(dernier éditorial d'Informations Ouvrières a écrit :Un pas de trop
« Il serait dommage qu’un homme comme Besancenot ne puisse pas participer à la compétition présidentielle (…). Je me battrai pour que M. Besancenot, comme M. Le Pen, puissent défendre (leurs idées — NDLR). »
Ainsi s’est exprimé, lundi 5 mars, sur France 3, le ministre de l’Intérieur, dont l’AFP précise « qu’il “se battrait” pour que (…) Olivier Besancenot et Jean-Marie Le Pen aient leurs parrainages et puissent se présenter. »
Le même jour, les porte-parole de l’UMP ont, selon le journal Le Figaro, « cité comme “légitimes” les candidatures de Dominique Voynet, Olivier Besancenot, Corinne Lepage, José Bové ».
Nous avons déjà, dans ces colonnes, à de nombreuses reprises, dénoncé le caractère antidémocratique des institutions de la Ve République , devenues, depuis Maastricht, institutions subsidiaires de l’Union européenne.
La contrainte des 500 parrainages de maires pour une candidature à l’élection présidentielle, avec tout ce que cela implique de pressions, de chantages aux subventions, etc., s’inscrit dans ce cadre antidémocratique.
Au moins, les apparences étaient-elles sauves quant à l’égalité supposée des candidats à la candidature. Certes, certains disposent d’un large accès aux médias, tandis que d’autres, comme Gérard Schivardi, en sont presque systématiquement écartés. Cependant, en apparence du moins, tous pouvaient sembler à égalité de droit dans la recherche des parrainages.
Le doute a commencé de s’instiller avec force quand, le vendredi 23 février, le journal Le Figaro publiait la photo de 14 candidats dont, à son avis, il aurait été incompréhensible qu’ils n’obtiennent pas leurs parrainages. Le même quotidien publiait en « une » un sondage selon lequel « une majorité de Français jugerait “anormal” que Le Pen, Villiers, Besancenot et Voynet ne puissent se présenter à l’élection présidentielle » et une interview du ministre Hortefeux, adjoint de M. Sarkozy, incitant les maires à parrainer « les petits candidats », soulignant que « parrainer n’est pas soutenir ».
De toute évidence, ce mode, suggestif ou incitatif, ne s’est pas révélé suffisant. On est donc passé, avec la déclaration du 5 mars, à un stade supérieur de ce qu’il faut bien appeler la caporalisation de la vie politique.
Il faut, à notre connaissance, remonter jusqu’à Napoléon III, pour voir un ministre de l’Intérieur décréter qui sont les candidats « légitimes » et ceux qui ne le sont pas.
On peut, bien sûr, s’interroger sur les raisons du choix ministériel.
Ainsi, l’absence de Gérard Schivardi dans la liste des candidats « légitimes » du ministère de l’Intérieur ne saurait surprendre.
Cela a-t-il un rapport avec sa position en faveur de la rupture avec l’Union européenne ?
La question mérite d’être posée, d’autant que l’Union européenne elle-même préconise la constitution de partis européens, avec, comme condition, la défense des institutions de l’Union européenne.
Quant aux candidats qui figurent sur la liste de M. Sarkozy, il leur revient de réfléchir eux-mêmes sur ce qui leur vaut cet insigne honneur.
Il n’en reste pas moins que le ministre de l’Intérieur franchit ici un nouveau pas dans la remise en cause de la démocratie politique. Cette dernière suppose la liberté des partis politiques de s’organiser et de concourir librement aux élections, comme elle suppose la liberté des organisations syndicales, sur le plan qui est le leur, de revendiquer librement.
Ce sont ces piliers de la démocratie politique et sociale que l’Union européenne tend en permanence à remettre en cause.
La déclaration du ministre de l’Intérieur ce 5 mars constitue, après d’autres précédents, un pas supplémentaire, un pas de trop, dans cette direction anti-démocratique.
Pour notre part, Parti des travailleurs, qui avons inscrit la défense et la reconquête de la démocratie politique et sociale au cœur de notre plateforme d’action politique, il nous faut en tirer une conclusion : c’est l’action consciente et organisée de chaque adhérent, gagnant de nouveaux membres au Parti des travailleurs, diffusant Informations ouvrières, organisant les campagnes du parti, qui constitue la réponse la plus appropriée à ces nuages sombres qui s’amoncellent au-dessus de nos têtes.
Quant à notre ami Gérard Schivardi, candidat des maires, soutenu par le Parti des travailleurs, il déposera ses 500 parrainages en temps et en heure au Conseil constitutionnel.
Daniel Gluckstein