Le scandale de l'illettrisme par Hervé Bertho

[Valiere]

Le scandale de l'illettrisme par Hervé Bertho

Celui qui ne sait ni lire ni écrire a bien du mal à savoir qui il est. Les mots sont la clef de tout. Et l'école est aussi la clef des mots.
Ceux qui croient au ciel et ceux qui n'y croient pas utilisent les mêmes mots pour dire ce qui les anime... Leur langue, nourrie de dictionnaire et de grammaire, est la même.
Croyants, mécréants, infidèles ou dévots, que la tolérance ou la haine les animent, ils le diront dans le même langage, avec des phrases qui puisent aux mêmes sources de la pensée.
Le langage qui permet l'expression de tout et de son contraire est donc de la plus grande importance : il permet autant de se défier que de se comprendre. Et pour bien se défier, pour s'opposer en connaissance de cause, il faut d'abord bien se comprendre.
Le respect de la langue prend alors un sens bien plus fort que le seul respect des usages en vogue à un moment de l'histoire. Ce n'est pas d'orthographe mais du respect de l'autre qu'il s'agit. Et comme chacun est l'autre de l'autre, c'est du respect de soi qu'il s'agit aussi.
Il ne s'agit pas de jouer avec les mots mais de bien comprendre que nous sommes le produit de nos paroles.
Nos paroles sont des actes : dire c'est agir, dire le monde c'est le construire ; l'homme du monde est celui qui parle, le fou hors du monde ne se fait pas entendre... La parole est un lien entre sa conscience et le monde.
Et l'école qui transmet le savoir et forme le jugement doit en premier lieu enseigner la maîtrise du langage. C'est en ce sens que l'illettrisme est une grande douleur et un scandale : il prive d'humanité les enfants qui balbutient leur charabia aux portes du collège, il les condamne à des rêves bridés par le manque d'expression, il leur ferme les horizons de l'imaginaire, il les enchaîne d'ignorance et leur ôte la liberté de dire et de se défendre. Privés de la liberté de se dire qui ils sont, ils sont condamnés à subir un sort qui leur échappe... Alors vive le soutien scolaire.
Les mots permettent aussi de dire ce qui n'existe pas : ils rendent possible le mensonge comme l'illusion... La sagesse commanderait alors de taire ce que l'on ne peut pas dire mais le bavardage des illusions ne tarit pas. Car les mots sont notre essence humaine. Le verbe haut est celui de la liberté. La liberté est d'abord la liberté de penser donc de parler, d'avoir le choix entre vérité et mensonge. Il suffit de se rappeler, au frontispice du plus vieux des livres : au commencement était le verbe.

[yannalan]

  Il suffit de se rappeler, au frontispice du plus vieux des livres : au commencement était le verbe.

Les cathos ont quand même un sacré culot !

La citation est extraite du dernier évangile du Nouveau Testament.
C'est très loin d'être "le plus vieux des livres". Les latins, grecs, chinois etc... avaient déjà une littérature depuis longtemps ! Sans parler de la Bible !

[Valiere]

Ouest France est un journal catholique, ce texte fait référence à l'évangile, certes mais ce texte montre bien les enjeux de la lutte contre l'illettrisme! non!

[Ottokar]

ce n'est pas que Ouest France cite la Bible qui a choqué je pense, c'est le fait qu'un forumeur, Valière, le fasse... du moins c'est ainsi que le premier post apparaissait. Et quand on lit presque tous les fils et qu'on sait que ledit Valière est un laïque professionnel... on a eu peur qu'il soit devenu confessionnel ! :D