CITATION Ferry voit des trotskistes partout
S'ils sont présents dans les AG, leur influence reste limitée.
Par Christophe FORCARI
vendredi 06 juin 2003
«Dire que nous sommes à l'origine des grèves dans l'Education, c'est nous prêter un poids extra-ordinaire.» Alain Krivine errière l'agitation sociale se profileraient les pros de l'agit-prop. Hier matin, sur Europe 1, le ministre de l'Education nationale, Luc Ferry, a stigmatisé «les professeurs d'extrême gauche» qui, depuis un bon mois, attiseraient un conflit que le gouvernement ne parvient pas à éteindre. Une rengaine resservie à chaque période de tensions sociales fortes. Dans l'ombre, les trotskistes de la Ligue communiste révolutionnaire, de Lutte ouvrière, voire du Parti des travailleurs, tireraient les ficelles.
«Poissons dans l'eau». En 1989, Rocard, alors Premier ministre, dénonçait déjà cette minorité agissante derrière le conflit des infirmières. Ministre de l'Intérieur, Chevènement avait pointé, en avril 1998, le rôle des «trotskistes d'origine britannique» chez les sans-papiers. «Nous sommes dans ce mouvement comme des poissons dans l'eau, reconnaît volontiers Alain Krivine, le porte-parole de la LCR. Mais dire que nous sommes à l'origine des grèves dans l'Education nationale, c'est nous prêter un poids extraordinaire.»
Pourtant, bon nombre de ses militants exercent en milieu enseignant, quand ils n'occupent pas des postes de direction dans les syndicats. Alain Cyroulnik, membre du secrétariat de la FSU, majoritaire dans le corps enseignant, participe activement au comité central de la LCR. Chez les cheminots, les trotskistes de la LCR se syndiquent plutôt à la CGT. Et comme Olivier Besancenot, candidat à la présidentielle, les postiers, militants de la Ligue, s'encartent, eux, à Sud. Lutte ouvrière, qui a toujours cherché en priorité à recruter dans les entreprises, parmi les ouvriers, dispose également de militants dans l'enseignement. Le parti d'Arlette Laguiller aurait même tenté de lancer une OPA sur l'assemblée générale d'établissements en grève d'Ile-de-France.
C'est d'ailleurs la région dans laquelle l'activisme des militants trotskistes est le plus souvent montré du doigt. En particulier dans le département de Seine-Saint-Denis, souvent en pointe dans les conflits enseignants, mais aussi, dans une moindre mesure, dans le département voisin du Val-de-Marne. Les enseignants se sentent d'autant plus en phase avec l'extrême gauche que le 21 avril 2002, au premier tour de la présidentielle, leurs bulletins de vote se sont portés, dans une proportion beaucoup plus forte (environ 14 %) que la moyenne de la population (10,5 %), sur les trois candidats de la gauche de la gauche : Arlette Laguiller, Olivier Besancenot et Daniel Gluckstein.
Canal historique. Signe cependant de leur faible influence, les militants de la Ligue ne recueillent pas un grand succès lorsqu'ils relayent leur mot d'ordre de «grève générale» dans les confédérations auxquelles ils adhèrent. Sauf à Sud, devenu le canal historique des revendications de l'extrême gauche. Même si ce mot d'ordre passe mieux dans les assemblées générales de cheminots et d'enseignants, plus réceptives aux discours radicaux, ceux-ci n'ont pas besoin des militants de la LCR ou de LO, présents en faible nombre dans les AG, pour être poussés à la roue.
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