(Libération @ jeudi 26 février 2004 a écrit :«Ménigon donne des signes de son désespoir»
Un sénateur a rencontré en prison l'ex-Action directe en grève de la faim.
Par Dominique SIMONNOT
Hier, Robert Bret, sénateur PCF des Bouches-du-Rhône a rendu visite à Nathalie Ménigon, incarcérée à la prison de Bapaume (Pas-de-Calais). Membre d'Action directe, Ménigon, 47 ans, est condamnée à la prison à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de dix-huit ans. Victime d'accidents vasculaires cérébraux, partiellement hémiplégique, elle a demandé à deux reprises à bénéficier de la loi Kouchner qui permet aux détenus malades d'obtenir une suspension de peine. En vain, jusqu'ici. Son cas doit être réexaminé le 26 mars. En prison depuis dix-sept ans, Ménigon est en grève de la faim depuis le 16 février. Témoignage de Robert Bret.
«Je sors très marqué de cette rencontre. Le Samu était là quand je suis arrivé, car Nathalie s'était à nouveau automutilée en se coupant les bras à deux reprises aujourd'hui. Ce n'est pas seulement un geste d'appel au secours, c'est le signe de son désespoir. Elle parle d'ailleurs sans cesse de la mort. Physiquement, elle est très affaiblie, elle se traîne. Elle mesure 1,71 mètre et me dit peser 45 kg. Le directeur de [la prison de] Bapaume parle de 49 kg. En tout cas, c'est un fil de fer. Et si sa grève de la faim a commencé le 16 février, elle m'a confié que depuis longtemps elle se nourrit très peu. Mentalement, il est très difficile d'avoir avec elle une discussion cohérente. Elle parle des problèmes de la vie carcérale, puis passe à ce qu'elle fera si elle est libérée : s'occuper d'enfants, se rendre utile. Elle est aussi très préoccupée par les conditions de détention en général, mais on voit bien qu'elle est de plus en plus repliée sur elle-même, qu'elle participe de moins en moins aux activités de la détention. Elle m'a parlé, avec tristesse, des chats errants dont elle s'occupait quand elle était à Fleury-Mérogis et dont elle aimait s'occuper. Je pense que ma visite lui a fait du bien. Je lui ai demandé d'arrêter cette grève de la faim et lui ai assuré que d'autres parlementaires communistes et verts allaient se mobiliser et réfléchir à une démarche auprès du garde des Sceaux pour que lui soit appliquée la loi Kouchner. Dans son état, si sa peine était suspendue, elle sortirait pour être hospitalisée. C'est terrible car j'ai la conviction que, si le 26 mars il ne se passe rien, le pire arrivera. Elle est décidée à aller jusqu'au bout. Jusqu'au suicide.»