olivier b et Metaleurop

[Louis]

Une mise en veille... avant la mise en bière ?
Par Hubert Féret, La voix du Nord, 30 janvier 2003.

Le comité d'entreprise convoqué hier par les deux administrateurs judiciaires a refroidi l'intersyndicale.

PETIT moment de distraction au local de l'intersyndicale. A 15 h 30, le plus illustre facteur de France, Olivier Besancenot, ex-candidat à la présidentielle, qui battait la campagne sous le rouge pavillon de la LCR (Ligue communiste révolutionnaire), est venu apporter son soutien au personnel. Une bonne demi-heure durant, on se donnera du "camarade", en dressant le sinistre bilan de ces entreprises, "sous le joug de patrons et actionnaires terroristes", fermant une à une leurs portes. Olivier Besancenot avait par ailleurs deux messages à livrer. Le premier provenait des "gars de La Poste de Paris originaires du Nord - Pas-de-Calais", l'ayant missionné pour dire aux ouvriers de Metaleurop : "Saquez d'ins !" Le second, plus utile, visait à convier l'intersyndicale à profiter prochainement d'une tribune publique au Parlement européen, à Strasbourg, pour y exposer leurs revendications...
Mais l'emblématique secrétaire du CE, Gérard Hélin, avait songé à tout autre chose. Ce matin, à 9 heures, au centre d'affaires de Roissy - Charles-de-Gaulle, se tient le conseil d'administration de Recytech, une filiale de Metaleurop SA. "Si vous avez quelqu'un sur place, kidnappez-nous Russ Robinson, le PDG, et on se charge de le ramener ici !" Le ton grave, Olivier Besancenot tapote quelques numéros sur son portable pour fomenter un plan d'attaque avec les membres de la CGT d'Air France. "Robinson en otage, ça peut peser dans la balance !"
Plus de production
sans repreneur
Voilà pour la partie sourire. La suite sera beaucoup plus morose. Et au soulagement exprimé mardi, au sortir de l'audience de la chambre commerciale ayant placé Metaleurop Nord en redressement judiciaire, aura succédé un profond sentiment d'abattement. La faute à un nouveau comité d'entreprise convoqué dans l'urgence, au terme duquel l'avenir esquissé par les deux administrateurs judiciaires aura glacé le sang des membres de l'intersyndicale.
Deux heures durant, Mes Bondroit et Rouvroy auront échangé leurs informations avec celles dont disposaient les syndicats. Pour estimer d'abord le passif de Metaleurop Nord à quelque 170 M€ (dont 130 M€ dûs à la maison mère, Metaleurop SA) et annoncer qu'au regard de cette comptabilité désastreuse, on ne pouvait envisager une reprise de l'activité sans repreneur. Le site est donc mis en veille pour une question de trésorerie, interdisant tout achat de minerais pour faire tourner la boutique, mais aussi pour une question de sécurité : "On ne peut laisser le personnel travailler dans ces conditions. C'est l'ensemble des installations qui est à revoir."
Exit aussi la possibilité de mettre en oeuvre le plan social pourtant validé par la direction du Travail et devant concerner 232 personnes : "Metaleurop ne dispose pas des ressources nécessaires pour le financer." Une analyse plus poussée de la trésorerie dira les jours prochains si la paye des trois mois à venir pourra être assurée. Le reste du calendrier et le plan d'action des administrateurs judiciaires restent donc plus que jamais liés à l'arrivée d'un providentiel repreneur. A ce titre, Gilbert-Alain Ferrer a indiqué avoir eu des nouvelles de Gilles Lemire : "Les choses progressent. Mais je ne puis dire qui se trouve derrière car ce sont des gens qui n'ont pas envie d'étaler leurs intentions sur la place publique."
"Le tableau est encore plus noir que ce qu'on pensait", se lamentait Farid Ramou à l'issue du CE. Et Gérard Hélin de se montrer tout aussi sceptique : "Dans les conditions actuelles, et avec le passif de Metaleurop Nord, qui voudrait investir ici ? Si le repreneur n'est pas contraint d'éponger les 170 M€, il serait par contre tenu à d'autres choses. Comme au financement du plan de dépollution signé par M. Durande avec EDA, pour un montant de 600 000 €. Et puis c'est sans compter sur la prochaine mauvaise nouvelle qui va tomber, avec le dépôt de bilan de Metaleurop SA..."


Par Hubert FÉRET, La voix du Nord.