par pelon » 24 Sep 2003, 18:13
Surligné (arbitrairement) une expression de Guy Bedos qui n'a pas plu au magazine :
CITATION
Figaro Magazine
Le who's who des imprécateurs
Aucun n'est papetier à Saint-Céré, tous ne conspuent pas le fisc. Pourtant, ils ont tous en eux quelque chose de poujadiste.
Par Sébastien Le FOL, Etienne De MONTETY
[20 septembre 2003]
Isabelle Alonso : La poujadette
La présidente des Chiennes de garde a fait du féminisme son fonds de commerce. « Pour moi, le féminisme est une analyse politique de la société », admet-elle. Isabelle Alonso n'en finit plus de dénoncer la domination masculine, réelle ou imaginaire. Témoin son intervention récente au sujet de l'émission « Bachelor », sur M6, dans laquelle des femmes consentantes rivalisent pour séduire le même homme : « On commence par le « Bachelor » et on arrive à la différence de salaires », s'est-elle indignée. Bizarrement, on ne l'a pas entendue au moment du lancement d'« Opération séduction aux Caraïbes », sur M6, où quatre filles élisaient le «séducteur de l'été» parmi seize garçons, après leur avoir fait passer toutes sortes de tests psychologiques et physiques.
Guy Bedos : Tous pour rire
L'ex-comique des années 70 n'en finit pas de déverser sa bile. Chacun de ses spectacles se transforme en défouloir anti-establishment. Bedos en veut à la terre entière : Jospin (« Le chef scout désintoxiqué de Matignon »), Chevènement (qu'il a traité de fou à la télévision), Chirac (« Le grand couillon mafieux exhibitionniste de l'Elysée »), Messier (« Tout lui appartient. Il a tout contaminé. «a relève des maladies tropicales, c'est plus un humain, c'est une amibe »), l'Amérique, la mondialisation. Seul le juge Halphen, à qui était dédié son one-man show d'avant la présidentielle, et José Bové semblent trouver grâce à ses yeux. Au point que certains admirateurs du saltimbanque se demandent s'il n'a pas viré réac.
Guy Birenbaum : Brigade des moeurs
Il est arrivé, tel le chevalier blanc dans sa Saab, pour délivrer la France de ses élites corrompues, droguées et adultères. A la main, la liste noire des coupables, leurs noms, leurs moeurs et leurs relations. Fils caché, flirts, partouzes... Vous saurez tout sur le zizi de nos dirigeants en lisant le nouveau livre de Guy Birenbaum, Nos délits d'initiés (Stock). Sous prétexte de lutter contre l'extrême droite (sujet qu'il connaît bien puisqu'il s'est fait connaître avec un livre sur le Front national), ce nouveau procureur Starr reprend ses bonnes vieilles méthodes de déstabilisation : obsession de la transparence, dénonciation de la conspiration du silence. C'est The Mirror érigé en organe républicain et le rapport de police en argument intellectuel. Saint Just a trouvé un successeur en Birenbaum. Chef de file des incorruptibles, l'éditeur de la collection « Impacts » chez Denoël est bien décidé à semer la terreur. Après avoir publié le Pouvoir intellectuel d'Emmanuel Lemieux, le vrai-faux livre choc du juge Halphen, les cogitations constitutionnelles d'Arnaud Montebourg et le script de la cassette Méry, on attend le nom de la dernière conquête de Sumo, le chien du couple Chirac, objet d'étude préféré de cet inspecteur Gadget.
Gérard Collard : Le père Collard tueur
La petite librairie a son Poujade. Il s'appelle Gérard Collard. Son audience a depuis longtemps franchi le seuil de sa boutique à Saint-Maur-des-Fossés, dans la région parisienne. On a vu sa houppette de Tintin branché dans toutes les émissions littéraires, de « Vol de nuit » à « Parole d'expert ». Le père Collard dispense partout le même discours caricatural : « Le système médiatique donne toujours la parole aux mêmes auteurs. Moi, je défends les sans-grade. » Autoproclamé nouvel arbitre des élégances littéraires, le petit libraire de Saint-Maur use et abuse de formules à l'emporte-pièce pour discréditer les ouvrages considérés comme « élitistes » : « «a ne vaut pas une croûte de reblochon », « Puant de prétention », « C'est bien beau toutes leurs philosophies mais ça ne répond pas à la question fondamentale : Pepsi ou Coca ? » Collard ne dit jamais « livre » mais « bouquin ». «a fait plus peuple. Et il est tellement sûr de son bon goût, Collard, qu'il n'hésite pas à jeter les « mauvais bouquins » - de préférence écrits par des « intellos du Flore » - dans la poubelle de son magasin. Au café des Deux Magots, Collard préfère le café des démagos.
Roger Hanin : La gauche "navarrin"
Craignait-il d'être assimilé à son personnage consensuel de Navarro ? Roger Hanin a retrouvé ces derniers temps les accents de l'épicier d'Au bon beurre. L'heure n'est plus au Grand Pardon, mais au coup de siroccoco. Le comédien, qui a adhéré cette année au Parti communiste, multiplie les déclarations musclées. Ses propos se situent rarement au-dessus de la ceinture. Jospin ? « C'est un homme vraiment méprisable, à qui je ne serrerais pas la main. » Jean d'Ormesson ? « Un petit homme. » L'acteur leur préfère visiblement Joseph Joanovici, le ferrailleur milliardaire qui joua un double jeu sous l'Occupation. A propos de son personnage, qu'il incarna en 2001 pour la télévision, Hanin déclara : « Enfant, j'étais impressionné et passionné par le personnage. Je me suis toujours intéressé aux parias et, pour moi, Joanovici était un héros à qui il fallait rendre justice. » Il est des modèles moins contestables.
«Les Inrockuptibles» : Salon de messages
C'est le journal officiel de la pensée poujado-bobo. Il prétend donner le la de la culture contemporaine. Exemple : Good Bye Lenin !, le film de Wolfgang Becker, encensé par la critique, ne saurait plaire à cette rédaction délicate. Un film « assez malsain », peut-on lire. Wolfgang ou Jean (les Enfants du marais), les Inrocks, ils aiment pas. Ils détestent l'esthétisme et jugent les livres ou les films selon une grille de lecture simple : « Où est le message ? » S'il n'y en a pas, c'est suspect. Cet été, l'hebdomadaire s'est fait l'écho d'une lettre de soutien à Bertrand Cantat, au motif que son attitude à Vilnius ne saurait faire oublier son combat légitime contre les puissants de ce monde et le libéralisme. Depuis plusieurs semaines, dans une rubrique finement intitulée « Agitpop », ils relaient les thèses altermondialistes les plus dures, en dénonçant l'OMC « dotée d'un pouvoir exorbitant, et trahissant un goût prononcé pour le secret ». Vieille rengaine connue depuis les années 30.
Pierre Marcelle : Robespierre Marcelle
Il est loin le temps où Pierre Marcelle cosignait avec l'inclassable Patrick Gofman Les blondes préfèrent les cons. Depuis Marcelle s'est assagi, exerçant ses talents à Libération. Il y a tenu la rubrique « Face aux piles » dont le critère esthétique était simple : si ça se vend, c'est sûrement mauvais. Les piles s'étant usées, il s'est refugié dans une colonne dénommée « Quotidienne » dans le même quotidien avec le même cahier des charges, à peine remanié : si ça exerce une quelconque responsabilité politique, économique, culturelle, religieuse, c'est suspect. Et Marcelle de le dire à la face du monde. Titre pris au hasard : « Oui, justice pourrie... » (octobre 2001). Autre phrase de lui, qui éclaire son propos. Commentant l'attitude de Ségolène Royal ayant répondu à un article de Libération comparant son propos à de la tarte aux fraises par l'envoi de la dite pâtisserie, Marcelle y vit non la réponse de la bergère au berger mais « une autre expression de cette quête de connivence, conscience ou non, à laquelle décidement on ne se résout pas ».
Il lui arrive toutefois de « s'y résoudre », conformément au fameux syndrome dit de « fascination/répulsion » : contempteur des puissances établies, Pierre Marcelle est en réalité aimanté par elles, comme l'insecte par la lumière. Ainsi, on a surpris l'an passé ce Rosbespierre des lettres au dîner en l'honneur du prix Goncourt, organisé par les éditions Grasset, en présence du Tout-Paris des lettres. Incorruptible, de 9 h à 19 h.
Alain Soral : Le pétomane
Quand il était petit, Alain Soral lisait Pilote et rêvait d'Iznogoud, celui qui « veut être calife à la place du calife ». Lui voulait être sage, comme les enfants et Socrate. La chaire de philosophie light étant déjà prise par André Comte-Sponville et Luc Ferry, il s'est tourné vers la pensée hard, celle qui dit « tout haut » dans les médias ce que tout le monde pense « tout bas » dans les bistrots. Il y a pléthore de penseurs sympas ? Il se rêve en affreux, le pétomane de Dutronc qui éructe, persuadé d'avoir des talents de société.
Autodidacte, ancien membre du Parti communiste, coauteur des Mouvements de mode expliqués aux parents, il a fait mille petits boulots. Aujourd'hui on appelle cela se forger une pensée « protéiforme ». Après un film, Confession d'un dragueur (qui aurait mieux fait de rester dans le secret du confessionnal), il signe coup sur coup Jusqu'où va-t-on descendre ? (Abécédaire de la bêtise ambiante) et Socrate à Saint-Tropez, opus publiés aux très chics éditions Blanche dirigées par Franck Spengler (ce qui a valu à Soral un article dithyrambique de Régine Deforges, mère de Spengler : dénoncer le communautarisme n'empêche pas de tolérer le copinage).
L'oeuvre de Soral est un ensemble de morceaux choisis, à ne pas mettre entre toutes les mains. Il dénomme ces apophtegmes délicats des « texticules » : quel talent ! Caressé dans le bon sens près de chez vous, le public raffole. C'est San Antonio au Collège de France : une bonne tranche de rire. On a le droit de ne pas aimer. Soral vitupère, comme on défouraille. Sans viser. Comme on ne peut pas avoir tort tout le temps, parfois il met dans le mille, mais à quel prix. Les dégâts collatéraux sont ravageurs. Comme son humour.
Thierry Meyssan : Imposture effroyable
George W. Bush, Jean-Paul II, Hubert Védrine, René Dumont, Charles Pasqua, Christine Boutin, le complot international selon Thierry Meyssan serait une hydre aux mille visages. Cela fait quinze ans que l'animateur du Réseau Voltaire poursuit son combat, tel Don Quichotte chargeant les moulins, avec comme arme une rhétorique où il est question pêle-mêle d'« ordre moral » de « croisés », de « fascisme », et récemment de « complot interne américain ». Secrétaire national des Radicaux de gauche, habitué des émissions de TV à dominante « sociétale », Meyssan s'est longtemps appuyé sur les thèmes de la « laïcité » et de « la lutte contre l'extrême droite » pour nourrir sa vision du monde, avant d'aller au bout de sa logique conspirationniste en faisant il y a quelques mois cette « révélation », images d'Internet à l'appui : « Aucun avion ne se serait écrasé sur le Pentagone. » L'opération serait une « imposture » montée par « l'appareil d'Etat américain ». Son livre a fait un tabac, flattant les lecteurs avides d'une confirmation qu'« on nous cache tout, on nous dit rien ». Quant aux réactions unanimes de la presse sérieuse pour dénoncer ce « scoop », elle auront probablement alimenté cette certitude : le monde entier cherche à lui nuire.
Karl Zéro : Télé corbeau
Le titre de son émission sur Canal + est déjà tout un programme : « Le Vrai Journal ». Sous-entendu, les autres journaux mentent, la vérité est ailleurs. Et Karl Zéro va la révéler aux téléspectateurs sous-informés, voire manipulés, que nous sommes. Tous les moyens sont bons pour confondre la classe politique : reportages fantaisistes, parodies, truquages, interviews chocs. Rien n'arrête le Fox Mulder de la chaîne cryptée. Pas même la présomption d'innocence. Au printemps dernier, l'animateur a ainsi lu à l'antenne des « aveux » que lui avait adressés Patrice Alègre, mettant en cause des notables toulousains. Manque de chance pour le chevalier Zéro, Alègre s'est ensuite rétracté et l'a accusé d'avoir monnayé sa lettre de dénonciation. « C'est du pur délire ! » s'est plaint Zéro, pris au piège de son propre système.
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