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Message Publié : 27 Jan 2005, 10:20
par Valiere
ARGUMENTS POUR LE SOCIALISME
Transformer la LCR, transformer le mouvement ouvrier pour changer le monde
Bulletin édité par des militants de la LCR Numéro 8 – 25 janvier 2005
Notre site Web : http://site.voila.fr/arg4soc/index.html / Contact : [url=mailto:arg4soc@voila.fr]arg4soc@voila.fr[/url]

a écrit :Sommaire :
- Editorial : Non au projet de « Constitution » européenne ! Pour une campagne contre la Constitution ET contre Chirac !
- Irak : établir le camp des travailleurs !
- Brèves de janvier
- Des origines d’une inculture et (très) brève introduction à la laïcité

Editorial :
Non au projet de « Constitution » européenne !
Pour une campagne contre la Constitution ET contre Chirac !

L’engagement de la LCR dans la campagne contre le projet de « Constitution » européenne et pour la victoire du NON au  référendum est confirmée par la résolution adoptée par la DN des 8 et 9 janvier 2005 (Extraits :  « cela confirme notre détermination à jeter toutes nos forces dans la bataille du « non » de gauche, anticapitaliste et antilibéral… »).

L’appel des 200 est conçu comme le cadre central de la campagne de masse. Rouge consacre un dossier chaque semaine à l’analyse et à la dénonciation des effets du projet de Constitution, la brochure spéciale de la LCR se vend  très bien, les stocks d’affiches ne moisissent pas dans les locaux…
Néanmoins, nous voulons soulever quelques éléments qui font mérite une discussion plus approfondie.

Quel genre de Non voulons-nous voir triompher ?
Tout le monde répondra « un NON de gauche, anticapitaliste et antilibéral, internationaliste… pour sanctionner Chirac, son gouvernement, la droite et le patronat… ». Nous affirmons que ce n’est pas suffisant. Notre campagne doit viser la « Constitution » ET Chirac, donc il ne saurait être question de se contenter de le « sanctionner », il faut poser la question du départ de Chirac et du gouvernement, ouvertement, ce que nous aurions du faire dans les grèves du printemps 2003, dans les élections de 2004, et dans les grèves du printemps 2004.

Depuis le funeste vote Chirac du 5 mai 2002, la LCR ne vise qu’à « stopper, sanctionner, faire reculer le gouvernement, imposer d’autres choix ». A de rares occasions, la perspective de chasser Chirac a été évoquée mais bien trop furtivement, sans constance. On a beau clamé qu’on ne veut pas attendre 2007, la perspective de la seule sanction n’est pas celle de chasser Chirac de suite, au plus tôt, elle revient en pratique à patienter jusqu’en 2007. 

D’autant plus que des éléments de crise à droite peuvent amener à un affaiblissement de Chirac dans son camp. Nous ne visons pas ici la possible résurgence d’une opposition souverainiste dont la bourgeoisie n’a pas besoin, les fractions du grand capital, celles qui donnent le la, imposent aux autres le cap de l’intégration européenne, quand bien même ce cadre de la concurrence exacerbée entre patrons sera mortel pour nombre d’entre eux. Ni le pantin Le Pen qui, s’il est ressorti du placard, jouera le rôle de l’épouvantail à faire peur aux enfants sages qui hésitent à voter pour le Oui.

Non, ce que nous avons en tête ce sont les signes donnés par le congrès de l’UDF des 22-23 janvier, par l’amendement Balladur au Parlement en vue d’élargir les compétences du Parlement contre la prééminence des prérogatives de l’exécutif en matière de législation européenne, ou le feu sous la cendre qui couve entre Sarkozy et Chirac. Nous voulons que Chirac tombe, non pas du fait de la bourgeoisie et de sa crise interne – nous ne verserons pas de larmes si çà se produit, mais ce n’est pas ce qui nous intéresse !-, mais bien du fait du rassemblement conscient des travailleurs pour faire chuter leur adversaire en chef et son projet de constitution, conçu en commun par les bourgeoisies d’Europe pour faire reculer les acquis des travailleurs du continent.

D’autant que Chirac est soutenu fermement par Hollande et la droite pro-Oui du PS, par les directions syndicales qui ont choisi le Oui (Pour l’instant, la CFDT et l’UNSA) ou qui se refusent à appeler au NON clair et net (la CGT, FO, la FSU, …). D’autant que dans ceux qui font campagne pour le Non, le poids de ceux qui prolongent leur vote Chirac du 5 mai 2002 en ne parlant que de l’Europe tout en épargnant le gouvernement n’est pas négligeable : nous parlons ici du PCF et de ses relais syndicaux. L’enjeu de notre campagne doit donc être de battre Chirac, ce qui passe par la défaite des soutiens de Chirac dans le mouvement ouvrier, qu’ils soient partisans du Oui ou du Non.

Cette façon de poser la question rejoint le bilan et le pourquoi de l’échec des grèves de 2003 et 2004. Les directions des grandes centrales syndicales ne conçoivent pas l’action syndicale en terme d’action indépendante, mobilisant sur les revendications sans égard pour la stabilité et la quiétude des gouvernements en place. Elles ne sont pas prêtes à engager de mobilisations sérieuses et conséquentes en partant de la satisfaction des besoins des salariés car elles ne veulent pas ouvrir de crise avec le gouvernement et le MEDEF. Au lieu de cela, elles enferment les salariés dans les « diagnostics partagés », les « nouvelles conquêtes » qui oublient de défendre les acquis antérieurs, les mensonges ou omissions sur la réalité des attaques patronales, et couronnement de cet édifice de trahison, elles font silence ou diversion sur l’un des aspects clefs de l’offensive patronale du moment : la décentralisation et les transferts de personnel aux collectivités locales !

La mise en place de la décentralisation, approuvée par le Parlement réuni en congrès en mars 2003, est l’un des aspects centraux de l’offensive de la droite et du patronat contre les acquis sociaux, contre l’égalité des droits, en lien direct avec les objectifs de privatisations voulues par la Commission européenne, avec les objectifs de déréglementation sociale, de la réforme-démolition des retraites décidée à Barcelone en 2002 aux termes de la directive « Bolkenstein » qui organise le dumping social généralisé à l’échelon du continent.

C’est pourquoi, l’un des aspects concrets de notre campagne doit résider dans le lien entre la nature du texte constitutionnel et les attaques immédiates en cours en France. La France des régions, de la décentralisation et de la Réforme de l’Etat, c’est la mise en application de l’Europe de Länder, fondée sur l’inégalité des droits et l’inégalité du droit, c’est à dire la loi du contrat, la seule autorisée par le dogme constitutionnalisé de la « concurrence libre et non faussée ».

C’est pourquoi, le silence actuel de Rouge sur la décentralisation et les transferts de personnels en jeu immédiatement dans l’Education nationale et à l’Equipement affaiblit notre campagne. Alors que les présidents de région de gauche (22 sur 23 !) viennent de dire qu’ils refusaient les transferts de personnels en l’état, sachant qu’ils seront très rapidement confrontés au dilemme de l’augmentation de la fiscalité locale ou de l’abandon de missions donc à des licenciements de fonctionnaires et à des fermetures de services, ne rien dire là dessus en faisant le lien avec les enjeux de la Constitution, et de ceux du maintien du pouvoir de Chirac revient à couper le pont entre les revendications immédiates des salariés et le nécessaire débouché politique.

Ce débouché se construira dans les luttes et par la clarté politique, et non dans l’alambique de savantes dissertations programmatiques, distillées goutte à goutte ! Les travailleurs ne peuvent se payer le luxe d’attendre ! Notre politique devrait se résumer ainsi : affirmer un double NON, Non à la Constitution, Non à Chirac !



Irak : établir le camp des travailleurs !

Les USA vont fêter les deux ans de leur « grande victoire contre l’Axe du Mal », c’est à dire contre Saddam Hussein et pour autant rien n’est acquis pour eux : le chaos gagne à chaque fois que le rouleau compresseur du Robotcop est censée éradiquée une fois pour toutes les foyers de résistance. L’offensive contre Fallouja en est une des dernières illustrations, avec son cortège de souffrances et  de victimes civiles prises entre les feux des hélicoptères et des chars porteurs de mort et la tactique du bouclier humain des milices islamo-baasistes.

Les USA n’ont pas réussi à stabiliser et à introniser durablement un régime ou une coalition à leur botte. Au contraire, le ferment d’une guerre civile latente entre chiites et sunnites s’avère être un facteur de crise permanent. La vie courante du pays, loin d’un retour à la paix et à une activité économique propice aux affaires, n’est que privations, chômage, attentats, campagne de terreur pour imposer le port du voile et l’exclusion des femmes de toute vie professionnelle, tensions et heurts avec les minorités nationales. En prime, les humiliations, les tortures et les viols des prisonniers, combattants réels ou simples victimes des rafles arbitraires, illustrent la loi historique qui veut que toute armée d’occupation illégitime ne peut garder les mains propres !

L’illégitimité de l’occupation ne peut que susciter la révolte permanente d’un peuple qui voit la machine impérialiste mettre les ressources pétrolières du pays dans sa poche, les compagnies US comme Halliburton empocher les bénéfices des contrats de reconstruction. Mais ce mouvement spontané de révolte ne peut avoir de portée progressiste tant que les facteurs politiques et militaires actifs que sont  les courants fondamentalistes, chiites ou sunnites, et les débris de la dictature baasiste n’auront pas été mis en échec et leur influence éradiquée. Cela est la tache du mouvement ouvrier, avec ses moyens propres et pour ses buts propres, simultanément contre l’impérialisme et contre la réaction.

Dans ce chaos, il n’y a qu’une seule source d’espoir : la reconstruction du mouvement ouvrier ! L’ampleur de cette tache est immense, après plus de 40 ans de répression impitoyable de ce qui fut autrefois un puissant mouvement syndical basé sur les industries pétrolières et l’un des plus grands partis communistes du monde arabe.

Rappelons qu’en 2003, ce fut grâce à la mobilisation héroïque des militants et militantes des organisations du mouvement ouvrier renaissant (Fédération IFWCU, Organisation Pour la Liberté des Femmes en Irak, UUI (Syndicat des chômeurs d’Irak), Parti Communiste-Ouvrier d’Irak ) que la tentative du gouvernement pro-US d’imposer la loi islamique, la Sharia, fut mise en échec.

Ce mouvement ouvrier renaissant est le seul espoir d’une solution politique et sociale où les droits humains, les droits démocratiques, les droits sociaux, ceux des femmes comme des minorités nationales ou religieuses, puissent trouver une garantie réelle. Ce mouvement ouvrier doit faire face à l’absence de démocratie, cette dernière n’ayant en aucune manière été apportée dans les fourgons de l’armée US, et aux coups sanglants qui lui sont portés par la « résistance ». Les grèves sont réprimées par le gouvernement pro-US et les islamistes assassinent des militants syndicaux ou de gauche. C’est pourquoi notre bulletin appelle ses lecteurs à participer à la campagne Solidarité Irak et à soutenir toutes les initiatives concrètes de soutien et d’aide aux organisations ouvrières ou féministes.

Présentation de Solidarité Irak : « Parce que nous nous sommes opposé-e-s à la guerre en 2003, nous nous opposons à l’occupation aujourd’hui. Parce que nous sommes des militant-e-s du mouvement social et féministe ici, nous soutenons le mouvement féministe et social en Irak. »
Sur le web : http://www.solidariteirak.org


Brèves de janvier

…1…Ce mois de janvier aura vu l’AGRIF animée par Romain Marie, le Führer-Cassoulet du courant intégriste Chrétiens-Solidarité, pilier historique du FN, gagner son procès en appel contre l’association AIDE qui agit pour la prévention du SIDA et l’aide aux malades. Et pas n’importe quel procès !

AIDE a été condamné pour … «racisme » , pour avoir commis le sacrilège, aux yeux des intégristes catholiques, d’associer cornettes en transes et capote dans une affiche percutante. Voilà un jugement très grave qui va faire jurisprudence au détriment des droits des femmes, des gays et lesbiennes, de la liberté d’expression  et de la laïcité ! Et qui va servir aux intégristes islamistes qui ne cessent  d’hurler au racisme « islamophobique » pour faire taire ceux qui s’opposent à eux.

Alors, camarades qui ne comprenaient rien à la laïcité, réfléchissez un peu !
A tous ceux qui, par aveuglement pseudo-anti-impérialiste, ignorance de l’histoire du combat pour la liberté de penser ou inconscience de la portée pratique de leur orientation, se sont faits les porteurs de valises des islamistes, nous disons : ouvrez les yeux !!

Dans ce combat douteux, allez-vous reprendre ces « acquis » du lepenisme …car il ne fait pas l’ombre d’un doute que les jésuites barbus, eux, vont les reprendre ? Qui ne voit que les arguments des intégristes catholiques et ceux des intégristes islamiques sont les mêmes : la religion ne saurait être critiquée, et critiquer une religion revient à faire œuvre de racisme ? Et qui ne voit que cette brèche ouverte par les éclaireurs fascistes va être exploitée par la plus influente des églises établies en France, à savoir la très catholique et romaine et son ardent serviteur, Nicolas Sarkozy, grand pourfendeur de Turcs et croisé OTANisé de l’ « Europe chrétienne » ?

…2…France-Info, dont l’orientation éditoriale n’est pourtant pas portée à gauche, a rapporté ce samedi 15 janvier, date de la célébration militante des 30 ans de la loi Veil, que jusqu’à ces derniers jours, le site Web du ministère de la santé indiquait des liens de sites anti-avortement, histoire sans doute d’accompagner sur le plan moral et idéologique l’offensive de remise en cause du droit des femmes à disposer de leur corps et du droit à la santé pour toutes et tous !
Une question : qui est le chef du ministre de la santé ? Chirac ! Pourtant, en mai 2002, on nous disait que Chirac était un rempart contre le fascisme, un démocrate, un moindre mal. On voit ce qu’il en est à l’usage !

…3…Lutte Ouvrière a pris position contre le projet de « Constitution européenne », en faveur du Non au prochain référendum. Fort bien ! Cela est sans conteste le résultat d’une saine pression de la classe ouvrière sur cette organisation qui ne veut pas apparaître, comme en 1992, en contradiction avec les aspirations et sentiments d’une couche militante de tradition CGT et /ou PC, dont LO a fait l’une de ses cibles privilégiées. Néanmoins, à la lecture de la déclaration issue du congrès de LO, on s’étonnera que les arguments mis en avant portent peu sur les aspects anti-capitalistes de la chose. C’est par des raisons, parfaitement correctes au demeurant, de laïcité, de droit au divorce ou de restriction du droit de circulation ou de budgets d’armement que LO justifie sa position. On s’étonnera du peu référence aux privatisations, au démantèlement des services publics et des droits sociaux, au dumping social que le dogme constitutionnalisé de la « concurrence libre et non faussée » va accélérer.

…4…La Lettre Rouge en date du 14 janvier informe les militants de la LCR de la récente rencontre entre une délégation de la direction de la LCR et  une délégation de la direction de LO. A cette occasion, LO a révélé qu’elle ne commencerait sa campagne pour le NON qu’une fois que Chirac aurait annoncé la date du scrutin. Voilà ce qui s’appelle respecter le calendrier institutionnel !
Ou bien, faut-il en déduire qu’aux yeux de LO, l’enjeu de ce référendum est mineur ?  Ou encore, que l’ampleur de la mobilisation pour le triomphe du NON est largement suffisante ?… alors que le front uni Chirac-Hollande pour le OUI se met en marche, alors que des organisations syndicales décisives comme la CGT, la FSU, FO, n’ont pas encore pris position pour le NON, après que le congrès national de Bobigny des SUD-Groupe Solidaires n’ait pas explicitement et clairement pris position en congrès pour le NON.

…5…Le samedi 22 janvier, le PT organise « sa » grande manif nationale pour le NON. Outre le fait que, comme à l’accoutumée, tout est fait pour que chacun reste dans son pré carré, on cherchera en vain la référence à Chirac dans les argumentaires du PT. Tout est de la faute à Bruxelles ! Certes, mais Chirac et son actuel gouvernement Raffarin, tout comme son précédent gouvernement Jospin-Gayssot-Voynet, ne participent-il pas des décisions prises à Bruxelles ?

…6… Le PT, dont ses militants investis dans la Libre Pensée, célèbre à sa manière le centenaire de la loi de 1905 de séparation de l’Eglise et de l’Etat. C’est mieux que de ne rien faire ! Cependant, pourquoi tendre à faire croire que la 5ème République serait la République ?  Ce n’est pas un élément nouveau, déjà dans sa campagne contre la décentralisation et la réforme constitutionnelle de mars 2003, le PT ne faisait pas la distinction entre la 5ème République et … la République (la vraie !) et par voie de conséquence, ne cibler pas Chirac !

…7…Le texte originel de l’Appel des 200, dit appel Copernic, en faveur du NON mentionne bien la phrase suivante : « Il [le projet de traité constitutionnel] remet en cause le principe de laïcité auquel nous tenons. » Pourquoi, depuis plusieurs semaines, cette phrase a-t-elle disparu de la page ad hoc du site Web de l’Appel ? Si c’est juste un oubli, il peut être réparé facilement.

Des origines d’une inculture et (très) brève introduction à la laïcité

La tradition politique et culturelle dont est issue la LCR depuis la création de son noyau originel dans les années 60’ n’a pas permis à notre organisation de saisir les acquis d’une question qui a pourtant occupé une grande place dans l’histoire du mouvement ouvrier du pays.

L’explication de cet état des choses renvoie à plusieurs facteurs que nous esquissons ici, sans chercher à approfondir. Il y a, d’une part, la perte de continuité provenant des crises successives du mouvement trotskiste en France, depuis les générations fondatrices du POI perdues à l’entrée ou pendant la 2ème Guerre mondiale, au courant des « droitiers » du PCI, autour d’Yvan Craipeau, sorti en 1947, et jusqu’à la scission de 1953 où, seule, la branche de ce qui deviendra le lambertisme a su garder une compréhension de cette tradition, quelque soit par ailleurs les travers historiques de ce courant.

Ensuite, pèse le fait sociologique, propre aux gens ayant vécu leur jeunesse durant les années 60’, qui est celui d’avoir vécu la crise de désaffection qui a touché l’Eglise catholique à cette époque. Cette crise qui s’est traduite par un effondrement des pratiques religieuses a fait oublier, un peu trop vite, aux nouvelles générations combien les hiérarchies religieuses, et la hiérarchie catholique en particulier, avait été un des piliers de l’ordre établi depuis la nuit des temps en France, combien les gardiens de l’ordre moral et social en soutanes et en cornettes avaient été un facteur quotidien d’oppression.

Il y a eu aussi une incompréhension de la nature du lien qui se maintenait entre les militants chrétiens sincèrement engagés dans le mouvement ouvrier et l’Internationale du Vatican, surtout après le tournant stratégique de Vatican II, tournant opéré par un appareil bureaucratique contre-révolutionnaire qui totalise des siècles d’expérience et qui sait bâtir ses plans à une échelle qui dépasse l’immédiateté de l’expérience, ou plutôt de l’inexpérience, juvénile. Ainsi, aujourd’hui, la sur-valorisation du courant de la Théologie de la Libération doit-elle être revue à l’aune de l’expérience désastreuse du gouvernement Aristide en Haïti et de celle du gouvernement Lula et de sa soumission à l’ordre libéral mondial.

Enfin, il y avait la culture PCF d’origine du noyau historique de la JCR de 1966 qui, mixée avec l’adaptation politique du pablo-mandélisme au stalinisme ou à ses variantes de gauche (« Ho-Ho-Ho Chi Min ! Che-Che Guevara ! »… ), a donné une absence totale d’intérêt pour cette question. Au mieux, la LCR est agnostique sur cette question, au pire elle se maintient dans l’ignorance ou l’aveuglement.

On pourrait rajouter que le traumatisme du stalinisme, sa pression sur le fragile mouvement trotskiste international marginalisé durant plusieurs décennies, et la trahison d’août 1914 précédemment, ont coupé le lien avec les acquis antérieurs de la 2ème Internationale et des penseurs marxistes d’avant 1914 sur la question. Pourtant, en relisant les écrits de Lénine entre 1902 et 1917, on peut voir que la revendication de la République laïque et démocratique était bien un acquis commun de toute la social-démocratie d’alors, conçue comme la lutte pour un cadre politique favorisant, ouvrant la voie de la conquête du pouvoir par les travailleurs.

La discussion de 1977-1979 autour du document « Démocratie socialiste et dictature du prolétariat «  au sein de la Quatrième Internationale aurait pu ou du amener à une prise en compte de la question de la religion, du rôle des clergés et de la façon de combattre leur influence réactionnaire dans la lutte pour la révolution socialiste. Mais, il n’en a rien été ! Pourtant, la question de la liberté de conscience face aux régimes policiers et totalitaires staliniens se posait et aurait pu, elle aussi, ramener à un intérêt pour la laïcité…Pourtant à l’époque, on assistait à l’émergence de la dictature totalitaire des mollhas iraniens.

Aujourd’hui, la question de la laïcité et de la religion nous revient comme un boomerang à la figure sous deux aspects : celui de la place prise par le courant réactionnaire du fondamentalisme islamiste dans l’aire de civilisation arabo-musulmane et dans les conflits à l’échelle mondiale, et celui de la référence à « l’héritage chrétien de l’Europe » que les croisés de l’Europe capitaliste veulent utiliser pour restreindre les droits démocratiques et donc la liberté d’action des travailleurs, dont participe l’offensive anti-laïque en France menée conjointement par Chirac, Raffarin, Sarkozy, le clergé catholique et le fan-club de Tariq Ramadan.
C’est pourquoi, il nous semble utile de faire un court rappel des bases fondamentales de la laïcité. A nos yeux, celle-ci repose sur 2 éléments : la liberté de conscience et l’égalité juridique.

La liberté de conscience, c’est bien plus que la seule liberté religieuse et cultuelle, c’est le fait que  l’Etat n’a pas à connaître ou à imposer d’obédiences philosophiques ou religieuses. Un Etat laïque, c’est un Etat qui ne choisit pas entre l’option de la croyance, de l’agnosticisme ou de l’athéisme. C’est un Etat qui devrait protéger les citoyens contre l’ingérence ou la prétention religieuse de vouloir dominer les consciences.  Ni religion (avec ou sans s ) d’Etat, ni athéisme d’Etat, ni aucun autre dogme d’Etat !

Et le moyen matériel de base, c’est la séparation des Eglises et de l’Etat, l’absence de  privilèges ou de financements publics de quelque obédience que ce soit. Avec un pendant, la séparation de la sphère publique et de la sphère privée. Aujourd’hui, il est regrettable que de trop nombreux camarades en comprennent pas que l’imposition du port du voile par les courants islamistes est un bélier pour faire sauter le verrou laïque pour la plus grande joie et le plus grand bénéfice …de l’Eglise catholique.

L’égalité juridique est le complément indispensable de la liberté de conscience. Dans les sociétés théocratiques, ou dans celles, plus libérales, où la laïcité n’a pas encore été conquise, la primauté du religieux sur la vie et la sphère publiques impliquent une inégalité juridique, une inégalité des droits entre les citoyens. D’une part, entre croyants et non-croyants (ou croyants des religions non dominantes) et surtout, entre hommes et femmes, car toutes les grandes religions connues dans l’histoire de l’humanité ont toujours porté l’oppression des femmes en leur sein !

A l’heure où les concepteurs de la « Constitution européenne » veulent imposer le règne sans partage de la « concurrence libre et non faussée », donc la loi du contrat contre la loi égale pour tous et toutes, on voit aisément à qui profite la remise en cause des acquis laïques. On comprend aussi le lien entre l’éclatement des droits politiques et sociaux antérieurement acquis, et l’introduction d’une division communautaire de la société, des quartiers, des populations, basée sur des critères religieux et/ou ethniques, s’appuyant sur des clergés avides de reconquérir le terrain perdu entre 1789 et 1905.

Nous ne rajoutons pas le troisième élément que d’habitude les laïques, comme Pena-Ruiz (1) en France, mettent en avant : « une loi commune pour le bien commun ». Une loi commune qui s’applique à tous : oui ! Mais quel bien commun ? Dans une société divisée en classes, en minorités exploiteuses et oppressives contre majorité exploitée et opprimée, il n’y a pas de « bien commun », il y a des intérêts immédiats et historiques contradictoires et irréconciliables. C’est pourquoi, nous devons baser notre stratégie sur l’application pleine et entière de la démocratie, c’est à dire sur le pouvoir de la majorité. Au passage, nous soulignons que tous les « gros malins » qui ne ratent jamais une occasion de cracher sur la démocratie, rendent un inestimable service à l’ordre existant en laissant croire par là que la démocratie bourgeoise serait la démocratie, que les régimes politiques comme ceux des USA ou d’Europe occidentale seraient « la » démocratie, quand bien même des droits démocratiques appréciables ont pu y être conquis à tel ou tel moment de l’histoire par la lutte de ceux d’en bas.

Notes :
1) Mieux vaut le front unique avec un Pena-Ruiz et des militants laïques, féministes, syndicalistes ou réformistes sincères pour la défense et l’extension des acquis laïques que l’alliance avec les corbeaux en soutane ou les barbus, porteurs des régressions les plus archaïques. Cette dernière alliance va bien au-delà de la « main tendue » aux catholiques par Maurice Thorez en 1935, elle tient de l’application par Togliatti de la ligne du Front Populaire lors de sa « main tendue »…aux Chemises noires… censées être « déçues par la trahison du programme fasciste originel » !!!

Message Publié : 27 Jan 2005, 12:29
par Gaby
a écrit :…3…Lutte Ouvrière a pris position contre le projet de « Constitution européenne », en faveur du Non au prochain référendum. Fort bien ! Cela est sans conteste le résultat d’une saine pression de la classe ouvrière sur cette organisation qui ne veut pas apparaître, comme en 1992, en contradiction avec les aspirations et sentiments d’une couche militante de tradition CGT et /ou PC, dont LO a fait l’une de ses cibles privilégiées. Néanmoins, à la lecture de la déclaration issue du congrès de LO, on s’étonnera que les arguments mis en avant portent peu sur les aspects anti-capitalistes de la chose. C’est par des raisons, parfaitement correctes au demeurant, de laïcité, de droit au divorce ou de restriction du droit de circulation ou de budgets d’armement que LO justifie sa position. On s’étonnera du peu référence aux privatisations, au démantèlement des services publics et des droits sociaux, au dumping social que le dogme constitutionnalisé de la « concurrence libre et non faussée » va accélérer.

C'est toujours choquant de voir comme ces militants peuvent confondre le protectionnisme étatique bien bourgeois (dont ils seraient presque nostalgiques) avec la défense des intérêts salariés... On dirait presque que c'est le "dogme constitutionalisé" qui conditionne le rapport de force. Limite idéaliste. Si on décode leur dernière phrase c'est vraiment : "oh ralentissez la marche de l'histoire, Keynes version 2ème du nom, c'était pas si mal".

a écrit :Ou bien, faut-il en déduire qu’aux yeux de LO, l’enjeu de ce référendum est mineur ?

Applaudissons leur perspicacité. =D>

Sans vouloir cracher dans la soupe de copains qui affichent des idées plus correctes dans le reste de leur bafouille, c'est tout de même sacrément réformiste tout ça.

Message Publié : 27 Jan 2005, 16:22
par Nadia
(texte cité par Valière a écrit :La liberté de conscience, c’est bien plus que la seule liberté religieuse et cultuelle, c’est le fait que  l’Etat n’a pas à connaître ou à imposer d’obédiences philosophiques ou religieuses. Un Etat laïque, c’est un Etat qui ne choisit pas entre l’option de la croyance, de l’agnosticisme ou de l’athéisme. C’est un Etat qui devrait protéger les citoyens contre l’ingérence ou la prétention religieuse de vouloir dominer les consciences.  Ni religion (avec ou sans s ) d’Etat, ni athéisme d’Etat, ni aucun autre dogme d’Etat !

Est-ce à dire qu'il ne faut pas que l'Etat (via l'éducation scolaire) doive se refuser toute explication scientifique si cela contredit une théorie religieuse ?
"Aucun dogme d'Etat", alors l'Etat ne doit pas dire si la Terre est plate ou sphérique, si l'humanité est un fruit de l'évolution darwinienne ou la création d'un barbu, si on doit transfuser du sang (non contaminé, bien sûr !) à un gamin mourant ou respecter l'obscurantisme des parents, ......... ?? (il y a beaucoup d'exemples où les religions contredisent la science)

Message Publié : 27 Jan 2005, 19:27
par Valiere
Nadia! Tu interprètes...
La laïcité repose sur tois principes politiques:
- liberté d'être croyant, athée ou agnostique
- égalité des droits
- valeurs universelles
Pena Ruiz cité en note dans ce texte explique les valeurs universelles : explication scientifique de la naissance du monde et égalité des droits entre filles et garçons, entre autres...