(Le Monde @ 2 mars 2006 a écrit :Le président du conseil régional d'Ile-de-France réfute les soupçons de prise illégale d'intérêts
L'adjointe (PS) au maire, chargée de l'urbanisme et des affaires économiques, de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), Christine Bensoussan, a été longuement interrogée par la brigade financière, au début de la semaine du 20 février. Elle a été laissée en liberté au terme de sa garde à vue. Proche du président (PS) du conseil régional d'Ile-de-France, Jean-Paul Huchon - maire de Conflans de 1994 à 2001 -, Mme Bensoussan avait été convoquée dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Paris en novembre 2004. En octobre 2004, le procureur avait reçu une lettre anonyme dénonçant l'existence d'emplois fictifs au conseil régional, dans l'entourage de son président, et d'un système de favoritisme dans l'octroi de certains marchés.
Mme Bensoussan, conseillère technique au cabinet de M. Huchon, est soupçonnée d'avoir bénéficié d'un emploi de complaisance. "C'est faux, s'insurge M. Huchon, interrogé par Le Monde. Mme Bensoussan travaille à la direction du développement économique, de l'emploi et de la formation professionnelle. Elle a été recrutée en 2000 par le directeur de l'époque. Nous avons donné aux enquêteurs tous les éléments le prouvant, comme, par exemple, des propositions de promotion rédigées par sa hiérarchie."
La brigade financière tente également de vérifier la réalité de l'emploi, au conseil régional, de l'épouse de M. Huchon, Dominique Le Texier. Elle s'intéresse aussi à son passé professionnel. M. Huchon, président de la région depuis 1998, aurait fait salarier ces dernières années sa femme par trois sociétés de conseil et de communication. Or, ces dernières auraient bénéficié de contrats avec la région, ce qui pourrait relever de la "prise illégale d'intérêts".
Depuis la réélection de M. Huchon en avril 2004, son épouse, qui a le statut d'intermittente du spectacle, est salariée par la région, où elle s'occupe notamment de l'organisation du festival international du film d'environnement. "Ma femme travaille dans le secteur de l'audiovisuel depuis trente ans, explique M. Huchon. A ce titre, elle a oeuvré pour le festival du film de Paris, sponsorisé à hauteur de 100 000 euros par la région. Alors, c'est vrai, ma femme a été employée comme intermittente, une dizaine de semaines, pour des sommes ridicules, entre 2002 et 2004." Il confirme l'embauche à son cabinet, en 2004, de son épouse : "Elle organise et gère le festival du film d'environnement. Elle travaille effectivement : elle a dû voir 500 ou 600 films pour cette manifestation, qui a attiré 8 000 spectateurs. Elle bénéficie d'un salaire de cadre moyen."
La réalité de l'emploi d'un ancien directeur de la communication du conseil régional, Dominique Merchez, a été également mise en doute par le "corbeau". "C'est aberrant : de 1998 à 2005, j'ai été successivement directeur de la communication puis conseiller technique au cabinet de M. Huchon, ce que tout le monde peut confirmer", affirme M. Merchez, qui pense avoir été victime de "jalousies politiques".
La brigade financière s'intéresse par ailleurs aux liens unissant depuis 1994 M. Huchon à la société de consultants Progress, dont il préside aujourd'hui le conseil d'administration, après en avoir été le PDG. Les policiers ont été intrigués de découvrir que Progress avait, jusqu'à une date récente, pris en charge le loyer de l'appartement de M. Huchon, dans le 15e arrondissement de Paris. " C'était un avantage en nature, pour des réceptions de clients à mon domicile. Nous avons réduit la voilure chez Progress, je paye aujourd'hui mon loyer", confirme M. Huchon. Le président de la région justifie son activité chez Progress par le souhait de n'avoir "jamais voulu dépendre de la politique pour vivre. Au conseil régional, je touche une indemnité de l'ordre de 5 000 euros. Or, j'ai des dettes, des enfants à charge. Il n'est pas choquant que j'aie une activité complémentaire."
"RIEN D'ILLÉGAL"
Les vérifications n'ont pas, pour l'heure, permis d'établir si Progress avait, dans le même temps, été sous contrat avec la région Ile-de-France. " J'ai fourni aux policiers la longue liste des fournisseurs du conseil régional, Progress n'y figure pas. Je ne suis pas un branque, j'ai une éthique !", assure le président du conseil régional. En revanche, la société aurait été prestataire de services pour d'autres conseils régionaux. M. Huchon ne comprend pas que les policiers soient venus perquisitionner son domicile, en mars 2005, sur ordre du parquet de Paris (Le Monde du 3 mars 2005) : "J'étais en vacances au ski. Ils ont saisi un simple bulletin de salaire de mon épouse, et c'est tout. Sur la foi d'une seule lettre anonyme. Qu'on me foute la paix !"
M. Huchon a croisé, lors de plusieurs manifestations, le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy. " Il m'a demandé ce qui se passait, je lui ai dit que je ne comprenais pas. Je ne sais pas ce que les policiers cherchent, mais ils ne trouveront rien d'illégal", affirme-t-il.
Gérard Davet et Fabrice Lhomme