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Message Publié : 17 Sep 2006, 08:57
par Barikad
a écrit :"Le Monde" Prend Parti Dans Le "Débat", Courageusement "Relancé" Par Un Bon Ami De Nicolas Sarkozy, Sur L'"Anomalie" Des Retraites



"Le Monde" (numéro daté d'aujourd'hui) l'annonce à la une: "La droite relance le débat sur les régimes de retraite". (Il y a moins d'une semaine, rappelez-vous, la droite, par la voix de ses deux représentants les plus en vue, Nicolas (Sarkozy) et Pimprenelle (Royal), "relançait" déjà le "débat" sur la carte scolaire. On peut dire ce qu'on veut de la droite, mais il y a une chose qu'on ne peut pas lui retirer: pour ce qui est de relancer un débat, elle se pose un peu là. Je ne vois guère que le talentueux Yves Calvi, pour lui damer le pion).
"Le Monde" l'annonce à la une: "Fillon pose la question des disparités entre salariés".
On pressent, confusément, parce qu'on finit par connaître un peu son "Monde", que le "débat", dès lors, va opposer, d'une part, les tenants de ces "disparités", partisans de la guerre civile, et, de l'autre, les défenseurs d'une authentique égalité-parmi-les-hommes: François Fillon, Nicolas Sarkozy, et plus généralement la fine fleur du libéralisme décomplexé briseur de tabous. (Je prends ici le pari qu'un hebdo, "Le Point" (ou un autre), va nous balancer, d'ici quinze jours maxi, une "enquête" explosive de Jacques Marseille (ou un autre) sur le tabou des retraites).

Dans ce "débat" (qui s'annonce), "Le Monde" va-t-il s'engager?
Le dessin-du-jour de Jean Plantu, reproduit ci-dessus, nous apporte un premier élément de réponse.
Jean Plantu, en digne continuateur de l'oeuvre (impérissable) de feu Jacques Faizant, nous montre, comme Faizant faisait jadis, Marianne (aka la France) ligotée, baîllonnée, PRISE EN OTAGE par des cheminots dont l'outrecuidance connaît si peu de limites, qu'ils brandissent, comme pour mieux SIGNER leur abominable forfait, un DRAPEAU ROUGE, et même deux, sinistres vestiges d'une ancienne tyrannie.
Preneurs d'otages (comme le Hezbollah), communistes (comme Joseph Vissarionovitch Djougatchvili): ces gens de la SNCF sont la lie honteuse de l'humanité.
Le débat, on le devine, risque donc d'être FORT DIFFICILE, avec de tels interlocuteurs.
Et de fait, sur le dessin-du-jour de Jean Plantu, "le spectre" (hideux comme les spectres seuls savent l'être) "des grèves de 1995" menace DEJA la France, alors même que le débat vient à peine d'être (courageusement) relancé par la droite. (Je vous laisse mettre des guillemets à débat, moi ça commence à me gonfler).
Sacré Jean Plantu.
Toujours aussi cocasse.

Pour le cas où certains lecteurs, un peu mous de la touffe, n'auraient pas bien saisi, à la une, toutes les subtilités de la pensée jeanplantesque, "Le Monde" organise, à la page deux, une session de rattrapage: l'éditorial.
Titre: "Anomalie".
Ah, tiens, se dit monsieur Lambda, voilà qui excite BEAUCOUP ma curiosité: mais de quelle "anomalie" s'agit-il? (A ce niveau de suspense, faut dire, c'est plus un édito, c'est un thriller).
Première phrase: "Un candidat à l'élection présidentielle doit exposer un programme clair, qui constitue, une fois élu, le socle de sa légitimité et la feuille de route de son mandat".
Bon, oui. D'accord. C'est du mauvais français. Il est bien sûr impossible d'élire un programme, si clair soit-il, et les mots "un programme clair, qui constitue, une fois élu" ne veulent, ainsi placés les uns contre les autres, absolument rien dire.
Mais ne soyons pas mesquins.
Ce qui est important, c'est que cette définition de ce que doit faire un candidat pour être crédible permet au signataire (Jean-Marie Colombani? Eric Le Boucher?) de cet éditorial de nous révéler qu'un tel homme EXISTE déjà, en la personne, oooooh mais quelle surprise, de Nicolas Sarkozy.
Ca donne, sous la plume (affranchie) de notre éditorialiste (que désormais j'appellerai Ed, histoire de gagner du temps): "La volonté affichée par François Fillon, (...) chargé du programme à l'UMP, de poser la question des régimes spéciaux de retraite dont bénéficient les salariés des entreprises publiques est donc bienvenue".
Bravo, François Fillon.
Bravo, Nicolas Sarkozy.

Ed fait, pour ceux qui n'auraient pas (encore) compris, un deuxième passage: "Dire que, élu, Nicolas Sarkozy s'attaquera à cette réforme, c'est parler clair aux électeurs".
Un éditorialiste moins expérimenté (que ce bon vieux Ed) aurait pu écrire: "Dire que, élu, Nicolas Sarkozy s'attaquerAIT".
Au conditionnel, plutôt qu'au futur.
Mais "Le Monde", qui avait déjà prédit BIEN AVANT TOUT LE MONDE (j'aimerais qu'on ne fasse pas semblant de l'oublier) le sidérant triomphe de Balladur à l'élection présidentielle de 1995 sait aujourd'hui que celle de Sarko en 2007 n'est plus qu'une minuscule formalité.
C'est pour ça que "Le Monde" est LE "quotidien de référence", beaucoup plus que, par exemple, "Métro". (Ou "20 Minutes").

Pédagogie toujours, Ed, pour le cas, presque inimaginable, où quelques débiles profonds n'auraient TOUJOURS pas compris le sens général de son intervention, en remet une troisième couche: "Que le débat s'ouvre aujourd'hui, avant le vote, est une saine rupture par rapport à des pratiques d'opacité et de brouillage des cartes dont usent trop souvent les hommes politiques".
Ah ben ça, dites, c'est marrant, mais "rupture", j'ai l'impression que c'est un mot qu'on a déjà entendu y a pas très longtemps!
Mais où?
Touchez ma bosse, Monseigneur.

Après avoir joyeusement acclamé l'homme de la "rupture", Ed s'empresse, bien sûr, de préciser (encore) les termes du (nécessaire) débat que notre prochain président ose (enfin) relancer (avec ce beau courage qui souvent le caractérise): "Les disparités ont continué à s'amplifier entre, d'un côté, les salariés du privé et les fonctionnaires, et, de l'autre, les personnels des entreprises publiques".
Tiens, semble se dire l'éditorialiste du "Monde", salarié du privé inquiet pour sa retraite, et si on essayait, mine de rien, de monter les fonctionnaires contre les salariés des entreprises publiques?
Est-ce que ça n'aiderait pas ce bon monsieur Fillon et son charmant patron?

Et ça continue: "La question de l'égalité de traitement des Français est plus vive que jamais: départ à 60 ans, contre 55 à la SNCF (50 ans pour les conducteurs); 40 ans de cotisations (41 ans en 2012), contre 37,5 ans..."
Cette inégalité, déjà, c'est l'horreur, non?
Mais il y a pire: "En outre, ces régimes sont financièrement déséquilibrés, obligeant l'Etat et les régimes généraux à combler des trous qui se creusent rapidement"!
Tiens, semble se dire l'éditorialiste du "Monde", et si j'expliquais à monsieur Dupont que, pendant qu'il dort, un cheminot (hirsute) vient subrepticement lui piquer des pièces jaunes dans son porte-monnaie - imprudemment abandonné sur la table de la salle à manger?
Est-ce que le prochain président ne me serait pas redevable d'un fier coup de pouce?

Bon, je reconnais, Ed préconise, pour niquer les salariés des entreprises publiques, la "méthode" douce: "Une négociation sur les modalités" (de ce niquage) "doit s'engager dès l'élection" (de Nicolas Sarkozy).
Pourquoi cette mansuétude?
Pourquoi la négo, plutôt que le bâton?
"Pour que la France ne se retrouve pas bloquée par les grèves".
Prise en otage, comme sur le dessin de Jean Plantu.

Mais qu'importe au fond la méthode, pourvu qu'on ait l'ivresse: pour "Le Monde", l'important est "d'en finir avec ce qui constitue effectivement une "anomalie"".

Je ne doute pas que "Le Monde", pour nous aider à bien mesurer l'ampleur de cette "anomalie", publiera bientôt à la une le bulletin de salaire de, mettons, Jean Plantu. (Mais ça pourrait aussi bien être celui de Colombani).
Et à la page deux, la fiche de paie d'un cheminot bolchevique...

http://vivelefeu.blog.20minutes.fr/archive...-relance-p.html

Message Publié : 17 Sep 2006, 09:32
par logan
Ils ne font même plus semblants d'être objectifs.