droits sociaux et l'emploi, le 3 avril, il devrait y avoir du monde."
# CHÔMEURS
"Nous préparons des propositions"

Charles Hoareau, responsable de la CGT chômeurs, à Marseille : "Le gouvernement ne peut pas avoir été confronté à un mouvement social comme celui du printemps 2003 et ne pas subir un rejet. La remise en cause des acquis sociaux a été plus forte même qu'en 1993, avec Edouard Balladur. J'ai vu des chômeurs "recalculés" qui votaient traditionnellement à droite et qui n'ont pas voulu aller voter pour le gouvernement.

Je n'attends rien d'un nouveau gouvernement de droite qui va continuer à faire une politique de droite. Mais la déculottée du 28 mars peut donner du tonus aux gens. Par exemple, un conseil général peut décider de ne pas appliquer le revenu minimum d'activité (RMA). Les mouvements de chômeurs demandent à ces collectivités de ne pas appliquer cette mesure de droite, ce cadeau pour le patronat. Face au nouveau gouvernement, notre capacité à construire un rapport de forces va être déterminante. Cela dépendra de la crédibilité des formes d'action proposées. Les élections ne suffiront pas à faire reculer le gouvernement sur l'assurance-chômage. Nous préparons, avec les autres associations de chômeurs, des propositions telles que la création d'un revenu de remplacement assuré par une caisse nationale de protection pour les personnes en quête d'emploi. Et l'organisation d'une journée nationale d'action, le 15 avril, doit constituer un nouveau rendez-vous pour la lutte des chômeurs.
# HOSPITALIERS
"On ira à l'affrontement"

Patrick Pelloux, président de l'Association hospitalière des médecins urgentistes :"Avec l'expression "France d'en haut, France d'en bas", Raffarin a utilisé un très mauvais vocabulaire. Pendant la canicule, la France d'en bas a eu beaucoup de mal à faire comprendre à celle d'en haut qu'elle souffrait et était en difficulté. Au-delà de cet événement, il existe une crise identitaire majeure du monde hospitalier. Ce n'est pas un conflit traditionnel parce qu'il n'est pas possible de troubler l'activité des établissements de santé et la prise en charge des patients. Le gouvernement en joue pour faire croire que tout va bien et ridiculiser ceux qui disent que tout va mal. Actuellement, il se berce d'illusions sur le pseudo-accord obtenu pour la réforme "Hôpital 2007". Derrière tout cela, on assiste à un simulacre de dialogue social sur l'assurance-maladie avec une volonté dogmatique de tout casser et de privatiser. Si Raffarin se maintient à la tête du gouvernement avec l'ambiguïté de vouloir privatiser le système de santé, ce sera très rude, on ira à l'affrontement. Le premier ministre aurait tort de croire qu'il pourra réformer l'assurance-maladie comme il veut. Les Français ont besoin de plus de solidarité, d'une économie au service de l'homme et non le contraire. La première chose que nous demandons, c'est le retrait total d'"Hôpital 2007" et de la nouvelle gouvernance qui signent le début de la privatisation de l'hôpital, mais aussi la remise à zéro des compteurs pour l'assurance-maladie. Il faut un service public plus efficace, plus efficient mais avec une garantie de solidarité. Il s'agit d'un choix de société majeur."
# ENSEIGNANTS
"M. Raffarin doit faire ses preuves, d'urgence"

Gérard Aschieri, secrétaire général de la FSU : "Je pense que M. Raffarin a besoin d'apporter les preuves de sa volonté de changement. Jusqu'à présent, il a affiché une volonté de dialogue social, mais la pratique s'est avérée assez contradictoire.

Nous avons eu assez peu de relations avec lui sur les questions d'éducation, bien que nous ayons demandé à le voir au printemps 2003, au milieu du conflit. Il a délégué d'une part Luc Ferry, d'autre part Nicolas Sarkozy et Jean-Paul Delevoye pour gérer la crise. Ce n'est qu'en août, bien après les grèves, qu'il a reçu les syndicats pour nous dire tout l'intérêt qu'il portait à l'éducation. Mais, quelques mois plus tard, des coupes claires ont frappé ce secteur, plus graves encore que celles de l'année précédente.

Globalement, le gouvernement précédent a négligé les questions d'éducation. Il faut que le premier ministre montre qu'il comprend les enjeux de l'éducation et de la recherche. Les moyens nécessaires impliquent des réponses d'urgence. Je ne suis pas sûr que le premier ministre ait perçu les enjeux de société. Je me rappelle son discours d'investiture. Il évoquait "le pari de l'humanisme" mais, déjà, ne parlait pratiquement pas d'éducation. C'est contradictoire.

M. Raffarin doit faire ses preuves, d'urgence. Y compris sur la question des retraites, traitée avec une grande brutalité, sans dialogue. Pour nous, le dossier doit être rouvert avec sans doute une priorité : la question des femmes. De la même façon, les résultats des régionales nous renforcent dans l'idée qu'il faut remettre en cause les transferts des personnels de l'éducation nationale décidés dans le cadre de la décentralisation."
# CHERCHEURS
"Travailler enfin sérieusement..."

Alain Trautmann, porte-parole du collectif Sauvons la recherche : "On entend depuis dimanche soir : "Nous avons mis en chantier de bonnes réformes, mais elles ont été mal comprises et nous devons faire un effort pédagogique pour les faire passer.''Comme si les Français étaient des mauvais élèves... Nous, chercheurs, nous disons que le choix de baisser les impôts, les charges pour les restaurateurs, etc. et, au même moment, de sacrifier la recherche ne peut être présenté sérieusement comme une -réforme''. Nous espérons que le premier ministre va enfin entendre que ce que nous demandons n'est pas le statu quo mais une nouvelle politique pour la recherche et l'enseignement supérieur. Nous refusons l'idée que le progrès et le développement de notre pays doivent passer par plus de précarisation. La recherche peut très bien se développer sans pour autant sacrifier les personnes et en particulier les jeunes. Les postes que nous demandons ont maintenant valeur de symbole. La réponse sur ce point indiquera si le gouvernement compte réformer le système avec les chercheurs ou contre eux.

Un refus serait interprété par des chercheurs, très déterminés et dopés par les événements des dernières semaines, comme un mépris insupportable. L'électrochoc du 28 mars peut constituer l'occasion pour le gouvernement de prendre les décisions qui permettront d'arrêter ce conflit et de travailler enfin sérieusement à l'avenir de la recherche, en particulier grâce au grand débat national que constitueront les états généraux de la recherche et de l'enseignement supérieur. Nous avons l'espoir que le nouveau gouvernement prendra cette sage décision."
# INTELLECTUELS
"Comme dans un show de télé-réalité..."

Sylvain Bourmeau, journaliste aux Inrockuptibles, initiateur de l'"Appel contre la guerre à l'intelligence": "Les résultats des régionales traduisent, comme ceux de la présidentielle de 2002, la profonde crise de crédibilité des politiques, l'incapacité des élus à articuler leurs discours et leurs actes avec les mouvements qui traversent la société.

Je n'en fais pas une attaque personnelle contre Jean-Pierre Raffarin. Son maintien à Matignon n'est pas le problème. La crise que nous traversons n'est pas une question d'homme, mais de système. Après une telle gifle électorale, il me paraîtrait naturel de provoquer une dissolution de l'Assemblée nationale. Ce qui est plus inquiétant, c'est la mission qui vient d'être assignée au premier ministre. On lui donne "cent jours" - ou soixante-treize avant les européennes de juin - pour redresser la barre. Comme dans un show de télé-réalité ! Comme si la politique était une question d'image, et non de fond.

Sans doute, la défaite de la droite aux régionales peut modifier le rapport de forces en faveur de ceux - chercheurs, enseignants, artistes... - qui se sont mobilisés en signant l'Äppel contre la guerre à l'intelligence" -80 000 signataires-. Mais la pétition ne vise pas que le court terme. En faisant converger des luttes, on a mis en perspective des réformes, on leur a donné du sens, au lieu de traiter des dossiers de manière juxtaposée. Ce travail a été peu fait par la gauche partisane. Au final, si la mobilisation électorale a été aussi forte, c'est qu'une réflexion politique avait été menée en amont. C'est bon signe et, dans cet esprit, la pétition ne doit pas être enterrée avec le calendrier électoral."
# MAGISTRATS
"Le climat est très dégradé"

Dominique Barella, président de l'Union syndicale des magistrats (majoritaire) : "Depuis deux ans, le premier ministre n'a pas pris la dimension du rôle symbolique et institutionnel de la justice dans notre pays. Il n'a pas pris en compte le fait que la police et la justice doivent travailler dans la continuité, chacune dans leur rôle. Derrière la sécurité, on a totalement oublié la justice.

Le ministre de la justice, Dominique Perben, n'a cessé de porter des réformes pour les autres : la justice de proximité, voulue par le président de la République, et qui ne correspondait pas aux besoins de l'institution ; la décentralisation, vœu du premier ministre ; les primes au rendement souhaitées par le ministre des finances ; la loi, dite Perben 2, de lutte contre la criminalité qui est, en fait, une partie d'un projet du ministère de l'intérieur. M. Perben a perdu 90 % de ses arbitrages à Matignon, souvent au profit de Nicolas Sarkozy.

Le ministre de l'intérieur a mené des campagnes contre les juges des libertés et de la détention, accusés de ne pas assez incarcérer les personnes (notamment les étrangers), ou a produit des circulaires encourageant les responsables policiers à se plaindre du travail des magistrats.

M. Sarkozy n'a pas répondu aux problèmes de fond - la faible capacité de traitement de la justice (avec 5,5 millions de procédures reçues dans les parquets, nous atteignons un record historique), la réflexion à mener sur les peines alternatives à la prison ou la réinsertion des détenus - qui n'ont jamais été aussi nombreux.

En créant des infractions qui ne servent à rien, comme le racolage passif, on a plombé la justice au lieu d'en améliorer le fonctionnement. Malgré l'affichage d'un plan budgétaire pluriannuel, la France n'aura pas, à la fin de cette législature, une justice au niveau de ses voisins européens. Nous terminons ces deux années avec la loi Perben 2, qui va considérablement mobiliser les énergies, au détriment des moyens de la justice civile qui concerne davantage les Français. Enfin, les commentaires des responsables politiques sur la condamnation d'Alain Juppé ont été vécus, par chaque magistrat, comme une critique de son propre travail. Le climat est très dégradé dans les juridictions."

Services Culture, France, Sciences et Société

faupatronim
 
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