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Publié :
05 Jan 2005, 23:31
par Cyrano
France-Culture. Emission "Tire ta langue" (émission sur la linguistique, les langues…), dirigée par Antoine Perraud.<br>Emission du mardi 4 Janvier 2005, 14H00 : "De la rhétorique politique".<br><br>Présentation de l'émission du jour, sur le site France-Culture :<br>Prendre la parole, en politique, c¹est notamment choisir des mots. Mais c'est aussi, bien souvent, prendre position sur les mots (sur les siens comme sur ceux des autres). L'étude de ces commentaires métadiscurifs contribue à éclairer l¹analyse du discours politique, ainsi qu'on le montrera à travers des exemples puisés dans différents types de corpus politiques et médiatiques contemporains.<br>Avec Alice Krieg-Planque, maître de conférences en sciences de l'information et de la communication à l'Université Paris 12 - Val-de-Marne, membre du CEDITEC (Centre d'étude des discours, images, textes, écrits, communications) docteure en Sciences du langage.<br>et Geneviève Petiot, CEDISCOR Centre de Recherches sur les Discours Ordinaires et Spécialisés, SYLED Systèmes Linguistiques Énonciation Discursivité, Université Paris III - Sorbonne nouvelle<br><br>Pourquoi le mentionner ici ? C'est que mardi dernier, dans la première partie de l'émission, les exemples de textes politiques lus provenaient de l'hebdomadaire… Lutte Ouvrière…<br><br>On peut l'écouter ici :<br><a href="http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/tire_langue/" target="_blank">Ecoute émission: "Tire ta langue"</a><br>

Publié :
05 Jan 2005, 23:39
par Cyrano
Les extraits de Lutte Ouvrière lus dans l'émission (ça se passe en direct) le sont par Philippe Faure.<br>Les sources des articles (N° de Lutte Ouvrière et titre article) ne sont pas mentionnées dans l'émission. Je les rajoute moi-même.<br>Après 7 ou 8 minutes de bla-bla-bleu-bleu, on en arrive à c'que ça cause de Lutte Ouvrière… <br>Je transcris ce que j'ai déjà entendu (les corrections de fautes ortografe éventuelles seront bienvenues !). Je verrai demain, si plus loin, ça cause de LO.

Publié :
05 Jan 2005, 23:40
par Cyrano
<b>A Perraud :</b> Eh bien là, je vous propose maintenant, à l'orée de cette émission de – non pas faire une communication, Alice Krieg-Planque – mais de nous expliquer l'essentiel de votre communication à partie de quelques exemples que vous avez choisis, donc, du lexique sous tension.<br>Ces exemples sont des petits extraits que nous allons entendre comme des brèves, là… qui vont finir par faire l'effet d'une torture chinoise très intéressante. Ce sont des extraits tirés de la revue Lutte Ouvrière. Lutte Ouvrière, c'est la revue du mouvement Lutte Ouvrière, et le mouvement Lutte Ouvrière, c'est un – je le rappelle – des mouvements trotskistes de la IVe Internationale, dont le porte parole est assez connu parce que on l'aperçoit assez régulièrement à la télévision depuis 1974 : c'est Arlette Laguiller. Mais là, ces extraits ne seront pas lus par Arlette Laguiller mais en direct, en studio, par Philippe Faure.<br><br><i>[Immédiatement commence la lecture des divers extraits, séparés par un léger blanc]</i>

Publié :
05 Jan 2005, 23:41
par Cyrano
<b>Voix lisant :</b> « Dans sa recherche de rentabilité, Louis Gallois, président de la SNCF, s'en prend aujourd'hui aux usagers, qu'il aime appeler ses "clients" mais qu'il considère surtout comme bons à payer toujours plus cher pour un service qui ne s'améliore pas vraiment. »<br>[LO n°1894 du 19 nov. 2004, "SNCF - Gallois fait les poches des voyageurs"]<br><br><b>Voix lisant :</b> « Pour préparer son plan, la direction a entamé des discussions visant à obtenir un "accord de méthode", autrement dit l'accord des syndicats pour supprimer en douceur les emplois. »<br>[LO n°1893 du 12 nov. 2004, "Clariant - Huningue(Haut-Rhin) : Des réactions contre la chimie du profit"]<br><br><b>Voix lisant :</b> « À La Poste, les pressions continuelles pour obtenir des "résultats", selon le jargon "manager", se traduisent par une aggravation de l'exploitation des agents, mais aussi par des tensions dans les relations prenant parfois un tour dramatique. »<br>[LO n°1894 du 19 nov. 2004, "La Poste (direction du courrier international) : un harcèlement révoltant"]<br><b><br>Voix lisant :</b> « Chaque voyage présidentiel, de Chirac comme de ses prédécesseurs, comporte ainsi sa part de représentation commerciale, de "conquête" de marchés, de signatures de contrats pour les plus grandes sociétés, de bonnes affaires préparées et garanties par l'État et de cadeaux de toute nature aux clients potentiels (prêts, accords politiques, accords commerciaux, soutien politique au régime en place, etc.). Mais cela, ce n'est pas de la corruption, ni même du trafic d'influence, c'est ce qu'on appelle de la politique internationale. »<br>[LO n°1893 du 12 nov. 2004, "Alcatel : Petits pots-de-vin et grosses affaires"]<br><br><b>Voix lisant :</b> « Pour écarter le nouvel exécutif, ses adversaires s'employèrent à soudoyer des élus, préparant une sorte de coup d'État institutionnel visant à renverser Temaru. C'est ce qui fut fait le 9 octobre à l'aide d'une "motion de censure" votée grâce à la défection d'un membre de la liste de Temaru.<br>Mais ni les indépendantistes ni la population n'acceptèrent d'entériner ce que le gouvernement appelait benoîtement ici "le jeu normal des institutions". »<br>[LO n°1893 du 12 nov. 2004, "Polynésie : Le droit de choisir son gouvernement"]<br><br><b>Voix lisant :</b> « Il se confirme donc que, malgré vingt ans de régime dit "démocratique", l'année brésilienne reste intouchable et n'entend pas qu'on remette en cause le rôle qu'elle a joué dans le passé. Et si elle se tait sur ses exactions, elle sait se faire entendre d'un gouvernement que l'on qualifie de gauche. »<br>[LO n°1893 du 12 nov. 2004, "Brésil : Sous Lula, pas touche à l'armée"]<br><br>[Musique…]<br>

Publié :
05 Jan 2005, 23:42
par Cyrano
<b>A Perraud :</b> Alice Krieg-Planque, ces paragraphes, par vous isolés dans l'hebdomadaire … euh… Lutte Ouvrière, LO pour les intimes… En quoi pourriez vous faire la jonction avec votre communication : "Le lexique politique sous tension : consécrations (au pluriel), réfutations (au pluriel), désaffection (au singulier) ?<br><b>A Krieg-Planque :</b> Alors là, dans le cas présent, il s'agit d'un bel exemple, plutôt d'une belle série d'exemples, d'énoncés qui réfutent. Il s'agit donc, on pourrait dire, d'un contre-discours d'un discours qui est celui de Lutte Ouvrière qui se représente comme devant lutter contre un discours qui lui est un discours du mensonge, de la tromperie – dont Lutte Ouvrière prétend justement rétablir en quelque sorte la bonne version, la vérité. On voit que ce qui est dans le mauvais langage, ce sont les "clients", alors que dans le bon langage, ce serait les "usagers". Et on voit comment à travers cette mise en discours d'un discours et d'un contre-discours, Lutte Ouvrière se représente comme le discours qui dit le vrai.<br>Mais ce qui est tout à fait passionnant, dans ce superbe florilège lu avec justesse par Philippe Faure, c'est que tout en dénonçant une espèce de langue de bois des politiciens, des managers, des grands patrons, du "ils", ou du "on", eh bien, Lutte Ouvrière produit sa propre langue de bois, son propre jargon.<br>Par exemple, les auditeurs de France-Culture auront-ils relevé que lorsque Lutte Ouvrière écrit : « les pressions continuelles pour obtenir des "résultats", selon le jargon "manager", se traduisent par une aggravation de l'exploitation des agents. »… Dire qu'il existe une exploitation des agents, après tout, c'est un point de vue sur le monde qui vaut tout autant le point de vue managérial. Ce sont deux points de vue différents sur le monde : un discours et un contre discours.<br><b>A Perraud :</b> Geneviève Petiot, vous ?….<br><b>G. Petiot :</b> Oui, moi j'y verrais l'illustration de discours de bois, parce que il y a le discours de bois des managers relayé par la presse, d'une certaine façon, et puis le discours de bois de LO où, effectivement, l'exploitation relève de la doctrine marxiste – et donc, la vérité – et tout discours qui ne dit pas la vérité est un discours de l'erreur et de la fausseté. Et les deux discours deviennent des discours de bois : quand on adhère à LO, on estime que le discours de LO n'est pas discours de bois; quand on est manager on estime que son discours n'est pas discours de bois – puisque le discours de bois, c'est toujours le point de vue de l'autre. <br>

Publié :
05 Jan 2005, 23:44
par Cyrano
<b>A Perraud :</b> Mais, Alice Krieg-Planque, quand on veut décrypter… Pasque au départ, ça pourrait se présenter comme : "Voici le discours dominant" et, eux, en fait, imposent un contre-discours de bois, on vient de le dire. Alors que généralement, ça se passe avec l'ironie, ça se passe avec un langage qui fait appel à votre intelligence et qui fait du décryptage : "Voyez comme je décèle ce qu'on vous cèle". Alors que là, il s'agit simplement d'imposer un contre-catéchisme, en définitive. C'est cela, le lexqiue sous tension ?<br><b>A Krieg-Planque :</b> Oui-oui-oui, c'est une des formes que peut prendre le lexique sous tension, même si lexique sous tension n'est pas un terme scientifique. C'est un terme que j'avais retenu pour le titre de la communication, pour ne pas trop jargonner et employer des termes qui seraient plus…<br><b>A Perraud :</b> Alors, jargonnez un brin, s'il vous plait ! Là, c'est moi qui vous y pousse…<br><b>A Krieg-Planque :</b> Eh bien, plutôt que de parler de lexique sous tension, j'aurais pu parler de cristallisation d'un jeu sociopolitique dans des séries lexicales accompagnées de commentaires méta-discursifs opacifiants ou non opacifiants – voilà, ce que j'aurais pou dire, mais peut être ne m'auriez vous pas invité, ça aurait été bien dommage.<br><b>A Perraud :</b> Bien sûr… Moi, je suis tout à fait prêt à ce que vous employez ce langage, simplement : traduisez le un tout petit peu. Tout ce que vous venez de dire à l'instant, c'est pas la traduction de lexique sous tension ?<br><b>A Krieg-Planque :</b> Là, ce que vient de lire Philippe Faure, ces extraits de Lutte Ouvrière, c'est une exemple de la façon dont un lexique est mis sous tension à l'intérieur du discours. C'est à dire que Lutte Ouvrière, ici, met sous tension, s'empare du vocabulaire, alors : gouvernemental, des patrons, du "on", du "dit-on", donc de différents types de locuteurs, les met sous tension pour opposer son propre vocabulaire.<br>C'est là qu'il y a mise sous tension mais je ne voudrais surtout pas que les étudiants qui nous écoutent imaginent qu'ils 'agit là d'une catégorie scientifique que l'on pourrait retrouver dans une grammaire ou dans des textes scientifiques.<br><b>G. Petiot :</b> Oui, je crois qu'on y retrouve ce qu'on peut appeler des mots-slogans qui ont été dénoncés de très longue dates, comme caractéristique de ces discours stéréotypés : "client" est actuellement valorisé, y compris à la SNCF, etc. dans une série de services publics. On est client, donc on a des droits en tant que client plus encore qu'en tant qu'usager. Et quand on la casse des retraites ou ce genre de choses, on est dans les mots-slogans de LO, obligatoirement; et quand on a l'exploitation des agents, on est dans un discours avec des mots slogans qui caractérisent immédiatement le groupe qui parle.<br>

Publié :
05 Jan 2005, 23:44
par Cyrano
<b>A Perraud :</b> Mais je vous propose d'écouter un… On va faire un petit "Revenez-y", un tout, tout dernier extrait – que va nous lire Philippe Faure – de l'hebdomadaire Lutte Ouvrière. Et vous allez voir, ça commence comme quelque chose qu'on peut lire partout, et c'est la fin, là, où la mise sous tension est réelle…<br><br><b>Voix lisant :</b> « La ministre des Armées, Alliot-Marie, vient d'accepter de lever le "secret défense" sur les derniers documents de l'affaire Ben Barka, opposant politique marocain enlevé et assassiné en 1965 à Paris. Il aura fallu près de quarante ans pour que le gouvernement accepte de laisser libre accès à ces pièces classées, sous prétexte qu'elles risquaient de révéler des faits de nature à mettre en danger ce qu'ils appellent la sûreté de l'État, comprenez: les coups tordus de l'appareil d'État. »<br>[LO n°1894 du 19 nov. 2004, "Affaire Ben Barka : secret défense... de savoir"]<br>

Publié :
05 Jan 2005, 23:46
par Cyrano
<b>A Perraud :</b> Alors, là, c'est passionnant, pasque jusque « assassiné en 1965 », ça pourrait être un livre d'histoire, une dépêche d'agence – le début… Ensuite, effectivement, montrer que l'État amis du temps à laisser entrevoir ce qui s'est passé, tout ça… on le dit partout ! C'est simplement :<br>"Comprenez – et on retrouve ce que vous venez de dire – comprenez, et mettez vous bien ça dans le crâne : les coups tordus de l'appareil d'État."<br><b>A Krieg-Planque :</b> Oui, le discours mensonger est renvoyé à un locuteur qui est le "ils": i-l-s : « ce qu'ils appellent »… Dans le texte – là on n'a pas tout le texte sous les yeux mais moi je l'avais lu avant – ce "ils", « ce qu'ils appellent la sûreté de l'État » ne renvoie à rien, à l'intérieur du texte. C'est magnifique, cette espèce d'ennemi extérieur qui est partout, qui est le "ils" du mensonge dont la société en quelque sorte serait gangrenée, à travers l'ensemble des discours qui circulent dans l'espace public. Ça c'est tout à fait caractéristique du discours de Lutte Ouvrière. C'est tout à fait magnifique à cet égard. <br><b>A Perraud :</b> C'est à dire que on retrouve l'exact pendant de la main de Moscou, c'est la main du grand Capital en définitive.<br><b>A Krieg-Planque :</b> Tout à fait! Oui, oui-oui ! Que l'on retrouve à d'autres ponts des textes dans le discours managérial, le discours du gouvernement, le discours des grands patrons, etc. Y'a cet ensemble de…<br>Dans tous ces commentaires qui viennent d'être lus, on voit bien comment un discours c'est un système d'explication et là, Lutte Ouvrière a son propre système d'explication qui est système de…enfin… un système classiste, hein, euh… qui va s'opposer au discours dominant qui sera un autre système d'explication contre lequel il y aura lieu de combattre.<br>Et puis, il y a aussi, dans ces extraits… On voit bien comment un discours c'est quelque chose qui éventuellement dessine la cartographie de ses ennemis. Et là, Lutte Ouvrière dessine la cartographie de ses adversaires à travers le "ils", mais on l'a vu dans d'autres énoncés à travers un patron comme Luis Gallois ou à travers de ce que LO dénonce sous le nom de "les managers".<br><b>A Perraud :</b> Et on a une sorte de combats de grands cerfs où – sans faire un jeu de mots sur la langue de bois dont nous allons parler tout à l'heure – On a deux bois qui se heurtent : le Grand Capital et la IVe Internationale.<br><b>A Krieg-Planque :</b> Oui, c'est ce qu'on appelle très joliment en Science du langage et analyse du discours, des phénomènes de dialogisme…<br><b>A Perraud :</b> Très bien… Je trouve en vous une interprète inespérée, Alice Krieg-Planque. Je vous propose maintenant que nous prenions une autre logique de discours. C'est la logique de la Mairie de Paris, par rapport à une affaire très sérieuse. [il s'agit de discours sur les Jeux Olympiques 2012].<br><br>Là, je vais donc écouter la suite… au cas où ça causerait de LO…<br>

Publié :
06 Jan 2005, 00:28
par ianovka
Quelqu'un a-t-il les moyens de l'enregister ?

Publié :
06 Jan 2005, 00:51
par ianovka
Ouais ... en fait c'est pas du tout intéressant. A part les extraits lus on n'a droit qu'à du bla bla et du charabia (j'adore le : "<i>Eh bien, plutôt que de parler de lexique sous tension, j'aurais pu parler de cristallisation d'un jeu sociopolitique dans des séries lexicales accompagnées de commentaires méta-discursifs opacifiants ou non opacifiants</i>"). <!--emo&:swon:--><img src="http://forumlo.cjb.net/html/emoticons/swoon.gif" border="0" style="vertical-align:middle" alt="swoon.gif" /><!--endemo--> <br><br>Tout ça pour démontrer que "LO c'est du discour de bois". <!--emo&:nono2:--><img src="http://forumlo.cjb.net/html/emoticons/nono2.gif" border="0" style="vertical-align:middle" alt="nono2.gif" /><!--endemo-->