a écrit :D'ici à 2010, 100 milliards d'euros de participations de l'Etat à céder
LE MONDE | 15.12.05 | 14h11
Une des vingt préconisations du rapport Pébereau, présenté mercredi 14 décembre, est de consacrer "les recettes exceptionnelles au désendettement" de la France. Sont notamment visées les ventes d'actifs publics. Ces derniers s'élèvent à quelque 100 milliards d'euros, selon la commission conduite par le président de BNP-Paribas, qui a évalué la dette publique à 1 100 milliards. L'estimation du montant des actifs publics a été fournie par Bercy. Et représente les biens qui pourraient être cédés à moyen terme, d'ici 2010.
A condition de ne pas souscrire de nouveaux emprunts, ce programme de cessions permettrait, à lui seul, de revenir à un niveau d'endettement de 60 % du PIB en 2010, l'objectif fixé par le premier ministre, mercredi 14 décembre.
Le montant des actifs de l'Etat est même très nettement supérieur au chiffre évoqué par la commission Pébereau. Au 13 décembre, la valorisation des participations des onze sociétés cotées dans lesquelles l'Etat est actionnaire s'élevait à un peu plus de 104 milliards d'euros. Parmi les trois principales "pépites" détenues, celle d'EDF (89,64 %) est estimée à 52,9 milliards d'euros, celle de Gaz de France (80,19 %) à 19,6 milliards d'euros et celle de France Télécom (32,46 %) à 18 milliards d'euros. Il faut ajouter à cette somme 104 millions d'euros provenant de participations dans des sociétés cotées dans lesquelles les pouvoirs publics sont ultraminoritaires.
En ce qui concerne EDF ou GDF, la loi permet à l'Etat d'abaisser encore sa participation dans ces deux sociétés. Mais il est peu probable que le gouvernement utilise cette possibilité pour éviter de donner des arguments à ceux qui l'accusent de vouloir mener la "privatisation rampante" de ces deux services publics. En ce qui concerne la société Alstom, valorisée à 1,4 milliard d'euros, EADS (4 milliards d'euros) ou encore Thales (2 milliards d'euros), la marge de manoeuvre du gouvernement est bridée par des enjeux industriels complexes.
Même si, officiellement, aucune cession n'est à l'ordre du jour, le jeu est en revanche plus ouvert pour France Télécom, Air France (853 millions d'euros), Renault (3 milliards d'euros) ou Safran (2,5 milliards d'euros).
Reste la partie immergée de l'iceberg : toutes les sociétés qui ne sont pas cotées et dont l'estimation est, évidemment, plus délicate. Mais le gouvernement actuel ne semble pas très pressé de mettre ces entreprises sur le marché. Dominique de Villepin a fermé la porte à la privatisation d'Areva et seule celle d'Aéroports de Paris est programmée pour le premier semestre 2006. De surcroît, plus les échéances électorales approcheront, plus la mise en place d'un nouveau plan de cession sera difficile à imposer, surtout après les polémiques suscitées par la privatisation des sociétés d'autoroutes.
RECETTES TIRÉES DE L'IMMOBILIER
Reste un domaine dans lequel l'Etat peut récupérer de l'argent en étant relativement à l'abri de critique : l'immobilier. Après un démarrage laborieux, le programme de vente des immeubles de l'Etat s'accélère. En avril 2003, Jean-Pierre Raffarin, alors premier ministre, avait annoncé " la vente immédiate d'un million de mètres carrés de bureaux de l'Etat" dans le but de récupérer 500 millions d'euros en 2004 et autant en 2005. Le programme a pris du retard avec 170 millions seulement réalisés en 2004. L'objectif de 850 millions d'euros de recettes fixé par la loi de finances 2005 a été réduit en juin par Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, à un montant plus réaliste de 600 millions. Fin 2005, les rentrées dépassent cette fois l'objectif et avoisinent les 650 millions.
La mission interministérielle pour la valorisation du patrimoine de l'Etat, créée en avril 2004, et le service des domaines ont identifié les immeubles cessibles rapidement, parmi les 4 800 qui appartiennent à l'Etat et qui sont globalement estimés à 12 milliards d'euros. Le service des domaines a lancé des appels d'offres, notamment pour les plus beaux immeubles parisiens. Ainsi, l'ancien siège de l'ENA, rue de l'Université, a-t-il été racheté par l'Institut d'études politiques de Paris pour 43,65 millions d'euros.
Prudent en 2006, le ministre délégué au budget a inscrit 400 millions d'euros de produits de cession d'immeubles. Les recettes sont affectées à un compte spécial et rétrocédées à 85 % aux ministères concernés s'ils doivent se reloger, à 50 % dans le cas contraire. Ces recettes ne servent donc pas à réduire la dette.
Joël Morio et Isabelle Rey-Lefèbvre