Informations Ouvrières N° 748 - L'éditorial du 22 juin
Le grand bradage
Pour ceux d’entre vous qui êtes internautes, n’hésitez pas à vous connecter sur le site : http://www.minefi.gouv.fr/cessions (lire page 3). Vous y découvrirez le catalogue, photographies à l’appui, des immeubles publics appartenant à l’Etat vendus au cours de l’année 2005 ou mis en vente pour 2006 : bâtiments des ministères de l’Education nationale, de l’Economie, de la Défense, de l’Agriculture, etc. Certaines annonces portent même un petit drapeau britannique : en cliquant dessus, on accède à la version en langue anglaise…, ce qui facilite le pillage par les fonds spéculatifs nord-américains !
De ce bradage, le gouvernement est fier apparemment, puisqu’il a installé, ce 19 juin 2006, un « Conseil de l’immobilier de l’Etat », dont la fonction, tenez-vous bien, est de tenir « ses engagements en matière de rythme de cessions d’immeubles de l’Etat » !
Le communiqué du gouvernement se félicite que l’Etat ait liquidé pour 170 millions d’euros d’immeubles en 2004, pour 630 millions d’euros en 2005, et se fixe 480 millions d’euros pour 2006 !
Plus d’administrations publiques, plus de ministères, plus de grands services de l’Etat (on comprend l’annonce, la semaine dernière, de 19 000 suppressions d’emplois dans la fonction publique !). Sous les coups de boutoir du pacte de stabilité de l’Union européenne, l’Etat n’a qu’un objectif : détruire tout l’édifice des institutions qui organisent la société.
Que restera-t-il après cela ?
Au même moment, la polémique enfle sur l’avenir de GDF. Député UMP et rapporteur général du budget, Gilles Carrez est partisan de la fusion Suez-GDF. Mais, explique-t-il (Le Figaro, 17 juin), si celle-ci échouait, « la seule issue envisageable consisterait à reconstituer un monopole public avec EDF ». Pourquoi pas, en effet ? Oui mais, faut-il le rappeler, lors du sommet de Lisbonne (mars 2000), Chirac et Jospin (alors Premier ministre) avaient ensemble approuvé la directive européenne de déréglementation-privatisation de l’énergie. Et Carrez lui-même souligne que « le gouvernement français » est dans « l’obligation » de « transposer une directive européenne pour organiser l’ouverture du marché français de l’énergie ».
Peut-on laisser faire ?
On brade et on liquide le patrimoine public, les administrations de l’Etat, les services publics arrachés à la Libération. Que restera-t-il après ? Que restera-t-il de ce pays ?
S’adressant aux maires de France, des élus et des responsables politiques ont tenu à leur présenter les conclusions de la deuxième convention nationale tenue à Paris les 27 et 28 mai derniers. Ils écrivent : « Le modèle républicain, héritier de la grande Révolution de 1789 et auquel adhèrent tous les démocrates et républicains dans notre pays, est menacé de disparaître. » Et ils ajoutent que, n’étant pas « partisans du tout ou rien », ils proposent de soutenir « tout candidat qui s’engagerait à faire ne serait-ce qu’un pas (…) réel et concret remettant en cause le carcan de l’Union européenne et s’engageant dans la voie de la restauration de la démocratie » (lire page 8).
A l’heure où la politique de l’Union européenne menace de tout mettre à bas, cette proposition ne revêt-elle pas la plus grande urgence ?
Daniel Gluckstein