La panne révèle les failles de l'Europe de l'électri

Message par Matrok » 06 Nov 2006, 20:26

Un article intéressant du Monde qui nous rappelle quelques conséquences de la déreglementation du secteur de l'énergie... Ah mais au fait, c'est pour ça que la FALO était injoignable samedi soir ?!

La panne révèle les failles de l'Europe de l'électricité
LE MONDE | 06.11.06 | 14h10 • Mis à jour le 06.11.06 | 14h10

L'ouest de l'Europe est passé samedi 4 novembre, vers 22 heures, très près d'un black out total. A la suite d'une grave défaillance du réseau allemand de lignes à haute tension, les pays interconnectés à l'Allemagne et en déficit de production à cette heure-là (France, Italie, Suisse, Pays-Bas, Belgique, Espagne, Portugal) ont en effet subi une panne d'électricité qui a frappé 10 millions d'Européens - dont 5 millions de Français.

Il a suffi qu'E.ON Netz, filiale du transport de l'électricité du producteur allemand E.ON, coupe deux lignes de 400 000 volts dans le nord de l'Allemagne pour que tout s'enchaîne : séparation du réseau allemand en deux, report de charges trop importantes sur la partie ouest du pays, déclenchement des sécurités (coupures de lignes outre-Rhin), arrêt des exportations vers les pays voisins. En bout de chaîne, les clients de l'Allemagne ont subi un déficit de production de 10 000 MW, l'équivalent d'une dizaine de centrales nucléaires.

A elle seule, la France a été privée de 5 200 MW, soit un peu moins de 10 % des capacités alors mobilisées de ses centrales (56 000 MW). Faute de pouvoir combler immédiatement un déficit aussi important en produisant davantage, "on a été obligé de faire des délestages sélectifs pour ramener le niveau de la consommation à celui de la production et éviter un écroulement total du système", explique André Merlin, président du directoire de Réseau de transport d'électricité (RTE).

Pour le patron de la filiale d'EDF gestionnaire des 100 000 kilomètres de lignes à hautes tensions de l'Hexagone, le système a bien fonctionné. "Si l'on n'avait pas fait ces coupures sélectives, ce ne sont pas 10 millions de personnes qui auraient été privées de courant pendant une heure, mais 100 à 200 millions d'Européens qui se seraient retrouvés sans électricité pendant plusieurs heures et peut-être plusieurs jours pour certains". Un black out comme en ont connu les habitants du Nord-Est des Etats-Unis et du Canada le 14 août 2003, et les 60 millions d'Italiens un mois plus tard.

La panne a tout de même plongé 5 millions de Français dans le noir entre 22 heures et 23 heures, les foyers commençant à être réalimentés vers 22 h 30. Les délestages ont touché de nombreuses régions, de l'Est à Ile-de-France et de Rhône-Alpes à la Normandie. Plusieurs TGV ont subi des retards pouvant aller jusqu'à une heure, notamment dans le Nord et le Centre. Les pompiers ont été submergés par les appels.

Pour la fédération mines-énergie de la CGT, cet accident majeur "démontre la fragilité du système électrique européen". Il entraîne "une dépendance de la France qui n'a été décidée nulle part".

Elle juge que les pays européens, à commencer par la France, payent le prix de la déréglementation du secteur décidée au milieu des années 1990. "Ce n'est pas en multipliant les autoroutes de l'énergie en Europe, ou en instaurant un système de régulation européen, que les citoyens seront à l'abri d'un black-out possible", souligne la CGT. Majoritaire à EDF, la CGT réclame une fois de plus "l'arrêt" de la libéralisation du secteur et "exige un bilan réel et sérieux de la déréglementation de l'énergie en Europe" avant l'ouverture totale du marché le 1er juillet 2007.

Favorable à cette libéralisation, la Commission de régulation de l'énergie (CRE), chargée du bon fonctionnement des marchés de l'électricité et du gaz, a annoncé, dimanche soir, qu'elle allait "lancer dans les plus brefs délais sa propre enquête pour établir la chronologie des faits et les causes précises de la panne". Lors de la réunion des régulateurs des Vingt-cinq à Bruxelles, mardi 7 novembre, la CRE demandera "une enquête européenne afin de déterminer la chaîne des responsabilités".

Le sous-investissement dans les centrales et les réseaux depuis de nombreuses années est-il en cause ? Il n'y avait, samedi, ni pic de consommation, ni défaillance des centrales. "Mais si nous avions davantage de capacités d'interconnexion, nous serions plus à même de faire face à des situations critiques", nuance M. Merlin. Elles sont "insuffisantes", note le cabinet Capgemini dans son dernier Observatoire européen des marchés de l'énergie. Il y mettait récemment en garde contre le risque de black out que fait courir à de nombreux pays, dont la France, une croissance de la consommation électrique plus rapide que celle des investissements (Le Monde du 17 octobre).

Le président de RTE a profité de la crise pour relancer sa demande de création d'un "centre de coordination européen des réseaux de transport" qui permettrait, selon lui, d'accroître la sécurité des échanges au sein de l'Union.

M. Merlin réclame aussi, depuis des années, la construction de capacités de pointe pour répondre aux pics de consommation que connaît l'Hexagone en période de canicule ou de grand froid. Car la période de surcapacité est bien révolue. Même si la France reste exportatrice de courant, elle est aussi devenue dépendante de ses voisins. Et notamment de l'Allemagne depuis 2004.

Jean-Michel Bezat
Matrok
 
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Message par Bertrand » 06 Nov 2006, 20:31

Editorial des bulletins d'entreprise de LO

a écrit :LE CAPITALISME EN PANNE

    Une ligne à haute tension déconnectée dans le nord de l'Allemagne pour laisser passer un bateau de croisière, et voilà qu'une dizaine de pays d'Europe, quelque dix millions de consommateurs, ont été frappés par une panne d'électricité. La panne a duré moins d'une heure mais, à ce qu'il paraît, on est passé près d'un black-out à l'échelle de l'Europe occidentale.
    La répercussion d'un problème mineur d'un coin du continent sur sa majeure partie est la preuve, dans ce cas par la négative, de l'état d'interdépendance des économies les unes par rapport aux autres. C'est particulièrement vrai pour l'électricité qui ne peut être stockée et où les échanges sont permanents.
    Mais pourquoi la panne elle-même ? On pourrait se dire qu'un accident peut toujours arriver. Après tout, si la panne a occasionné de nombreuses gênes - ascenseurs bloqués, trains arrêtés en rase campagne, chauffages éteints -, il n'y a rien eu de catastrophique. Mais quand on en regarde de plus près les causes, cette panne-là en annonce d'autres et, peut-être, de plus graves.
    Depuis bien des années, la consommation électrique s'accroît. A celle des entreprises industrielles, s'ajoute celle des centres commerciaux, des super et hypermarchés, leur éclairage, chauffage, équipement frigorifique en fonctionnement jour et nuit, sans parler de la publicité. Les usagers particuliers consomment aussi toujours plus parce que c'est une forme d'énergie commode, mais aussi parce qu'ils y sont poussés par l'usage d'une multitude de gadgets plus ou moins utiles. C'est le progrès, pourrait-on se dire. Peut-être. Encore que personne ne maîtrise cette croissance anarchique et, surtout, que l'offre d'électricité ne suit pas en raison du sous-investissement.
    Les compagnies qui produisent de l'électricité investissent de moins en moins. Même celles qui, comme EDF, sont nationalisées, se comportent déjà sur le marché international comme des compagnies privées. Elles préfèrent utiliser leurs profits à racheter des centrales et des réseaux déjà existants ailleurs dans le monde plutôt que de développer les investissements productifs.
    Les entreprises d'électricité se comportent comme toutes les grandes entreprises en position dominante : elles préfèrent gagner plus en augmentant les prix mais avec les équipements déjà existants que l'on use jusqu'à la corde.
    Bien que la production et la consommation d'électricité des différents pays européens soient interdépendantes, ce sont quand même les autorités nationales qui ont le dernier mot. La contradiction entre l'interdépendance d'un bout à l'autre du continent et le morcellement en autorités nationales est une source de chaos.
    Mais il y a pire : le morcellement que l'on introduit en faisant de la distribution de l'électricité un marché, ouvert à la concurrence et à la course au profit. L'électricité devrait être un service public à l'échelle du continent. La course au profit prépare des accidents d'une tout autre ampleur que celui du samedi 4 novembre.
    Les États-Unis, pourtant de loin le plus développé et le plus riche des pays capitalistes, ont connu plusieurs pannes géantes, la dernière ayant privé d'électricité New York et près de 50 millions d'Américains.
    La panne survenue en 2001 dans le plus riche des États américains, la Californie, avait pour cause directe la concurrence acharnée entre entreprises privées qui, toutes, visaient le profit à court terme au détriment des investissements nécessaires, y compris, à l'instar d'Enron, par l'escroquerie et la fraude.
    Le capitalisme américain a bien souvent indiqué l'avenir pour les grands pays européens. La concurrence, la course au profit privé, conduisent au chaos. Et ce n'est pas vrai seulement pour l'électricité mais aussi pour l'ensemble de l'économie.

Arlette Laguiller
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Bertrand
 
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Message par zejarda » 06 Nov 2006, 20:41

("Matrok" a écrit :Un article intéressant du Monde qui nous rappelle quelques conséquences de la déreglementation du secteur de l'énergie... Ah mais au fait, c'est pour ça que la FALO était injoignable samedi soir ?!


Il semblerai
zejarda
 
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Message par zejarda » 06 Nov 2006, 20:49

a écrit :Elles sont "insuffisantes", note le cabinet Capgemini dans son dernier Observatoire européen des marchés de l'énergie. Il y mettait récemment en garde contre le risque de black out que fait courir à de nombreux pays, dont la France, une croissance de la consommation électrique plus rapide que celle des investissements (Le Monde du 17 octobre).


Comme aux états-unis avec Enron, ils sont en trains de construire la pénurie de demain, et leurs futurs profits.
:headonwall:
zejarda
 
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