
Les capitalistes avouent qu'ils ne peuvent rien sans la béquille de leur Etat, mais en passant ils récupèrent encore quelques milliards d'euros.
("Reuters" a écrit :L'argent public devrait financer seul l'infrastructure Galileo
Reuters 10.05.07 | 16h09
Par Yves Clarisse
BRUXELLES (Reuters) - Le budget européen doit financer seul l'infrastructure du projet Galileo pour sauver ce système européen de positionnement par satellite menacé par la défaillance du privé, estime la Commission européenne.
L'exécutif européen, qui présentera mercredi prochain une proposition soumise le 7 juin aux ministres des Transports des Vingt-Sept, n'a pas caché l'état des réflexions du commissaire chargé de cet épineux dossier, Jacques Barrot.
"Nous avons maintenant les idées un peu plus claires", a déclaré son porte-parole, Michele Cercone, alors que le consortium d'entreprises aéronautiques chargé du projet n'a pas présenté de solution sur le financement à l'échéance du 10 mai qui avait été fixée il y a deux mois par l'Union européenne.
"La réponse est définitivement insuffisante", a-t-il expliqué en confirmant officiellement la position de Barrot pour que le projet voie le jour à la date prévue de 2012.
"La solution qui nous permettrait de rattraper le retard, c'est le scénario dans lequel la partie publique prend en charge la construction de l'infrastructure dans sa totalité", a-t-il ajouté lors du point de presse quotidien de la Commission.
Alors que le budget européen a déjà financé Galileo, un projet concurrent du système américain GPS (Global Positioning System) américain, pour un montant situé entre 1,2 et 1,4 milliards d'euros, il devrait selon Michele Cercone trouver de 2 à 3 milliards d'euros supplémentaires.
Contrairement à ce qui était prévu, la participation publique serait alors concentrée dans la phase de construction des 30 satellites nécessaires au fonctionnement de Galileo et le privé s'occuperait uniquement de l'exploitation du système.
La Commission a présenté cette articulation comme un plus pour les contribuables européens quand on fera les comptes.
"ON NE PEUT PAS TOUT PRIVATISER"
Cercone a comparé le mécanisme envisagé à l'achat d'une voiture: une acquisition en leasing, comme celle qui était initialement prévue, coûte finalement plus cher à l'acheteur que le paiement en liquide au début de la vie de l'automobile.
Un expert du dossier fait toutefois remarquer que la comparaison a ses limites, puisque dans le schéma original l'essentiel de la participation publique prenait la forme de garanties qui, si tout s'était bien déroulé, n'auraient pas dû entraîner de versement d'argent public sonnant et trébuchant.
La Commission explique que les montants versés pourront être récupérés lorsque Galileo sera en phase d'exploitation.
Les pouvoirs publics n'ont de toute manière guère le choix.
Le consortium privé - en fait, deux groupes d'entreprises que la Commission a obligé à présenter une offre commune pour éviter les rivalités nationales - a fait savoir qu'il refusait d'assumer les risques et les dettes du projet.
Ce consortium est composé de grands groupes industriels européens: le géant de l'aérospatiale EADS, les français Thales et Alcatel-Lucent, le britannique Inmarsat, l'italien Finmeccanica, les espagnols AENA et Hispasat et le duo allemand Deutsche Telekom-Centre aérospatial allemand.
Sa seule concession aux sommations des ministres des Transports des Vingt-Sept a été la nomination d'un directeur général unique pour diriger le projet afin d'assurer son développement pour éviter des tiraillements tels que ceux qui ont plongé Airbus dans la crise cette année.
Curieusement, la Commission semble découvrir maintenant que, comme pour le creusement du tunnel sous la Manche, la prise en charge par le privé de la construction d'énormes infrastructures se heurte la plupart du temps à des difficultés insurmontables.
"Aucun projet n'a jusqu'à présent été financé uniquement par de l'argent privé", a expliqué Michele Cercone.
C'est exactement ce que les membres du consortium pensent, après s'être pourtant engagés à mettre la main au portefeuille.
"Ce spectaculaire projet européen montre qu'on ne peut pas tout privatiser, l'infrastructure doit être fournie par le public d'une manière ou d'une autre", a déclaré jeudi à Berlin Thomas Enders (EADS), co-président exécutif d'EADS.
"Quand l'infrastructure sera construite, alors on pourra discuter de la façon dont le privé le pilotera", a-t-il ajouté en estimant ne pas avoir de responsabilité dans ces problèmes.
"Ce sont les politiques qui ont forcé les deux consortiums à fusionner, donc il n'est pas étonnant qu'il y ait des conflits", a-t-il expliqué.