Conditions de travail

Message par pelon » 25 Juil 2006, 17:37

a écrit :
"Je vous rappelle que la loi impose trois litres d'eau par ouvrier..."
LE MONDE | 25.07.06 | 14h34  •  Mis à jour le 25.07.06 | 14h49

Dehors, il doit faire 34 degrés. A l'intérieur de cette librairie exiguë, le petit thermomètre indique 32 degrés. "Mais on est loin du compte", assure le vendeur âgé d'une cinquantaine d'années. Il a l'air de cuire sur son fauteuil, cloîtré entre des centaines de livres. Et ce ne sont certainement pas ses deux malheureux ventilateurs - dont l'un est en panne - qui empêcheront les coulées de sueur d'inonder ses joues.

Le directeur arrive. L'inspecteur du travail est déjà là. Il a été saisi anonymement, la semaine dernière, d'un cas, celui d'un salarié souffrant de la chaleur. Il veut vérifier. Devant le "boss", il ouvre la porte du commerce. Une légère brise charitable souffle.

"Vous conviendrez qu'il fait plus frais à l'extérieur qu'à l'intérieur.

- Il fait très chaud de partout.

- Qu'envisagez-vous de faire pour ce monsieur qui souffre de la chaleur ?

- Euh... Il y a des ventilateurs ! On va essayer de climatiser cette pièce, mais il faut voir à combien s'élève le coût.

- Et l'eau fraîche ?

- ?

- Pourquoi monsieur n'a-t-il pas d'eau fraîche à sa disposition ?

- Il n'a qu'à monter au premier étage."

Un inspecteur du travail doit avoir beaucoup de "tchatche" face à la "mauvaise foi des employeurs", assure ce fonctionnaire de 37 ans que Le Monde a pu suivre dans son travail, lundi 24 juillet. "Je suis toujours derrière eux, toujours à répéter les mêmes choses, un vrai Père Fouettard." Son administration lui a imposé l'anonymat. Nous l'appellerons André.

A L'IMPROVISTE
Depuis deux ans, il contrôle les entreprises d'une moitié du 13e arrondissement de Paris. Sous son autorité, deux contrôleurs du travail. Depuis le début des fortes chaleurs, André multiplie les inspections à l'improviste, notamment sur les chantiers, afin de s'assurer de la santé des salariés. A la suite de la mort par hyperthermie d'un ouvrier à Mâcon (Saône-et-Loire), le 18 juillet, le gouvernement a demandé aux inspecteurs du travail d'intensifier les actions auprès des employeurs. "Les ministres (de la santé et du travail) ont souhaité attirer notre attention. Mais cette demande a été mal prise par des collègues, avoue André. C'est pourtant quelque chose que l'on fait tout le temps."

C'est la pause déjeuner, André a passé la matinée à contrôler un fast-food en manque de ventilation et la librairie. "Nous avons une très grande difficulté. La réglementation du travail impose à l'employeur d'assurer la santé et la sécurité du salarié quand il y a "élévation exagérée de température". Sans fixer de niveau de température. Mais ça ne veut rien dire", s'offusque l'inspecteur. Alors, un simple "ventilo" ou une fenêtre ouverte suffisent souvent à rendre les entreprises conformes à la réglementation. "Il faudrait un texte qui fixe une température à partir de laquelle nous puissions réellement prendre des mesures", explique-t-il.

Pour faire plier l'employeur, l'inspecteur brandit la menace d'un procès-verbal, synonyme d'un passage au tribunal. Mais, selon André, "le procureur de la République ne comprend pas les enjeux de santé des salariés. Si ce n'est pas un grave accident du travail, il laisse traîner les procédures".

16 heures. Le jeune inspecteur du travail vient de passer quelques heures sur un chantier important. Il fait trop chaud. Parcourant les étages de la bâtisse, il conseille à tous les ouvriers qu'il croise de "bien s'hydrater". Au chef de chantier, il demande la facture d'eau : "Je vous rappelle que la loi impose trois litres d'eau par ouvrier." Depuis le début de la canicule, trois ouvriers du bâtiment et un chauffeur-livreur sont morts d'hyperthermie, selon l'Institut national de veille sanitaire.

C'est la fin de l'après-midi. André est sous la Seine, à 35 mètres de profondeur, sur un chantier. La semaine dernière, il a demandé une ventilation supplémentaire et des fontaines d'eau. Les responsables ont arrêté le chantier pour installer cette ventilation. Puis André demande : "Vous ne pouvez pas aménager les heures de travail pour les salariés ? La chaleur va devenir de plus en plus insupportable." Pas de réponse. "Ça, les entreprises ne le font jamais."

Mustapha Kessous
pelon
 
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Message par Crockette » 26 Juil 2006, 15:34

ce qui est marrant dans ce pays c'est que les sociaux libéraux de droite comme de gauche disent que le marché du travail n'est pas assez flexible, qu'il est régit par des lois archaiques alors sachez cela :

- les inspecteurs du travail sont en sous effectif depuis maintenant dix ans, ni le ps ni l'ump n'a changé cela.
- des salariés se sont plaints de travailler sous 44° dans un atelier en tôle, et bien sachez que ce fait est laissé à la libre appréciation de leur employeur, c'est grave, les chef d'entreprise font ce qu'ils veulent avec la santé des travailleurs, on est en plein monarchisme, c'ets même plus de la république décadente.

Si les salariés contactent l'inspection du travail, celle ci ne peut faire que des recommandations à l'employeur ou mieux elle conseille aux salariés d'aller voir le médecin du travail...
Situation kafkhaienne : les salariés vont voir leur médecin du travail, et ce dernier ne peut que conseiller à l'employeur de ne plus les faire travailler; ou mieux il conseille aux pauvres ouvriers d'aller voir leur inspecteur du travail... :wacko:


Alors les Kouchner, Royal, Delors, Chereque et compagnie, elle est pas flexible la France d'en bas ? pas assez à votre goût ?
Crockette
 

Message par lenzo » 26 Juil 2006, 22:15

Lutte Ouvrière n°1982 du 28 juillet 2006
a écrit :
La canicule dans les entreprises : une exploitation d’enfer!
ll a fallu quatre morts, quatre travailleurs directement victimes de la canicule pendant leur travail - et ce bilan risque malheureusement d’être provisoire - pour que l’on fasse une fois de plus le constat qu’aucune obligation ne figure dans le code du travail imposant à un patron de réduire les activités dans son entreprise, ou même de les arrêter, si nécessaire, quand les conditions climatiques y deviennent insupportables, et peuvent y devenir mortelles.

Pourtant ce n’est pas la première fois qu’une vague de chaleur de cette importance se manifeste dans ce pays. Sans même éplucher les statistiques, il est certain que des morts au travail provoquées par la chaleur, il y en a déjà eu. En 2003, le nombre considérable des morts a sans doute masqué le nombre de ceux qui ont succombé victimes de la chaleur au travail, mais aussi victimes de la rapacité de leurs exploiteurs. D’ailleurs, il n’y a pas besoin que les coefficients atteignent le degré 4, qui marque le niveau de canicule, pour que les conditions de travail dépassent, dans nombre d’ateliers, les limites du supportable.

Car pour les patrons, pas de répit ni de temps morts pour faire du profit. L’expression «suer sang et eau» n’est pas qu’une image, elle est trop souvent une réalité immédiate, concrète, subie par des milliers d’hommes et de femmes au travail. Quand dans des entreprises, on trouve des bureaux disposant de l’air conditionné (en dehors de ceux des cadres dirigeants), des salles climatisées, c’est bien souvent parce qu’il faut éviter la surchauffe pour que les systèmes informatiques fonctionnent. On est bien moins attentionné pour les salariés. Dans la plupart des cas, rien n’est prévu. Ni pour ceux qui travaillent à l’extérieur (dans la construction, dans l’entretien des routes, sur les voies de chemin de fer, dans le transport, car nombre de camions n’ont pas la climatisation) ou dans des locaux qui sont peut-être adaptés aux machines mais pas aux travailleurs qui les font fonctionner (avec des verrières, des toitures métalliques). D’autant que, la plupart du temps, ces machines génèrent une chaleur qui ajoute à la température ambiante.

Un reportage télévisé montrait récemment une fonderie d’aluminium où il faisait déjà 60° à l’arrivée de l’équipe du matin! Sans parler de cette usine des Vosges qui fabrique des climatiseurs, où il fait 40° dans les ateliers et où les salariés se battent pour avoir... la climatisation! Autre exemple avec les constructeurs automobiles qui proposent leurs voitures avec climatisation en option pour 1 euro supplémentaire mais refusent d’investir pour l’installer dans leurs ateliers. Ces situations n’ont rien d’exceptionnel.

Le code du travail est muet sur cette situation, et se limite à quelques considérations d’ordre général sur la protection de la santé des salariés. Quant à la Caisse nationale d’assurance maladie, elle «recommande» d’évacuer les bureaux où la température dépasse les 34°. Il existe, il est vrai, dans la législation un «droit de retrait» qui autorise les salariés à arrêter le travail s’ils estiment qu’il y a un «danger grave et imminent» pour leur santé. Mais qui est en situation de juger qu’il se trouve en «danger grave et imminent», et surtout de s’autoriser à arrêter son travail, dans un cadre où ce sont les patrons et leur maîtrise qui seuls décident de l’application du règlement intérieur?

La canicule actuelle ne fait que révéler ce qui existe et subsiste depuis des décennies: ce n’est pas le «législateur» qui se préoccupera de mettre certaines limites à l’exploitation... si les travailleurs eux-mêmes ne les imposent pas.

Henri MARNIER
lenzo
 
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Message par Louis » 26 Juil 2006, 22:21

a écrit : les inspecteurs du travail sont en sous effectif depuis maintenant dix ans, ni le ps ni l'ump n'a changé cela.


Oh ça c'est pas vrai : ils ont au contraire aggravé la situation ! :wub:
Louis
 
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Message par lenzo » 26 Juil 2006, 22:23

Dans Le Figaro du 27 juillet :
a écrit :L’un avait 53 ans, l’autre 44. Le premier était ouvrier de chantier à Mâcon (Saône-et-Loire), le second électricien à Dunkerque (Nord). Dans les deux cas, il s’agit d’hommes d’âge moyen et expérimentés. Ces derniers jours, tous deux sont morts d’un « coup de chaud » sur leur lieu de travail. Le même sort est arrivé à un couvreur dans le Morbihan et à un chauffeur-livreur des Landes(...)
Ni l’ouvrier, ni l’électricien décédés n’étaient directement employés par leur entreprise. Le premier, mort mercredi à Mâcon, était un intérimaire. Le travailleur de Dunkerque, lui, était salarié d’une petite entreprise de Gravelines, et intervenait sur le site de l’usine Arcelor de Dunkerque comme sous-traitant. Les intérimaires et les sous-traitants sont-ils des publics à risque ? « Un intérimaire bénéficie des mêmes droits qu’un salarié », assure Anaïk Cucheval à la fédération du bâtiment. Max Vincent est plus nuancé. « Théoriquement, un intérimaire a droit aux mêmes conditions de travail », mais « dès qu’il y a des heures supplémentaires ou un travail pénible à faire, on confie ça aux intérimaires qui ont besoin d’argent ».

Pour Michel Ricochon, « les intérimaires ne sont pas forcément plus exposés que les autres ». La différence, de son point de vue, tient à ce qu’ils « connaissent moins bien les rythmes de travail ». La solution ? « Faire attention à leur formation au risque canicule ». Mais pas question de lier leur condition d’intérimaire et à leur décès. « Il faut faire attention aux interprétations, il y a aussi la question de la physiologie ».

Au ministère du travail, on assure en tous cas que ces deux décès ont soulevé des questions quant à la loi. « On va y réfléchir et prendre du recul, pour se poser la question d’une évolution de la législation », afin de rendre plus précises les obligations des employeurs en cas de forte chaleur.


Et un lien pour s'appuyer sur le peu de législation existante :rtfm: :mesures prévues par le code du travail
lenzo
 
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Message par pelon » 26 Juil 2006, 23:03

a écrit :
Canicule à Citroën-Aulnay (Seine-Saint-Denis)

À l’usine Citroën d’Aulnay, les conditions de travail ont été encore aggravées avec la canicule. La direction du site qui se vante d’avoir pris des mesures anti-chaleur a seulement décidé de distribuer de l’eau (deux petites bouteilles de 50 cl par personne, et seulement en équipe d’après-midi) et d’accorder des pauses supplémentaires.

Dans la réalité, les pauses supplémentaires de dix minutes ne sont attribuées que si la température atteint 32° au thermomètre de la direction, installé à l’extérieur, dans un endroit aéré et à l’ombre. Mais quand la température atteint ce seuil, dans les ateliers, elle est souvent encore supérieure de cinq ou six degrés.

Sur les parkings de stockage des véhicules neufs, les conditions de travail sont particulièrement difficiles: il n’y a pas d’ombre, le macadam est surchauffé, les habitacles des voitures sont irrespirables et les volants brûlants. Les ouvriers chargés de monter les voitures sur les trains, en plein soleil et dans un environnement métallique surchauffé, subissent particulièrement cette chaleur.

À plusieurs reprises, la direction a eu le culot de décréter qu’il ne faisait que 31,8°, et qu’il n’y aurait donc pas de pause chaleur. Mais dans certains secteurs, les ouvriers ont réagi en décidant de faire durer un peu plus les pauses normales, et pour quelques-uns d’arrêter le travail pour s’accorder eux-mêmes une pause supplémentaire.

Au Ferrage, le directeur a même fait couper la climatisation de certains bureaux de techniciens pour des raisons d’économie.

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Message par pelon » 26 Juil 2006, 23:04

a écrit :
Canicule à Renault-Flins (Yvelines)

À Renault-Flins, pour lutter contre la canicule, les ouvriers de chaîne reçoivent en tout et pour tout une bouteille d’eau chaque jour. Mais la «générosité» patronale s’arrête là. À ceux qui demandent des pauses supplémentaires, dans les ateliers à verrières comme en Mécanique, où les températures sont les plus élevées, les chefs répondent que ce n’est pas de leur ressort.

Heureusement, il y a des installations qui tombent en panne -jusqu’à trois quarts d’heure un jour, voire deux heures un autre jour au Montage- qui permettent de récupérer un peu.

Cela dit, il est choquant d’entendre dire à la télévision ou à la radio que, dans les entreprises, des pauses supplémentaires sont attribuées aux ouvriers pour faire face à la canicule. Comme si c’était un fait bien établi. Ceux qui affirment cela devraient d’abord venir voir comment cela se passe à Flins avec des ateliers surchauffés, les mêmes cadences que d’habitude et pas une minute de repos en plus.

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Message par pelon » 26 Juil 2006, 23:05

a écrit :
Canicule à Michelin - Saint-Doulchard (Cher)

La canicule s’est installée et dans les ateliers, les thermomètres affichent 36° de 15 heures à minuit et ne descendent plus en-dessous de 30° ou 31°. Sur les boudineuses, là où la gomme est travaillée ou aux Cuissons, on dépasse les 44° ou 45°. Mais jusque-là, la direction n’avait pas jugé bon de prendre des mesures sanitaires nous permettant de mieux supporter ces températures.

Un petit vent de mécontentement commençait à souffler dans les ateliers. À la demande de quelques travailleurs, la CGT a alors lancé une pétition exigeant la possibilité d’utiliser toutes les douches à n’importe quel moment de la journée, ainsi que la réouverture des douches de l’atelier Z qui vient de fermer.

90% des agents de production ont signé la pétition qui, le jour même, a été déposée à la direction. Après une petite hésitation, celle-ci a accepté nos revendications.

Chacun est satisfait d’avoir imposé un droit évident à l’hygiène. Mais on constate aussi que même pour cela, rien n’est évident pour la direction, à qui il a fallu rappeler collectivement des droits élémentaires.

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Message par pelon » 26 Juil 2006, 23:05

a écrit :
Canicule à Peugeot-Poissy (Yvelines)

À Peugeot-Poissy, les mesures anti-canicule se limitent à une distribution parcimonieuse de petites bouteilles d’eau de 25 cl graduée en fonction de la montée du mercure: une à 28°, deux à 30°, pas une de plus. Et il faut attendre 33° à l’extérieur de l’usine pour avoir droit à une et une seule pause de 10 minutes, en plus des deux pauses quotidiennes de 8 et 13 minutes pour une journée complète de travail.

Par contre, pour le travail supplémentaire, la direction n’y va pas avec le dos de la cuillère: 55 minutes de plus par jour ont été programmés de lundi à jeudi pour l’équipe du matin sur une ligne de montage.

C’est de l’eau et des pauses en plus dont nous avons besoin, pas des heures de travail en plus.

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Message par pelon » 26 Juil 2006, 23:08

a écrit :
La canicule dans les entreprises : une exploitation d’enfer!

ll a fallu quatre morts, quatre travailleurs directement victimes de la canicule pendant leur travail - et ce bilan risque malheureusement d’être provisoire - pour que l’on fasse une fois de plus le constat qu’aucune obligation ne figure dans le code du travail imposant à un patron de réduire les activités dans son entreprise, ou même de les arrêter, si nécessaire, quand les conditions climatiques y deviennent insupportables, et peuvent y devenir mortelles.

Pourtant ce n’est pas la première fois qu’une vague de chaleur de cette importance se manifeste dans ce pays. Sans même éplucher les statistiques, il est certain que des morts au travail provoquées par la chaleur, il y en a déjà eu. En 2003, le nombre considérable des morts a sans doute masqué le nombre de ceux qui ont succombé victimes de la chaleur au travail, mais aussi victimes de la rapacité de leurs exploiteurs. D’ailleurs, il n’y a pas besoin que les coefficients atteignent le degré 4, qui marque le niveau de canicule, pour que les conditions de travail dépassent, dans nombre d’ateliers, les limites du supportable.

Car pour les patrons, pas de répit ni de temps morts pour faire du profit. L’expression «suer sang et eau» n’est pas qu’une image, elle est trop souvent une réalité immédiate, concrète, subie par des milliers d’hommes et de femmes au travail. Quand dans des entreprises, on trouve des bureaux disposant de l’air conditionné (en dehors de ceux des cadres dirigeants), des salles climatisées, c’est bien souvent parce qu’il faut éviter la surchauffe pour que les systèmes informatiques fonctionnent. On est bien moins attentionné pour les salariés. Dans la plupart des cas, rien n’est prévu. Ni pour ceux qui travaillent à l’extérieur (dans la construction, dans l’entretien des routes, sur les voies de chemin de fer, dans le transport, car nombre de camions n’ont pas la climatisation) ou dans des locaux qui sont peut-être adaptés aux machines mais pas aux travailleurs qui les font fonctionner (avec des verrières, des toitures métalliques). D’autant que, la plupart du temps, ces machines génèrent une chaleur qui ajoute à la température ambiante.

Un reportage télévisé montrait récemment une fonderie d’aluminium où il faisait déjà 60° à l’arrivée de l’équipe du matin! Sans parler de cette usine des Vosges qui fabrique des climatiseurs, où il fait 40° dans les ateliers et où les salariés se battent pour avoir... la climatisation! Autre exemple avec les constructeurs automobiles qui proposent leurs voitures avec climatisation en option pour 1 euro supplémentaire mais refusent d’investir pour l’installer dans leurs ateliers. Ces situations n’ont rien d’exceptionnel.

Le code du travail est muet sur cette situation, et se limite à quelques considérations d’ordre général sur la protection de la santé des salariés. Quant à la Caisse nationale d’assurance maladie, elle «recommande» d’évacuer les bureaux où la température dépasse les 34°. Il existe, il est vrai, dans la législation un «droit de retrait» qui autorise les salariés à arrêter le travail s’ils estiment qu’il y a un «danger grave et imminent» pour leur santé. Mais qui est en situation de juger qu’il se trouve en «danger grave et imminent», et surtout de s’autoriser à arrêter son travail, dans un cadre où ce sont les patrons et leur maîtrise qui seuls décident de l’application du règlement intérieur?

La canicule actuelle ne fait que révéler ce qui existe et subsiste depuis des décennies: ce n’est pas le «législateur» qui se préoccupera de mettre certaines limites à l’exploitation... si les travailleurs eux-mêmes ne les imposent pas.

Henri MARNIER

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