La Gauche que nous voulons

Message par Louis » 13 Juil 2003, 21:11

Nous sommes des citoyennes et citoyens, élus locaux, militantes et militants politiques, associatifs ou syndicaux. Nous sommes résolument à gauche. Notre engagement trouve d’abord sa raison d’être dans le refus absolu de laisser des millions de femmes et d’hommes en situation de souffrance, et dans la conviction que la politique peut et doit changer cette réalité.
“ Doux rêveurs”, nous ne voulons toujours pas que les richesses produites par le plus grand nombre se transforment en profits colossaux pour quelques uns. “ Utopistes entêtés ”, nous affirmons toujours qu’il faut changer la vie et pas seulement ceux qui gouvernent. “ Eternelles et éternels féministes ”, nous ne supportons pas que les femmes soient en première ligne de l’exclusion, des atteintes à la dignité, et que le droit à disposer librement de son corps soit chroniquement remis en cause. “ Incorrigibles internationalistes ”, nous voulons la mondialisation de la démocratie, du droit à l’éducation, de la protection de l’environnement, de l’accès à l’eau, de la lutte contre le sida, de l’éradication de la faim.
C’est un tout autre monde dans lequel nous entrons. Un monde sauvage qui veut faire tomber des pans entiers de ce qui a fondé une civilisation de progrès. Partout, les forces conservatrices ne sont jamais allées aussi loin dans la tentative d’imposer un nouvel ordre économique, social, moral. Les politiques mises en œuvre s’apparentent à une entreprise de démolition systématique des conquêtes populaires. Qu’il se nomme ultra-libéral ou néo-capitaliste, ce rouleau compresseur est aussi celui des esprits en prenant systématiquement pour cibles ce que le Front populaire, la Libération, les luttes anti-coloniales, l’indépendance des peuples, Mai 68 ont donné de meilleur à notre pays, à l’évolution du monde, et au mouvement des idées.
Face à cette volonté de placer l’ensemble des rapports humains dans des logiques de marché et de domination et d’anéantir tout esprit critique, nous affirmons que les échecs des grandes utopies du vingtième siècle, ceux du communisme comme de la social-démocratie, n’ont pas anéanti la capacité de l’humanité à imaginer un autre monde possible, et à le construire dès maintenant en mettant la transformation des rapports sociaux au centre de notre projet. Ni la chute du mur de Berlin, ni l’électrochoc du 21 avril 2002 ne nous conduisent à faire table rase de valeurs et d’idées qui peuvent fonder de grandes espérances.
C’est parce que nous portons en nous tous ces entêtements viscéraux que nous ne sommes pas surpris de ce qui est arrivé hier à la gauche ex-plurielle. Loin de constituer un accident conjoncturel, le KO du 21 avril a été l’aboutissement d’une longue marche jalonnée par des abandons. Abandon du sens de la gauche, abandons de ceux pour qui elle existe en priorité : les “ petits ”, les humbles, les “ sans ”, le monde ouvrier et créatif. Cette gauche “ mal à gauche ” pense alternance quand le mouvement social attend d’elle qu’elle porte une alternative.
Depuis plus de vingt ans, ce cycle d’une gauche qui déçoit, d’une droite qui aggrave et d’une extrême droite qui prolifère se répète à l’envi.
En réalité, il faut bien reconnaître que les ruptures ou tentatives de rupture de société les plus significatives, mais aussi les plus régressives, c’est la droite qui en est à l’origine. Comme en 1986 avec la primauté redonnée au droit du sang sur le droit du sol. Ou en 1995 avec la volonté de faire éclater la Sécurité Sociale. Ou aujourd’hui encore avec les assauts du gouvernement contre les retraites et l’Education nationale.
Chaque fois que la gauche renonce à ses fondamentaux, renie ses engagements, refuse de s’attaquer nettement à toutes les formes de domination et d’oppression, la droite en tire profit pour aller plus vite et plus loin dans une société plus dure, plus violente, plus inégalitaire.
Malheureusement, nous n’avons pas relevé lors des congrès du PS, du PC et des Verts le début d’un sursaut, d’une mise à plat historique, d’une recherche critique sincère. La cécité a une fois encore prévalu et les guerres d’appareil ont pris le dessus sur l’analyse et les propositions de fond. C’est consternant, mais c’est ainsi.
C’est cette faillite répétitive des appareils des partis de la gauche, leur incapacité devenue structurelle à associer les couches populaires à toute perspective de transformation sociale, qui nous décident aujourd’hui à prendre cette initiative. Nous pensons qu’il est temps de jeter les bases d’un réseau alternatif à gauche sur des contenus qui ne soient ni un prêchi-prêcha protestataire n’offrant jamais aucun possible, ni un habillage du libéralisme. Par-delà les différences des parcours qui sont les nôtres, par-delà nos choix individuels de pérenniser ou non notre appartenance à des partis existants, nous partageons un certain nombre d’urgences, de choix radicaux pour penser qu’un autre monde est possible et pour y travailler sans attendre. Pour nous, comme pour un nombre croissant d’hommes et de femmes de par le monde, il convient de revenir aux sources originelles de la gauche. Non pour singer l’itinéraire du mouvement ouvrier de Marx à Jaurès, mais pour régénérer la notion de progrès.
La radicalité de nos rêves et de nos espoirs se nourrit aussi de ce que nous avons appris de l’histoire. Les échecs du communisme et de la social-démocratie ne se réduisent pas aux dérives staliniennes d’un côté, et aux reniements répétés de l’autre. Ces échecs trouvent aussi leur cause profonde dans une incapacité à produire une culture du rapport aux pouvoirs qui ne soit pas fondée sur l’autoritarisme, l’arbitraire, l’élitisme, la misogynie, la méfiance à l’égard des différences, la médiocrité, l’exaltation du sacrifice individuel, la tentation permanente de décider à la place des autres.
Nous voulons promouvoir une nouvelle culture militante en phase avec les aspirations d’une humanité émancipée, fondée sur la libre confrontation des idées, l’épanouissement personnel, la parité, la valorisation des diversités, la démocratie participative, l’éthique, la sincérité, la fraternité, la liberté.
Cette volonté transformatrice, qui porte autant sur la nécessité de s’attaquer au capitalisme que de travailler à l’émergence d’un nouveau monde, est déjà portée par les mouvements sociaux, par des expériences locales, par des travaux intellectuels et des pratiques militantes . Ce foisonnement de contestations de l’ordre établi doit déboucher, cette fois, sur un changement de politique répondant aux attentes de toutes celles et tous ceux qui n’aspirent qu’à une vie digne.
C’est ce qui motive notre engagement. Nous sommes en effet convaincus qu’une mobilisation sociale se cantonnant à affirmer son autonomie vis à vis du politique revient, de fait, à déléguer aux partis existants le monopole du politique, et à l’échéance électorale le seul moment de son expression. Nous devons sortir de ce schéma qui conduit invariablement à des déconvenues . Nous pensons qu’il est temps de remettre en cause le dogme de la séparation entre le mouvement social et l’intervention politique. Quand, partout dans le monde, des femmes et des hommes luttent ensemble pour le droit au travail, au logement, à l’éducation, à la culture, à l’accès égal aux traitements du sida, pour l’annulation de la dette des pays pauvres, le commerce équitable, la paix, le respect du droit international ; quand ces femmes et ces hommes refusent les OGM, la mal-bouffe, le saccage des territoires, quand l’arrogance des puissants et des riches à prétendre imposer leurs règles à la planète met des millions de gens dans les rues, il est vraiment temps de remettre en cause la distribution des rôles entre acteurs sociaux et acteurs politiques. De penser la politique autrement. De concevoir le moment électoral au service de ces causes justes et non l’inverse. Il est vraiment temps de constituer un réseau ayant la volonté de sortir des sentiers battus et rebattus pour s’essayer à la construction d’une alternative politique .
Par cet appel, nous nous engageons dès à présent sur des objectifs qui identifient une véritable alternative à gauche :
- la relance économique, indissociable du progrès social, passe par une augmentation significative des bas salaires, des minima sociaux et de la consommation populaire.
- Nous ne concevons pas l’Europe comme une machine à contraintes et un carcan monétariste, mais bien comme un espace de solidarités sociales et de coopérations.
- Nous nous prononçons pour l’annulation sans condition de la dette des pays pauvres et pour la taxation des transactions financières.
- Nous affirmons que les banlieues ne sont pas confrontées à des problèmes périphériques mais qu’elles sont au cœur de la société et des changements à opérer en construisant massivement des logements sociaux, en développant les services publics, en se saisissant de la diversité comme une chance et non en la stigmatisant comme un handicap, en consacrant des moyens considérables aux politiques de prévention, d’éducation, de tout ce qui favorise le “ vivre ensemble ”.
- Nous sommes convaincus que la priorité qui doit être donnée à des mesures d’une très grande ampleur en faveur de tous les “ sans ” est d’intérêt général et marquera un progrès de la société dans son ensemble.
- Nous nous prononçons pour l’adoption immédiate de lois instaurant le droit de vote des résidents étrangers, la régularisation des sans papiers, la reconnaissance réelle du droit d’asile, la suppression de la double peine.
Quand la société est en mutation profonde, quand les pratiques militantes évoluent, quand les organisations politiques de gauche doivent se reposer ensemble la question de leurs finalités, de leurs pratiques et de leur fonctionnement interne pour être à la hauteur de l’époque, quand les élites renvoient à ce point une image éloignée de la diversité sociale et culturelle, quand le danger d’une extrême-droite vécue comme un recours n’a rien d’un fantasme, on ne peut pas, on ne doit pas en rester à ce statu quo pesant. Rien ne serait pire qu’un paysage politique réduit une nouvelle fois à un choix médiocre entre la droite et un PS hégémonique, avec l’énorme risque que la seule alternative soit incarnée par l’extrême-droite, ce qui mènerait à un véritable désastre.

Face à un tel risque, il est urgent de fédérer des forces qui pensent et agissent dans le même sens. Il est urgent que se rassemblent – non pas dans un énième parti ou dans un cartel – les énergies de la transformation sociale. Il est temps d’inventer ensemble les formes nouvelles de cette mise en commun.
Nous lançons cet appel et vous invitons à l’éclairer de vos idées, à l’enrichir, à l’amender au regard de votre expérience, à le critiquer pour le parfaire. Nous ne fixons aucune limite à cette démarche. Les élections qui auront lieu en 2004 peuvent être l’occasion de rassembler des millions de personnes autour de cette alternative.
Nous proposons à toutes celles et à tous ceux qui se reconnaissent dans cet appel de le faire savoir, de le diffuser largement, de prendre l’initiative de débats publics avec l’ensemble des collectifs, réseaux et sensibilités disponibles. Nous souhaitons qu’il soit une contribution à une rencontre publique, à la rentrée, qui permette de faire converger les initiatives visant à réaliser ces objectifs. Avec toutes celles et tous ceux qui se retrouveront dans cette démarche, nous déciderons ensemble jusqu’où nous devons aller.
Premiers signataires
Nuri Albala, Avocat, Jean-Marie Angelini, éducateur, syndicaliste, Ariane Ascaride, comédienne, Clémentine Autain, féministe, élue municipale Patrick Braouezec, député, maire de Saint-Denis, Malik Chiban, cinéaste, Isabelle Lorand, chirurgienne, Philippe Mangeot, militant associatif, Gustave Massiah, militant associatif, Yannick Mazevet, ouvrier charpentier, Mireille Mendès-France, militante associative, Antonio Negri, philosophe, Christelle Pesme, jeune précaire, militante féministe, Maya Surduts, militante féministe, Malika Zediri, militante associative.
Patrick Alexanian, Patrick Alloux Syndicaliste élu municipal, Corinne Angelini, formatrice, adjointe au maire, Tonio Aniesa, militant associatif, Marc Bardin (Loire), Monique Barillot, fonctionnaire éducation (Marseille), Gilles Bénard, réseau Pour Une Vraie Gauche, Jean-Louis Berland, Alain Bertho, sociologue, Bruno Bonkapenka, cadre territorial, Bernard Bosc (militant du Réseau féministe "Ruptures"), Christine Bourbouze, cadre territorial, Roger Bourderon, maître de conférences honoraire, Daniel Boutavant, militant associatif, Charles Bouzols, militant associatif, Jean Brafman, Conseiller régional d’Ile de France, Daniel Breuillet, maire d’Arcueil, Bruno Cadez, Journaliste (Lille), Jean-Paul Chabard, ouvrier potlatcher, Gérard Caudron, maire, député européen, Pierre Cellot (Poissy), JC Chaumeron, syndicaliste CGT, Claire Chevrier, professeur (Réseau communiste et citoyen "Défense des Libertés publiques", Association "Echanges et coopération Porto Alegre St Etienne")., Yolande Colleret Militante associative, Jean Louis Comolli, cinéaste, Pierre Cornevin, pianiste, Pierre Cottet, Vénissieux, Pierre Cours-Salies, sociologue, Stéphane Cuttaïa, animateur socioculturel, Christine Delphy, Monique Dental (militante du Réseau féministe "Ruptures"), Francine Déverines (Vigneux), Réjane Di Bianca, militante NPS, Françoise Diehlmann, militante associative , Olivier Doubre, militant associatif, membre du comité de rédaction de la revue Vacarme, Etienne Doussain Directeur d'établissement médico-social Elu municipal (Noisy le Grand), Joss Dray:photographe militante associative, Roger Dubien, conseiller municipal de St-Etienne, Rodrigue Ducourant, graphiste illustrateur, PierreDucret, documentaliste, Vincent Duguet militant communiste (Bondy), Aline Ellias, Hasan Elmas, Maître de Conférences en Sciences Politiques, Marie Lyse Fayet, Gilbert Flament, Conseiller municipal d'Ablon sur Seine, Olivier Frachon, syndicaliste, André Franqueville, Responsable associatif à Briançon, Marie-France Franqueville, Le Pinet, Yves Fuchs, universitaire, président mouvement associatif (Champigny S/ Marne), Louis Garneray, Jaux (60), Bertrand Geay, sociologue, Frédérick Genevée, historien, Mehdi Ghiati, collaborateur d'élus, Claudie Gillot-Dumoutier, maire-adjointe, conseillère générale, Charlotte Girard, chercheur en Droit, Baptiste Giraud, doctorant sciences politiques, militant UEC/PCF, Alain Girod, pour la défense et l'amélioration du service public de l'énergie., Pascale Girod, Claude Goislot, militant politique et associatif, soutien à la lutte pour la régularisation des sans papiers, Emilie Hache, Didier Helion, Dordogne, Président bénévole d'une association d'insertion, Hassan Hmani, élu municipal à Nanterre, Anne Jollet, historienne, Laurent Kandel, Chargé de mission Conseil Régional Ile de France, Gilbert Khémais-directeur du Centre Culturel de Vitry, Alain Lacombe, maire de Fosse, Julien Langé, Paris, Jack Laruaz, Vonick Laubreton Plastricien , Marseille, Gérard Lalot, Conseiller régional de Picardie , Patrice Leclerc, conseiller général du 92, Laurent Lévy, avocat, Sarah Loyal, institutrice, Olivier Madaule, Enseignant (Montreuil), Marc Mangenot, économiste sociologue, Camilo Merino , Madjid Messaoudene, Etudiant, Saint-Denis , Fernanda Marrucchelli , Roger Martelli, François Meyroune, conseiller municipal de Migennes, Catherine Neufcourt (92), Alex Neuman, militant associatif, Christian Noury, instituteur, Patrick Paradowski, Conseiller municipal de Lens, Guy Pélachaud, enseignant chercheur, Gérard Perreau Bezouille Président du groupe "Communistes et apparentés" de Nanterre (92), Jacques Perreux, conseiller général, Stéphane Peu, maire adjoint, Déraud de la Pradelle, professeur de Droit international, Pierre Quay-Thevenon, maire-adjoint ( PC) de Saint-Denis militant associatif sport insertion, Claude Ramin , Abel Robineau, artiste peintre, Daniel Rome, militant pédagogique, Sandra Rossi, salariée, Eric Sanchis ( Rodez ), Anne Sophie Rousset, Michel Strauss, graphiste, Alain Raimbault, collaborateur d’élus (Nanterre), Robert Riviere, SUD et ATTAC (Pézenas), Jean Claude Ruas Président d'Archipel 93, Pierre Ruscassie, militant associatif, Pau., Pierre Sartor, Biologiste (33), Bernard Schneider, Langeais , Michèle Sibony, Valère Staraselski, écrivain, Philippe Stierlin, ingénieur-chercheur, Conseiller d'arrondissement (PCF) Paris, Ph Tancelin-Internationale des poètes, poète philosophe, Professeur d’Université, Alain Ternot, Annie Tobaty, proviseur, Michel Tort, Psychanalyste, Catherine Tricot, architecte, Marcel Trigon, ancien maire, Michel Van-Praët, Professeur, Manuel Van Thienen, enseignant, conseiller municipal (Le Sert LAFARRE), Patrick Vassalo, élu municipal, Raymond Vasselon Architecte DPLG Urbaniste Saint-Etienne, Daniel Vey, Gérard Vidal, Gennevilliers (92), Francine Vigneul, Marielle Wargnies, économiste (Gennevilliers), Pierre Zarka
Louis
 
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Message par Louis » 13 Juil 2003, 22:46

je ne fais pas de publicité, j'informe Quoi de plus normal dans ce thread qui est fait pour ça ? Personnelement, je trouve cet appel confus et loin des préoccupations dégagées lors des derniers mouvements sociaux.
Louis
 
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Message par hispa » 13 Juil 2003, 22:48

Mais des "machins comme celui-ci, il en est publié combien par an ?

De toute façon, j'imagine que c'est oublié aussitôt que c'est signé.

CITATION Il est temps d’inventer ensemble les formes nouvelles de cette mise en commun.[/quote]

Ca va bouillir encore un moment alors dans toutes ces petites têtes?
hispa
 
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Message par Louis » 13 Juil 2003, 22:55

ben visiblement ça se précise...
Louis
 
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