Ni putes ni soumises sort de ses quartiers

Message par faupatronim » 03 Oct 2003, 10:32

CITATION (Libération @ vendredi 03 octobre 2003)
Ni putes ni soumises sort de ses quartiers

En plein essor, le mouvement est devenu un repère sollicité, auquel on confie le pire.
 
   
Par Charlotte ROTMAN




«Elles veulent nous soutenir, mais pas être cataloguées comme militantes.» Alda, du comité Bondy, Noisy-le-Sec, Romainville

   C'est un syndicat ou un lycée, des copines volontaires ou une jeune femme en détresse. C'est à la suite d'un viol étouffé, à cause d'insultes récurrentes ou de violences devenues banales. Les appels proviennent des cités à barres, mais aussi des petites villes de province. Depuis la marche des Ni putes ni soumises, et son arrivée à Paris le 8 mars pour une manifestation qui a rassemblé plus de 20 000 personnes, le mouvement croule sous les demandes. «Les gens pensent qu'on est une entreprise avec 100 personnes, ou comme le planning familial. On dit qu'on n'est pas des professionnels, qu'on apprend. Aujourd'hui, ce n'est plus nous qui allons vers les gens, mais l'inverse, on nous sollicite», explique Safia Lebdi, vice-présidente de Ni putes ni soumises. Une vingtaine de comités locaux se sont déjà créés en France.

Rageur. Avec le succès de la marche, la parole se libère. Les témoignages affluent sur le site Internet du mouvement (1), souvent faits sous pseudonyme. «Fille trankille» écrit après une visite des Ni putes ni soumises dans son lycée. «Je voulais intervenir (...) mais je n'ai pas pu le faire car il y avait tous les mecs fermés d'esprit qui étaient là.» Elle dit : «Quand on me voit avec un blanc, on me dit que je fais honte à tous les Arabes et aux musulmans.» «Princess Mariah» vient «d'un quartier à réputation sensible» - elle ne précise pas lequel. «Ici, si tu parles avec un garçon, on raconte que tu l'as sucé et qu'il t'a ramenée à l'hôtel en Belgique. Ils vont même jusqu'à dire qu'il y a des cassettes.» «Rélie» s'habillait en survêtement mais prend davantage soin d'elle depuis qu'elle travaille dans l'esthétique : «Alors les autres me prennent pour une salope.» Il y a aussi le témoignage rageur de «Malika». Son «mec» «parlait de mariage, etc. Mon cul ouais. On a fait l'amour après un an et demi, et un jour il m'a dit qu'il voulait me présenter à ses cousins. Ce que j'ai trouvé chelou, c'est que le mec, il m'a amené dans une cave toute pourrave, ça puait, et là, à ma grande surprise, il y avait une quinzaine de keums...» Elle raconte en détail le viol collectif dont elle a été victime.

Les filles des quartiers, dont les secrets restaient bien gardés, s'adressent dorénavant aux Ni putes ni soumises. Sont-elles prêtes pour autant à militer ? Alda distribue des tracts à la sortie des lycées à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis). Elle a tenu un stand des Ni putes ni soumises au forum des associations de Bondy début septembre. «J'ai vu des lycéennes de Clichy, Rosny, Pantin, qui m'ont dit : "On veut être dans ton comité, on ne peut pas en créer dans notre quartier."» «Elles veulent nous soutenir, mais pas être cataloguées comme militantes.» Alda, 38 ans, intègre leurs réticences : «On veut faire une permanence mais dans un lieu neutre et anonyme. On ne veut pas un local Ni putes ni soumises avec pignon sur rue, sinon elles ne viendront pas.» Alda était allée à la manifestation du 8 mars avec des copains et des copines. «On s'est dit, ça ne peut pas s'arrêter là, il faut qu'on crée un truc.» Le comité Ni putes ni soumises qui regroupe Noisy-le-Sec, Romainville et Bondy est né comme ça.

Riva, elle, est passée par SOS Racisme, avant de s'occuper du comité de Montreuil (Seine-Saint-Denis). Elle en est à 25 adhésions (5 euros contre un coupon rose). Il s'agit plus de mères de famille inquiètes pour leurs filles. «Les garçons sont souvent choqués par le nom de l'association, raconte l'étudiante de 25 ans. Ils nous disent qu'il ne faut pas exagérer, que ça se passe aussi chez les riches, ou ils ont l'impression d'être pris pour cible.»

«Sympathie». Pour d'autres, c'est un premier engagement. Noura, 19 ans, n'avait jamais milité avant. Elle a rejoint le comité de Meaux (Seine-et-Marne) avec des copines de son lycée. Samira non plus n'a jamais été encartée nulle part. «J'ai grandi dans les quartiers, j'ai vu la situation se dégrader comme un spectateur, le discours de Fadela Amara [présidente des Ni putes ni soumises, ndlr] a été un coup de poing sur la table.» Elle s'occupe dorénavant du comité du XIXe arrondissement de Paris, et passe trois fois par semaine dans les locaux parisiens de la Fédération des maisons des potes, qui héberge le mouvement. «On a un courant de sympathie important, ajoute Samira, aujourd'hui les gens testent notre capacité à répondre.»

Sur le bureau de Safia Lebdi, le courrier s'amoncelle. Beaucoup de demandes d'intervention. Mais aussi des candidatures pour des comités locaux : Drancy (Seine-Saint-Denis) Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire), Avignon (Vaucluse)... Près de 25 ont été mis en place, estime Safia. Une vingtaine d'autres sont en projet.



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faupatronim
 
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