par revelo » 24 Juil 2006, 08:44
Je souhaiterais ajouter un extrait d'un de mes cours de CESF, sur les appelations données aux personnes en demande d'aide et leurs impacts sur l'accompagnement social : "Client, érémistes, SDF, ..."
Les appelations données aux personnes en demande d'aide peuvent induire des éléments porteurs s'inscrivant dans le respect des personnes comme "Madame, Monsieur" mais aussi des éléments freins s'inscrivant dans la stigmatisation des personnes.
Cette perception est toutefois à nuancer bien que dans le secteur socio-éducatif, un "déferlement" sémantique existe. L'observation montre qu'à "l'endroit de la prise en charge des personnes, il semble qu'un impossible à dire se manifeste".
> Les termes qui peuvent induire un respect des personnes accueillies
Dire "Bonjour Madame X" à l'encontre d'une personne qui vient rencontrer un travailleur social va conforter cette personne dans son besoin d'être reconnue. En l'appelant par son nom, il lui est signifié qu'elle appartient à un groupe social, qu'elle y est intégrée. Les personnes en demande d'aide sont très sensibles au vocabulaire utilisé pour les désigner. Même si les personnes appartiennent à un même groupe: femmes isolées, personnes SDF, chaque personne garde malgré tout une dimension micro-sociale. Cette personne peut dire "je", même si elle peut également dire "nous" lorsqu'elle évoque le groupe auquel elle est affiliée. L'appelation ne doit pas mettre en avant ce qui caractérise la personne: Madame X sera toujours Madame X même si elle est handicapée ou SDF. Aussi les appelations sont respectueuses de l'intégrité et de l'identité des personnes en difficulté.
> Les termes qui peuvent induire une stigmatisation
Selon la pathologie ou la difficulté: les termes utilisés sont généralement péjoratifs: "pimpin, zinzin, mongol" pour mongolien, "carac" pour caractériel, fou, ou plus simplement malade mental. Pour le handicap physique: "IMOC, tétra, légume, grabataire" et parfois même l'appareil qui sert à pallier ce handicap, un fauteuil... ou la loi qui a permis son placement, un creton... le handicap social, cassos pour un cas social, toxico, SDF, Erémiste, sans logis, précaire...
Dans les services sociaux, un certain nombre de termes visent une généralité. Les appelations données sont: personnes en difficulté, voire en très grande difficulté, en souffrance, voire en très grande souffrance, les exclus, les plus démunis, les personnes en demande d'aide, les personnes précarisées, les personnes accompagnées, les personnes suivies, les personnes en charge...
Toute une série de termes désignent les personnes à partir de ce que les professionnels diagnostiquent comme étant "leur manque". C'est le monde des "sans": sans abris, sans emploi, sans domicile, sans famille...
> Le sens pouvant être attribué à ces termes
Il semble qu'ils désignent dans l'ordre social la place de ceux qui portent les "stigmates" du désordre. Stigmatiser une partie du corps social sert avant tout au reste de la communauté à se rassurer quant à son appartenance à une certaine normalité. Et plus la norme vacille et plus il faut passer à la trappe des mots et des actes des parties les plus larges de populations.
Albert F., médecin psycho-thérapeute: "C'est sans doute une des raisons profondes qui fait que dans un pays riche comme la France, alors que depuis longtemps on sait ce qu'il faudrait faire pour que les choses changent, pour que l'exclusion soit en grande partie résorbée, rien n'est fait. Rien n'est fait parce que cette distribution des cartes joue son rôle: celui de maintenir un semblant de consistance dans une société en pleine déconstruction".
J'ajouterais que si les "clochards" boivent beaucoup d'alcool, c'est justement pour oublier qu'ils sont au ban de la société et ignorés de la majorité de la population qui voit en eux des fainéants et des profiteurs, et qui surtout ne veux surtout pas voir derrière ces gens là ce qu'ils étaient avant ni comprendre pourquoi ils en sont arrivés là, et pourtant cela peut nous arriver à tous...