L'intérim chez PSA

Message par Andreas » 18 Juin 2003, 15:12

CITATION

Le recours à l'intérim chez PSA entraîne une cascade de procès

LE MONDE | 18.06.03 | 13h51

Alors que la production du constructeur a augmenté de 40 % ces quatre dernières années, le nombre des intérimaires a presque doublé dans certaines usines. Les salariés concernés saisissent de plus en plus souvent les prud'hommes pour demander une requalification de leur contrat.
Ils se présentent devant les conseils de prud'hommes par vagues de deux à dix. Parfois plus. Et jusqu'à présent, la justice a tranché en leur faveur. Bien que les directions ne veuillent y voir que des "cas isolés", la multiplication des procès pour recours abusif à l'intérim commence à inquiéter les constructeurs automobiles.

Mardi 17 juin encore, devant la juridiction du travail de Bobigny (Seine-Saint-Denis), neuf anciens salariés intérimaires de l'usine Peugeot-Citroën d'Aulnay-sous-Bois ont tenté d'obtenir une "requalification de leur contrat".

Elle leur ouvre droit si ce n'est à une intégration, au moins à des indemnités de licenciement pouvant se monter jusqu'à 15 000 euros. A Bobigny déjà, en janvier et décembre 2002, mais aussi à Nanterre, comme dans l'est de la France, les tribunaux n'hésitent plus à condamner les constructeurs à des indemnités de dommages, parfois à des amendes, pour "licenciements sans cause réelle et sérieuse".

Selon le code du travail, "le travail permanent est la règle, l'intérim, l'exception." Et son recours ne peut être envisagé que pour le remplacement de salariés absents ou en cas de "surcroît de travail et d'activité". Dans l'automobile, cette pratique est devenue systématique. Avant d'arrêter puis de reprendre son équipe de nuit, l'usine Renault de Sandouville (Seine-Maritime) employait, à l'automne 2002, 1 700 intérimaires sur un effectif permanent de 6 300 salariés. Le groupe Peugeot en compte plus de 12 000 sur les 90 000 permanents, dont 50 000 ouvriers. "Dans certains ateliers, les intérimaires peuvent représenter 40 % à 50 % des effectifs, note Jacques Salfati, secrétaire du syndicat CGT de Poissy. Ce n'est plus une variable d'ajustement ou de flexibilité, mais un état permanent." La direction estime au contraire que le recours à l'intérim est indispensable. "Si demain on rend impossible ces adaptations aux variations de la demande, nous serons obligés de maintenir les effectifs a minima et donc de priver d'emploi les sites français dans les périodes fastes au profit d'autres sites à l'étranger, alors que nous sommes l'une des dernières industries à intégrer des salariés peu ou pas qualifiés", explique Jean-Luc Vergne, directeur des ressources humaines de PSA. Une mise au point qui intervient alors que le groupe s'implante en Slovaquie.

Le problème, c'est que les "périodes fastes" commencent à durer chez PSA. La CGT s'est livrée à un exercice statistique sur l'usine de Poissy. Alors que la production de voitures a augmenté de 40 % depuis 1999, le nombre de salariés permanents (4 900) a chuté de 16 %. Dans le même temps, l'effectif temporaire (1 065) a doublé. A l'usine d'Aulnay, on comptait, en mars, 1 616 intérimaires sur un effectif global de 5 400 salariés. Et à Sochaux, un peu plus de 2 600 sur 16 140. "On ne peut pas raisonner à partir de telle ou telle usine, conteste M. Vergne. Sur les trois dernières années, nous avons embauché 34 640 personnes en France. En 2002, sur 6 200 embauches, 4 400 étaient d'anciens intérimaires."

"NE PAS SE PLAINDRE"

Les heureux élus restent pourtant une petite minorité. A tel point que dans certaines usines, les syndicats ont le sentiment que l'intérim est devenu la norme. "Pour la plupart, ce sont des jeunes à qui l'ont fait miroiter une embauche en CDI. Ils sont soumis à de fortes pressions pour augmenter les cadences, avec pour consigne de ne pas se plaindre et surtout de ne pas s'approcher des délégués", souligne Philippe Julien, délégué CGT d'Aulnay. Au bout du compte, seul le chef d'atelier décide de leur sort en autorisant ou non un renouvellement de leur contrat.

Le fait que l'intérim fasse partie intégrante de la politique de ressources humaines n'est pas nouveau. Mais les syndicats estiment que le phénomène se structure de plus en plus. En septembre 2002, lors d'une convention d'encadrement à Poissy, la direction du site, pour veiller à "maîtriser la qualité du recrutement intérimaire", recommandait de "favoriser les flux entre Aulnay et Poissy", de "structurer la reprise des meilleurs six mois après leur départ" et de faire le point tous les ans avec les sociétés de travail temporaire. "On ne peut pas nous faire le reproche d'une gestion qualitative de l'intérim", rétorque M. Vergne. Le constructeur est en train de spécialiser ses sites par type de modèle. Une organisation qui devrait permettre une baisse substantielle du nombre d'heures de travail par véhicule. "Dans ce contexte, nous sommes obligés de garder un peu de souplesse dans notre organisation. L'erreur serait de céder à la tentation d'embaucher pour faire ensuite un plan social à la première fluctuation venue", proteste M. Vergne.

Les syndicats reconnaissent les limites des actions judiciaires en faveur des intérimaires, pour la plupart en fin de contrat. Peu d'entre eux acceptent de mener cette guérilla juridique qui les expose au risque d'être rayés des listes des sociétés de travail temporaire.

Pourtant, les recours de plus en plus nombreux à la justice commencent à porter leurs fruits. "J'ai donné des consignes strictes, annonce M. Vergne. Nous devrions passer cette année à 10 000 intérimaires contre 12 500 l'an dernier. Il faut que nous soyons plus centralisateur dans notre gestion."

Par ailleurs, la direction de PSA doit rencontrer les syndicats le 26 juin pour évoquer le sujet. Enfin, une charte entre le constructeur et cinq grands groupes d'intérim doit être signée dans une dizaine de jours. Une sorte de code de bonne conduite qui garantira aux intérimaires le même traitement que les CDI sur le plan de la rémunération ou du travail dangereux. Elle instaurera aussi un délai de prévenance minimal d'une semaine pour les fins de mission. Le texte s'engage, par ailleurs, à sélectionner les agences d'intérim, qui doivent proposer obligatoirement une couverture sociale minimale. "Ce sont des choses qu'on pratique déjà, affirme M. Vergne, mais cela ne fait pas de mal de l'écrire."

Michel Delberghe et Stéphane Lauer


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"Evitez d'aller à l'infirmerie"


"Si vous le pouvez... évitez d'aller à l'infirmerie. (...) PSA établit une déclaration d'accident de travail, même pour une toute petite coupure ou un cachet d'aspirine." Or, "si vous êtes en arrêt maladie, vous êtes considéré comme absent, ce qui peut influencer la fin de mission ainsi que votre retour sur le site." Tel est l'avertissement que donne l'agence d'intérim Euristt de Mantes-la-Jolie (Yvelines) à ses salariés envoyés chez Peugeot à Poissy, après que ses responsables eurent été "convoquées à la direction du personnel PSA", précise le document Bienvenue chez Peugeot remis à chaque intérimaire.

Interrogée par Le Monde, Marie-Christine Massot, directrice de l'agence, relativise : "C'est une mise en garde pour nos intérimaires, qui sont jeunes et sont parfois tentés d'aller à l'infirmerie pour passer le temps." Euristt est en concurrence avec six autres agences pour gérer les 1 800 intérimaires du site. L'absentéisme est un critère essentiel pour le constructeur. "Depuis trois ans, nous sommes référencés par Peugeot, mais ce référencement est remis en question tous les ans", explique l'agence dans le même document.


• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 19.06.03
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Andreas
 
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