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Message Publié : 14 Avr 2005, 23:30
par Valiere
Fédération des Associations de Solidarité avec les Travailleurs Immigrés


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Communiqué de l'ASTI 14, la section LDH de Caen et Trait d'Union


COMME SA SŒUR MOUNIA,
MUSTAPHA SEGHROUCHNI DOIT RESTER EN FRANCE


La Préfecture du Calvados a octroyé, grâce à la mobilisation des lycéens et de la communauté scolaire du lycée Victor Lépine, un titre de séjour à Mounia Seghrouchni, avec la mention « vie privée et familiale ». Nous nous en réjouissons.

Elle refuse à son frère Mustapha le même sauf-conduit. Elle maintient sa décision de reconduite à la frontière sur la base d’une application stricte de la loi qui prévoit que la personne étrangère doit faire la preuve d’une présence continue d’au moins 10 ans sur le territoire français, sans omettre une seule année dans le rassemblement des preuves. Le maintien de la décision préfectorale vise à retrancher Mustapha de toute sa famille proche, parents, frères et sœur, pour une durée indéterminée. Par son travail honnête (déclaré, cotisant, contribuable régulier) depuis douze ans de présence en France, Mustapha contribue à équilibrer le budget d’une famille qui cherche à vivre modestement et normalement en France.

La préfecture fait état de tentative d’escroquerie financière et d’usage de faux-papiers. Par escroquerie financière, il faut entendre, au sens juridique du terme, l’établissement ou l’usage de faux-papiers, par exemple pour l’ouverture d’un compte bancaire, même si celui-ci doit être, par la suite, utilisé sans aucune malversation.

Bien entendu, l’usage de faux-papiers relève d’une infraction qui devrait faire l’objet d’une décision de justice. Mais un étranger en situation irrégulière peut-il vivre et faire vivre une famille sans disposer d’aucun papier ? Et l’infraction justifie-t-elle, avant même tout jugement, un renvoi dans le pays d’origine qui brise la vie d’un individu et déséquilibre celle de toute une famille ?

Un détail qui a son importance : le Tribunal d’appel de Caen avait annulé lundi la décision de mise en rétention administrative de Mounia et Mustapha et les avait assignés à résidence chez eux à Caen. Malgré la notification de cette décision au centre de rétention de Lille dès lundi, permettant une libération immédiate de Mounia et Mustapha, cette libération n’est intervenue que mardi à 11 heures. Ils n’ont pas été raccompagnés et ont dû prendre le train, via Paris, pour répondre à la convocation du Tribunal administratif siégeant à 16 heures ; ce qui les a empêchés de rencontrer leur avocate et de préparer leur défense.

Autre fait significatif : des pressions ont été exercées par la préfecture contre le droit à manifester des associations, des professeurs et des élèves en grève de soutien à leur camarade. Malgré cela, la mobilisation exemplaire des lycéens et des professeurs a permis la régularisation de la situation de Mounia, qui a obtenu un titre de séjour avant l'audience. C’est ainsi que la préfecture a "acheté" la paix civile et l’ordre public.

La dissociation de deux situations voisines, celles du frère et de la sœur montre l’arbitraire des décisions préfectorales. Pourquoi ce «deux poids, deux mesures» ? Ils jettent le discrédit sur toute une famille en laissant entendre qu’une jeune fille déjà bien insérée dans notre société et soutenue par toute une collectivité scolaire serait l’objet de mauvaises influences familiales.

Mounia a-t-elle eu la "chance" d’être lycéenne alors que son frère est un ouvrier ? Un jugement administratif a entériné l’arrêté de reconduite à la frontière émis par la Préfecture. Ainsi, selon que vous soyez ce jardinier marocain ou cette étudiante, des autorités, préfecture, tribunal, vous désigneront comme délinquant ou intégrable.

L’action de soutien à Mustapha est légitime. Elle ne saurait s’éteindre comme pour tous ces sans-papiers qui ne mettent en danger ni la République, ni le Droit.

Nous demandons au Préfet du Calvados de bien vouloir surseoir à la décision de reconduite de Mustapha Seghrouchni et de régulariser sa situation.