Les nouveaux poujadistes

Message par pelon » 24 Sep 2003, 18:00

Un dossier avec les analyses subtiles :hinhin: de la droite de la droite :
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Figaro Magazine






Arlette Laguiller, Karl Zéro, Marc Blondel et Arnaud Montebourg.
(Photos AFP.)  
Enquête sur les nouveaux poujadistes

Véronique Grousset
[20 septembre 2003]

Ils tempêtent, protestent, manifestent, dénoncent... De plus en plus, on voit s'installer à gauche la tentation de délaisser les actions politiques classiques pour des actions directes et médiatiques. Le Figaro Magazine a enquêté sur un phénomène qui inquiète l'ensemble des forces politiques, sociales et syndicales.

La disparition, le mois dernier, de Pierre Poujade a laissé beaucoup d'orphelins, à droite mais aussi et surtout à... gauche. Certes, au milieu des années 50, on ne parlait encore ni d'OGM ni de mondialisation mais le rapprochement, par exemple, entre le fondateur de l'Union de défense des commerçants et artisans (UDCA) et le chef de la Confédération paysanne, José Bové, s'impose avec de plus en plus d'évidence. D'ailleurs, les diatribes du papetier de Saint-Céré ne visaient pas seulement les «gros», les intellectuels, les journalistes, les politiques mais aussi le capitalisme dans son ensemble. Ecolo avant l'heure, Pierre Poujade passa le reste de ses jours à militer pour la culture du topinambour, qui devait être le carburant d'appoint du futur. Etait-il si loin des Verts, dans ce procès permanent instruit contre la modernité ? On se souvient du fameux slogan «Sortez les sortants !», lors de la campagne législative de 1956, qui envoya à la Chambre cinquante-deux députés poujadistes. La démarche démagogique d'un Arnaud Montebourg avec sa Convention pour une VIe République, censée en finir avec la corruption généralisée, est-elle si éloignée ?

Dans un autre registre, on retrouve aussi dans le poujadisme cette «détestation globale», décrite dans nos colonnes par Alain-Gérard Slama, des Etats-Unis et des Juifs qui, là aussi, commence à trouver une oreille complaisante dans les rangs de la gauche ultra.

On l'a bien compris, chacun des acteurs fait ses courses idéologiques et prélève une partie et une partie seulement du vieux fonds de commerce poujadiste. Reste la méthode - l'imprécation - et l'objectif - la déstabilisation. Reste aussi le discrédit jeté sur l'adversaire et sa diabolisation. Reste enfin que les nouveaux poujadistes contribuent par leurs blocages au retard politique, social, économique pris par notre pays.


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pelon
 
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Message par pelon » 24 Sep 2003, 18:01

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Dominique Reynié : le retour de la violence politique
Pour ce politologue qui travaillle sur l'émergence et la crise du système démocratique, il y a bien une "tentation poujadiste" à gauche.

Propos recueillis par Renaud Ferreux


[20 septembre 2003]
Le Figaro Magazine - Peut-on dire que l'on assiste aujourd'hui, à gauche, à l'émergence d'un nouveau poujadisme ?
Dominique Reynié - Il existe aujour-d'hui à gauche une tentation poujadiste en ce sens que sont remis en cause, et même contestés dans leurs principes, les mécanismes classiques de médiation. Et notamment le premier d'entre eux : l'élection ! Toute une fraction de la gauche de la gauche estime, en effet, que les élections ne sont pas une procédure légitime. Cette déqualification de la procédure électorale est fondée sur l'incapacité de cette gauche extrême à produire ou à participer à des majorités parce qu'elle n'en veut pas (ces majorités seraient «impures») ou parce qu'elle ne peut pas : seule, elle est incapable de convaincre une majorité d'électeurs.

Quand on lit un philosophe comme John Holloway qui, avec Toni Negri, inspire cette mouvance, on est frappé par cet éloge du retrait de la scène politique classique, cet éloge implicite, au fond, de l'abstention.

C'est José Bové repoussant les avances du PC pour conduire une liste aux prochaines élections régionales ou européennes...
José Bové agrège, manifeste, interpelle, fait monter les mécontentements, mais son univers n'est pas électoral. Il est médiatique. Il passe de la légitimité à la popularité. Il y a là l'avènement de quelque chose de nouveau et d'antidémocratique auquel contribue largement la mouvance altermondialiste.

Pourquoi cette fascination des médias ?
Les voies classiques écartées, il faut bien trouver des leviers compensatoires ! On assiste ainsi de plus en plus souvent à la production d'actions d'interpellation qui sont, au sens propre, spectaculaires. Ces militants savent ce qu'il faut faire pour forcer le passage de l'espace public et obtenir une visibilité sans commune mesure avec leur visibilité électorale. En agissant ainsi, ils déplacent le référent politique de l'univers électoral et délibératif à l'univers spectaculaire et médiatique.

Le paradoxe est que cette gauche extrême qui a construit sa réputation intellectuelle sur la critique des médias est actuellement l'une des sources les plus abondantes d'une démocratie d'opinion ou même d'une médiacratie.

La France est-elle un terrain «privilégié» pour voir se développer cette stratégie ?
Objectivement, oui. Il existe une particularité française. Tout d'abord, avec la présence d'une extrême gauche réelle dans l'espace politique et dans l'espace politique classique. Mais les enquêtes d'opinion montrent aussi plus largement une grande disponibilité de notre pays pour les comportements protestataires. Comme si toute action collective non conventionnelle se trouvait aussitôt anoblie. A cet égard, la notoriété de José Bové doit beaucoup à la transgression des interdits juridiques.

Enfin, il y a un dernier point qui découle du deuxième : c'est le retour d'un mal historique, la violence politique. On recourt à la désobéissance, on occupe des logements, on empêche des expulsions de sans-papiers, on agresse les représentants de l'ordre républicain et, au total, on réinstalle petit à petit la violence politique dans un pays qui en a la passion.

Cette violence est d'autant plus «payante» qu'elle s'accorde fort bien avec l'économie médiatique. La transgression est plus télégénique que le respect de la loi. Un homme enchaîné ou brisant des machines est malheureusement plus conforme à ce qu'attendent les médias qu'un vote à l'Assemblée.

Comment expliquez-vous la lenteur de réaction du PS face à ce phénomène ?
La gauche française n'a jamais fait l'analyse de son rapport à la violence politique. Même après l'effondrement du totalitarisme soviétique puis maoïste, il n'y a pas eu de remise en question. Le fait d'avoir été stalinien, par exemple, n'est pas rédhibitoire. Ce refus de penser la violence explique - en partie - pourquoi le Parti socialiste peut être parfois si mal à l'aise face aux stratégies de rupture.

Des dirigeants de la droite se félicitent parfois de la montée de cette gauche poujadiste. Ont-ils raison ?
Je ne crois pas. En premier lieu parce qu'il est difficile de se féliciter d'un retour de la violence politique. J'ai été choqué de voir les militants de certaines ONG être en liesse après l'échec de la conférence de l'OMC. «Que ces flammes sont hautes, qu'elles sont belles !» devaient-ils se dire.

En second lieu, je ne crois pas que l'on peut comparer ce qui se passe avec la montée du Front national qui fut, en son temps, une épine dans le pied de la droite.
Il serait plus juste de dire que si la gauche radicale (PC-LCR-LO) est une épine dans le pied du PS, la gauche altermondialiste est également une épine dans celle de la gauche radicale pour la raison que j'ai évoquée au début de cet entretien : les altermondialistes qui vampirisent les forces de la gauche radicale sont de plus en plus intéressés par une désertion de la scène électorale. En accueillant José Bové à la Fête de l'Humanité, Marie-George Buffet a fait entrer le loup dans la bergerie. C'était, avouons-le, plus comique que pathétique.

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pelon
 
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Message par pelon » 24 Sep 2003, 18:04

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Figaro Magazine







La couverture anglaise du livre de John Holloway qui paraîtra en France début 2004.



DE MALGLAIVE/GAMMA

Connaissez-vous John Holloway ?
Le temps est aussi à la défiance envers les syndicats et les partis. Surtout pour les manifestants minoritaires, crispés sur leurs intérêts corporatistes, qui multiplient les actions illégales, sous l'oeil très intéressé de l'extrême gauche.
Véronique Grousset
[20 septembre 2003]

Beaucoup de jeunes manifestants l'ignorent probablement, mais leur nouveau mot d'ordre - pratiquer «l'action directe» plutôt que la grève - est aussi le nom d'un groupe terroriste français, aux méthodes inspirées de celles de la Fraction Armée Rouge allemande et des Brigades rouges italiennes. De quoi justifier les inquiétudes exprimées par plusieurs dirigeants politiques ou syndicaux de la gauche traditionnelle - de Marc Blondel à François Hollande - qui n'hésitent plus à évoquer le risque de «guérilla urbaine» à propos de ces actions, ni à en attribuer la responsabilité à l'extrême gauche.

Minoritaires dans les AG comme dans les manifestations, les mécontents de ce début d'automne se rassemblent en effet de plus en plus souvent «en interpro», comme ils disent, dans des groupes où figurent pêle-mêle des enseignants, des intermittents du spectacle, des chômeurs ou des assistants d'éducation, mais aussi des figures de proue de l'altermondialisme ou de nombreux syndicats Sud, truffés d'anars et de trotskistes. Et bien que l'extrême gauche n'apparaisse pas officiellement dans ces groupuscules, les actions de type «commando» qu'ils mènent, et le discours de légitimation de la violence sociale qui les anime, en portent incontestablement la marque.

Sans oublier qu'il y a plus à gauche que l'extrême gauche : «l'ultragauche», ainsi que l'appelle Laurent Fabius. Plus clandestine, plus individualiste et plus insaisissable, dont l'influence se retrouve aussi dans les «nouvelles actions spectaculaires, autres que la grève» organisées par ces marginaux de la revendication syndicale. C'est ainsi que l'on a pu voir certains groupes de manifestants se rassembler très vite en un endroit précis, uniquement pour y pousser un grand cri collectif, avant de disparaître. Ou d'autres arborer le slogan «Changer le monde».

"Changer le monde" par tous les moyens

Deux coïncidences troublantes pour qui connaît les thèses du dernier néomarxiste à la mode, John Holloway, philosophe irlandais exilé dans une université mexicaine, grand admirateur des révolutionnaires zapatistes du Chiapas, dont le prochain ouvrage paraîtra début 2004 en France aux éditions Syllepse sous le titre Comment changer le monde sans prendre le pouvoir. Un essai plus confus que son titre ne le laisse supposer, mais dont l'objectif est cependant fort clair.

«Nous vivons dans une société horriblement oppressive dans laquelle les gens se doivent de lutter contre l'injustice par tous les moyens possibles», résume John Holloway, en refusant de condamner quelque type d'actions que ce soit, même attentatoires aux libertés du plus grand nombre «à partir du moment où elles contribuent à créer un monde meilleur».

Persuadé que la révolution «par les masses» a fait la preuve de son inefficacité (de Staline à Mao, en passant par Castro, tous accusés de n'avoir rien compris à Marx), John Holloway mise sur «les individus», qu'il exhorte «à ne pas prendre le pouvoir, mais à le détruire de l'intérieur», par la force de «leur cri», et leur refus d'obéir aux institutions. Toutes les institutions : l'Etat, bien sûr, le capital bien évidemment, mais aussi les partis politiques et les syndicats. Sa principale consigne étant de «résister au quotidien, contre toutes les formes d'injustice sociale».

Un discours qui fait fureur en Amérique latine, et qui connaît déjà un certain succès en France, via les revues politiques et le Web, avant même que le livre soit publié. Ce qui s'explique aisément. Depuis la mort de Bourdieu, les «déçus des syndicats» (cheminots, enseignants, chômeurs, intermittents) et autres «déçus de la gauche » (10,4% de voix pour les candidats d'extrême gauche le 21 avril 2002, contre 16,18% pour le PS) ne savaient plus à quel idéologue se vouer pour les soutenir dans leurs luttes corporatistes. John Holloway débarque donc à pic en les rassurant sur la légitimité de leur résistance à toute concession : ils sont des victimes de l'Etat, ils s'en prennent à l'Etat, ils ne font donc que leur devoir, au nom de l'intérêt de tous.

Preuve que les utopies ne sont pas mortes et qu'elles sont toujours aussi sinistrement sûres d'elles. Ce qui s'explique en partie par la façon dont l'histoire est enseignée dans nos écoles : presque rien sur les crimes du communisme, rien du tout sur les idées de Trotski, et moins que rien sur l'admiration d'Hitler pour les écrits de Marx. Quant au terrorisme révolutionnaire, le sujet n'est même pas abordé : les enseignants qui se vantent aujourd'hui de faire de «l'action directe» savent-ils seulement que les dirigeants du mouvement du même nom croupissent encore dans les prisons françaises pour meurtre ? Il est malheureusement permis d'en douter.


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Message par pelon » 24 Sep 2003, 18:09

Puisque le pauvre Montebourg a droit aux foudre du Figmag, j'ai surligné le plus drôle. Je ne sais plus, tout est drôle. Apparemment les chiraquiens n'ont pas apprécié que le jeune Arnaud s'en prenne au rempart de la République. Vous ne le saviez pas hein que l'expression célèbre "gauche ta droite" était de Hortense de Labriffe épouse d'Arnaud :
:sygus:

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Figaro Magazine





Montebourg ou la posture
Chevalier blanc de la politique, Arnaud Montebourg, député PS de la Saône-et-Loire, appuie sa stratégie médiatique sur la dénonciation. Pour cela, depuis dix ans, il multiplie les relais. Mais pour quel projet ?
Aziz Zemouri
[20 septembre 2003]

Il suffit de cent hommes décidés et tout sera possible. Nous irons très loin. On rénovera la gauche et, un jour, on dirigera la France. Cette parole est prêtée à François Mitterrand qui déjà, dans les années 60, s'y connaissait en réseaux et autres filières d'intérêts croisés. Député PS de Saône-et-Loire et fondateur du courant NPS (Nouveau Parti socialiste), Arnaud Montebourg s'est imprégné du parcours de l'ancien président de la République.



C'est ainsi qu'à l'image d'un Mitterrand qui créa la Convention des institutions républicaines pour contester le monopole de la vieille SFIO, Montebourg a imaginé sa Convention pour la VIe République dont l'objet affiché est de secouer le cocotier des institutions et ceux qui, à gauche comme à droite, les représentent. Avec Montebourg, c'est tous les jours : «Sortez les sortants !» A l'Elysée, à Matignon, à l'Assemblée et même au PS. Mais, à la différence de Pierre Poujade dont ce fut le cri de ralliement voilà cinquante ans, le député de Saône-et-Loire aimerait bien, lui, devenir ministre. Et plus, si affinités.



Ces derniers temps, sa virulence semble pourtant avoir cédé la place au silence. Pour combien de temps ?



- Après les coups de menton, il y a la réalité des investitures pour les prochains rendez-vous électoraux. Et là, c'est le parti qui décide, résume Maurice Benassayag.



Cet ancien collaborateur de François Mitterrand à l'Elysée a connu Montebourg il y a une quinzaine d'années. En pleine «Tontonmania», le postulant au poste de nettoyeur en chef des écuries de la République s'était engagé de manière très active dans la campagne pour la réélection de François Mitterrand en 1988.



- Il montait des comités de soutien à Sciences-Po, entre autres...



Le réseau politique sur lequel s'appuie alors Montebourg est fabiusien. Il est «remarqué» par les membres d'Espace 89, un club très soudé animé par Françoise Castro dont les adhérents se promettent d'aider Laurent Fabius, jeune ex-Premier ministre de Mitterrand, à accéder à la présidence de la République. Sa carrière est jalonnée d'amitiés «fabiusiennes», de Thierry Mandon au PS à Denis Olivennes, avant qu'il ne soit directeur général de Canal +.



Arnaud Montebourg rêve d'être candidat aux législatives. En 1997, il est dans le XIIIe arrondissement de Paris et mène campagne contre le RPR Jacques Toubon, ministre de la Justice dans le gouvernement d'Alain Juppé.



- Un jour, raconte un éditeur parisien, il m'a téléphoné pour demander mon aide dans sa campagne. Il disait qu'il avait des appuis dans les journaux, notamment dans un quotidien du soir. Et puis, du jour au lendemain, il a disparu.



Aujourd'hui, chargé de mission à la direction de France 3, Sébastien Drouadaine n'a pas, lui, oublié comment il a dû annoncer aux militants l'abandon de Montebourg. En revanche, abondamment relayée par ses amis, la légende veut que ce soit Pierre Joxe, l'un des connétables du mitterrandisme triomphant, qui l'ait alors «convaincu» de venir s'installer en Saône-et-Loire pour lui succéder. La réalité est plus prosaïque. A l'époque, les fabiusiens de la circonscription parisienne se querellaient toujours avec les jospinistes. Aucun des clans ne voyait d'un bon oeil le parachutage du jeune avocat ambitieux qui avait senti tout l'intérêt d'une bataille médiatique contre un ministre chiraquien. La «manip'» a donc consisté à éloigner de Paris le cactus Montebourg.



Grâce à son épouse, dont un aïeul fut député de la Saône-et-Loire au XIXe siècle, le Rastignac bourguignon s'est trouvé des racines dans l'ancien fief de Pierre Joxe.



En 1997, Arnaud Montebourg a en effet épousé Hortense de Labriffe, fille du comte de Labriffe, vice-président de la Bankers Trust Company, et ancienne collaboratrice du service de presse de l'UDF. Le champ des relations de Montebourg s'est aussi élargi. Il englobe les libéraux, les balladuriens et même... des villieristes, comme l'avocat et député européen Alexandre Varaut.




- On se connaît depuis 1993, dit ce dernier, nous devons partir à Istanbul pour fêter le dixième anniversaire de la Conférence du stage.



L'avocat devenu député utilise les "affaires"



Et puis il y a les liens noués dans les médias. Alors que, au début des années 90, les lois successives sur le financement des partis politiques entrent en vigueur, les affaires sanctionnant des comportements antérieurs illicites n'en finissent plus de pleuvoir sur la gauche (Urba, etc.) et sur la droite (HLM de Paris, etc.). Montebourg, qui s'est autopromu justicier du système, se fait le spécialiste du harcèlement politico-juridique au Parlement, devant les micros, à la une des journaux et dans ses livres.



Aussi dès qu'une affaire soulève un coin de voile sur certaines pratiques ou décisions politiques, l'avocat Montebourg se transforme en procureur et sollicite son réseau d'amitiés et d'informateurs.



Mais il arrive qu'on lui crédite des actions dont il ignore tout. Ainsi, au bout d'une longue cohabitation de cinq ans, l'élection présidentielle de 2002 a été empoisonnée par quelques scandales, dont un qui a failli changé radicalement le ton de la campagne entre Jacques Chirac et Lionel Jospin. En ligne de mire, la direction de la DGSE : l'Elysée avait appris que les services spéciaux réunissaient des informations sur la vie privée du chef de l'Etat et que Matignon le savait. L'affaire se régla un peu plus tard par le départ du patron des services de la sécurité extérieure. Mais, entre-temps, le nom de son chef de cabinet, le fabiusien Pierre-Antoine Lorenzi, avait été cité comme étant celui du responsable des fuites dans la presse. Or cet ex-directeur du service de lutte contre la corruption est un ami intime d'Arnaud Montebourg depuis Sciences-Po. CQFD ? Aujourd'hui, pour l'Elysée, les choses sont claires :



- Lorenzi est un haut fonctionnaire loyal. Le «réseau Montebourg» n'est pour rien dans ce qui a été une manipulation. Quant à l'utilisation médiatique de tout cela, c'est une autre histoire.



Des journalistes partagent ses valeurs



Les chiraquiens n'oublient pas dans quelles circonstances a été dévoilée la colère de la présidence de la République après la découverte d'une enquête de la DGSE sur le chef de l'Etat.



- Entre mon amitié pour Arnaud Montebourg et mon travail, il n'y a jamais eu d'interférences, affirme aujourd'hui Hervé Gattegno, responsable du service France du Monde. Il est vrai que nous partageons un certain nombre de valeurs, mais cela existe avec lui comme avec d'autres.



D'ailleurs, si Arnaud Montebourg reconnaît volontiers que des journalistes partagent son engagement, c'est pour aussitôt nuancer son propos :



- Il y en a d'autres, au Monde comme dans d'autres médias, qui ne m'aiment guère. En fait, je me sens assez seul, et j'en souffre.



Seul, vraiment seul ? Pas si sûr. En fait, depuis de nombreuses années, Montebourg a toujours été très entouré. A Canal +, par exemple, il a pu compter sur l'appui de membres éminents de la direction.



Parmi les spécialistes de la communication politique, le député de Saône-et-Loire peut aussi miser sur les amitiés qu'il a nouées avec les dirigeants d'Euro-RSCG. C'est d'ailleurs un cadre de cette agence, avec Hortense de Labriffe, qui a lancé l'appel «Gauche ta droite», pour contrôler le respect des promesses du candidat Chirac.



Et puis il y a Guy Birenbaum. Editeur chez Denoël, cet universitaire, qui a entre autres publié le juge Eric Halphen, a longtemps été présenté comme l'éminence grise de Montebourg. C'est ensemble qu'ils ont fondé la Convention pour la VIe République.



L'association a connu quelques remous. Lors d'un vote de confiance à Montebourg, l'année dernière, un tiers des votants s'est abstenu. Ils ont été reconduits vers la porte de sortie. Montebourg, un autocrate ?



- Il a, surtout, une vision utilitaire des rapports humains, dit le juge Halphen, membre de la Convention.



Un nouvel exemple en est donné avec «l'affaire Birenbaum». Ce dernier, ami de longue date du député socialiste, vient de publier le très controversé Nos délits d'initiés, mes soupçons de citoyen (lire Le Figaro Magazine du 6 septembre) dans lequel il dénonce les turpitudes réelles ou supposées de ceux qui nous gouvernent.



Prudent, Arnaud Montebourg a mis le maximum de distance entre lui et son ancien compère :



- M. Birenbaum est un excellent éditeur, mais je regrette et désapprouve les choix de son livre. Ce qui m'intéresse, ce n'est pas la morale mais le respect de la loi républicaine.



Un corpus contestataire pour une stratégie



Et d'ajouter que si Guy Birenbaum est bien membre de la Convention pour la VIe République, il n'y exerce plus « aucune responsabilité».



Le malheur veut que la dernière page du livre remercie plusieurs proches collaborateurs de l'impétrant de Saône-et-Loire qui l'ont «aidé» à rédiger son ouvrage.



Tout à sa stratégie médiatique, Montebourg s'est aussi entouré de quelques spécialistes du droit constitutionnel comme Bastien François, professeur à Paris I, pour nourrir son «corpus» contestataire. Et en économie ? A vrai dire, en la matière, les idées du chef de file du Nouveau Parti socialiste manquent encore de lisibilité, comme on dit au PS.



Cela dit, Montebourg assure «consulter régulièrement» l'économiste Jean-Paul Fitoussi. Ce dernier s'étonne :



- Je n'ai vu Arnaud Montebourg qu'une seule fois et je ne connais pas vraiment ses idées sur le plan économique.



Il n'est pas le seul. Mais est-ce vraiment important pour le député Montebourg ?


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Message par pelon » 24 Sep 2003, 18:10

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Figaro Magazine





Les damnés de la Terre promise
En France, le Proche-Orient nourrit des discours de plus en plus simplistes. Vu de l'extrême gauche, les chemins de la révolte mènent à Jérusalem.
ELISABETH LÉVY et E. L.
[20 septembre 2003]

Eux aussi sont des victimes. Les défenseurs de la cause palestinienne réunis par les éditions La Découverte (1) n'ont ni le même passé ni le même présent politique. S'ils sont tous des «militants de gauche», comme le précise le directeur littéraire Hugues Jallon, chef d'orchestre de l'opération, ils ne se réclament pas tous de la «gauche de la gauche» ou de l'altermondialisme. Aux côtés de Rony Brauman et de Daniel Lindenberg, pourfendeur des «nouveaux réactionnaires», tous deux issus de la mouvance antitotalitaire, on trouve Michel Warschawski, trotskiste israélien farouchement antisioniste, le philosophe Etienne Balibar ou Denis Sieffert, journaliste à Politis, qui, eux, n'ont pas enterré l'espérance révolutionnaire. Tous, cependant, partagent le sentiment d'être soumis à un «intolérable chantage» à l'antisémitisme. Il leur est, se plaignent-ils, interdit de critiquer la politique d'Ariel Sharon, sous peine d'être exposés à l'infamante accusation. On notera qu'ils ont courageusement bravé l'interdit, car la plupart des signataires prennent régulièrement des positions tonitruantes sur Israël, présenté au mieux comme «un Etat colonial à l'ancienne», au pire comme l'instigateur d'une politique d'apartheid appuyée sur une idéologie raciste : «un peuple de gardiens de camps» maintenant sous sa férule «un peuple de détenus», selon l'interprétation expéditive que Balibar propose de la construction, éminemment critiquable au demeurant, de la «barrière de sécurité» (2).



Foin de l'Orient compliqué. La vie est simple. Seulement, cette lecture, pour le moins discutable politiquement, conduit ces dénonciateurs sincères de l'injustice à s'aveugler sur la recrudescence des sentiments et des actes antijuifs en France au sein d'une minorité de la population arabe et de certains cercles propalestiniens. Avec des nuances, les auteurs sont conduits à minorer le phénomène, décrit comme marginal par rapport au racisme dont sont victimes les Arabes de France. Quand ils ne l'imputent pas au comportement de quelques Juifs médiatiques coupables, selon eux, de «soutien inconditionnel» à Ariel Sharon. C'est bien là que le débat blesse. Certes, il faut deux sourds pour faire un dialogue et il se trouve bien des extrémistes, juifs ou philosémites, institutionnels ou pas, pour considérer que toute mise en cause de la politique israélienne ouvre le chemin des chambres à gaz. Mais ces inconditionnels de Sharon ne sont pas légion.



Un amalgame franchement hilarant



Il faut bien se demander pourquoi, lorsque Taguieff, Finkielkraut ou d'autres condamnent clairement la colonisation ou «la politique de cow-boy menée par Sharon», on continue à les présenter comme les porte-parole d'un Premier ministre dont la démonisation ne connaît plus de bornes : la nuance et la complexité n'ont décidément pas droit de cité dans un affrontement où chacun est renvoyé à sa propre caricature.



Qu'on ne se méprenne pas. Ni les auteurs ni l'éditeur ne sont suspects de complaisance envers la haine antijuive. Sans en être tous convaincus, tous espèrent, à l'instar de Brauman, que «la paix au Proche-Orient signera la fin de ces affrontements racistes qui veulent s'ennoblir d'une dimension politico-religieuse». Et le terrible sort d'écoliers français juifs molestés parce qu'ils sont juifs ne saurait interdire à qui que ce soit de critiquer la politique d'Israël. Il faudrait être aveugle pour ne pas voir que, de part et d'autre de la ligne verte imaginaire qui traverse l'intelligentsia française, ce sont des Juifs qui invectivent des Juifs. «Un appel signé par huit Juifs emmerde plus le Crif que 10 000 imprécateurs gauchistes», remarque le philosophe Daniel Bensaïd.



Professeur de philosophie politique et analyste des «nouvelles radicalités» (3), Philippe Raynaud estime que ce clivage entre Juifs sépare ceux qui «sont en fin de parcours du cycle des Lumières et ceux qui pensent qu'être juif c'est être de gauche». Lindenberg lâche le morceau : «Il ne s'agit pas seulement d'un rapport simplificateur et intolérant à Israël (eux et nous) mais d'une nouvelle vision du monde qui relève, dans presque tous les domaines, d'une vision de droite». Autant dire que les amis d'Israël sont les agents d'une vaste offensive contre la gauche. Si le sujet était moins douloureux, l'amalgame serait franchement hilarant.



Qui sont vraiment les victimes ?



C'est la juste cause. Celle dont la défense vous place ipso facto dans le camp du Bien. Mai 68 et le Vietnam réunis dans un même combat contre les forces de l'impérialisme et de la réaction. Symbole de toutes les oppressions, de toutes les injustices, la Palestine est devenue le point de rencontre de toutes les radicalités.



On dirait que tous les chemins de la révolte mènent à Jérusalem. Tout en récusant l'idée selon laquelle les Palestiniens seraient aujourd'hui la figure emblématique de la victime, Christian Picquet, l'un des dirigeants de la Ligue communiste révolutionnaire et animateur de la Coordination Palestine, qui regroupe un grand nombre de syndicats et d'associations, affirme que «la situation des Palestiniens est exemplaire du sort réservé aux peuples dans le nouvel ordre mondial. C'est pourquoi, poursuit-il, elle occupe une place centrale dans la mobilisation de ceux qui veulent un autre monde». Faut-il en conclure que les sympathisants de l'Etat juif sont tous de fieffés conservateurs soucieux de perpétuer les injustices dans le monde ?



Il ne s'agit pas d'opposer une paranoïa à une autre. Dans les cercles de soutien à la Palestine, nombreux sont ceux qui ont pris conscience du risque de dérapage, notamment depuis que des slogans franchement haineux ont été entendus dans des manifestations antiguerre où les Juifs n'étaient les bienvenus qu'à condition d'afficher clairement leur détestation d'Israël. Ancien du PSU et animateur de France-Palestine-Solidarité, Bernard Ravenel reconnaît qu'il a dû batailler ferme pour imposer la condamnation des attentats suicides : «Maintenant, nos adhérents ont compris qu'il s'agissait non seulement d'une faute morale mais d'une erreur politique qui ne contribue en rien à la construction de l'Etat palestinien.»



Chacun est sommé de choisir son camp



En revanche, il a été mis en minorité sur le boycott des produits israéliens, voté sous la pression de la base. «Heureusement, cela n'a rien donné, car le danger d'hystérisation est réel : on commence par boycotter Israël, on finit par s'en prendre au capital juif.» Picquet ne se voile pas la face : «Il y a une haine antijuive, alimentée par des groupes intégristes et négationnistes, qui n'a rien à voir avec la situation au Proche-Orient.» Ça va mieux en le disant.



Ce n'est pas l'avis d'Olivia Zémor, animatrice de la CAPJPO (Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient). Récusant le qualificatif de propalestinienne, elle s'indigne de «la logique du soupçon» qui pèse sur tous les «défenseurs du droit»... avant de préciser, dans un courrier électronique, qu'elle a enregistré cet entretien téléphonique. Pour cette ancienne journaliste devenue militante à plein temps et considérée comme une ultra, le développement de l'antisémitisme, pour condamnable qu'il soit, est essentiellement imputable à deux causes : «la politique israélienne et le comportement de certains intellectuels et responsables communautaires juifs qui agissent comme des pompiers pyromanes». Ce qui revient au passage à affirmer qu'il est légitime de haïr les Juifs qui soutiennent Israël, effet de l'inconscience, sans doute, et non de la malveillance. Elle prend soin de condamner avec la même vigueur le «terrorisme d'Etat» israélien et les attentats suicides «provoqués par le désespoir». «Mais attention, conclut-elle, à ne pas mettre sur le même plan les occupants et les occupés.»



Autant dire que poser la question d'un lien éventuel entre antisionisme et antisémitisme suscite de hauts cris. «On ne va pas censurer la critique du sionisme au nom de l'antisémitisme», déclare Bensaïd. Voilà qui a le mérite de la clarté. On ne saurait assimiler une position politique, aussi radicale soit-elle, à une haine raciale ou religieuse. Et le sionisme n'est nullement un impératif catégorique, y compris pour les Juifs. Pour autant, un certain type de critique formulé par de respectables intellectuels peut prendre une autre résonance dans les tristes ghettos ethniques de la République. «Ce ne sont pas les vieux militants bien formés mais de jeunes incultes sensibles à l'amalgame imbécile qui ont pété les plombs, avance François Gèze, patron de La Découverte. Les gens avec qui nous sommes en contact connaissent le conflit et sont à mille lieues des discours simplistes.» Voire. On a le droit de décréter qu'Israël est un Etat colonial, et ceux qui le pensent ne parlent pas seulement de la Cisjordanie et de Gaza ; mais il faut aussi savoir que pour la fraction fanatisée ultraminoritaire - répétons-le - des jeunes de nos cités, cela signifie : «Les Juifs ont volé la terre de vos frères palestiniens.» Sans doute y a-t-il unanimité absolue pour condamner la «nazification» d'Israël, au point qu'on peut se demander si les pancartes présentant Ariel Sharon comme le descendant de Hitler sont tombées de la planète Mars. «Même la députée israélienne Shulamit Aloni le dit, exulte cependant Olivia Zémor. Israël n'a pas de chambres à gaz ni de fours crématoires, mais il n'y a pas qu'une seule méthode de génocide. Allez-vous l'accuser d'antisémitisme ?» D'antisémitisme non, mais d'idiotie assurément.



Difficile d'en sortir. Il faut qu'il y ait un bourreau et une victime. L'injustice réelle faite aux Palestiniens devient un avatar de la lutte sans fin entre le Bien de l'opprimé et le Mal de l'oppresseur. Résultat, alors que la seule solution raisonnable, celle de deux Etats vivant côte à côte, fait très largement consensus, chacun est sommé de choisir son camp, comme si l'idéologie devait définitivement liquider le souci du réel.
 

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pelon
 
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Message par pelon » 24 Sep 2003, 18:13

Surligné (arbitrairement) une expression de Guy Bedos qui n'a pas plu au magazine :

CITATION

Figaro Magazine





Le who's who des imprécateurs
Aucun n'est papetier à Saint-Céré, tous ne conspuent pas le fisc. Pourtant, ils ont tous en eux quelque chose de poujadiste.
Par Sébastien Le FOL, Etienne De MONTETY
[20 septembre 2003]

Isabelle Alonso : La poujadette

La présidente des Chiennes de garde a fait du féminisme son fonds de commerce. « Pour moi, le féminisme est une analyse politique de la société », admet-elle. Isabelle Alonso n'en finit plus de dénoncer la domination masculine, réelle ou imaginaire. Témoin son intervention récente au sujet de l'émission « Bachelor », sur M6, dans laquelle des femmes consentantes rivalisent pour séduire le même homme : « On commence par le « Bachelor » et on arrive à la différence de salaires », s'est-elle indignée. Bizarrement, on ne l'a pas entendue au moment du lancement d'« Opération séduction aux Caraïbes », sur M6, où quatre filles élisaient le «séducteur de l'été» parmi seize garçons, après leur avoir fait passer toutes sortes de tests psychologiques et physiques.

Guy Bedos : Tous pour rire

L'ex-comique des années 70 n'en finit pas de déverser sa bile. Chacun de ses spectacles se transforme en défouloir anti-establishment. Bedos en veut à la terre entière : Jospin (« Le chef scout désintoxiqué de Matignon »), Chevènement (qu'il a traité de fou à la télévision), Chirac (« Le grand couillon mafieux exhibitionniste de l'Elysée »), Messier (« Tout lui appartient. Il a tout contaminé. «a relève des maladies tropicales, c'est plus un humain, c'est une amibe »), l'Amérique, la mondialisation. Seul le juge Halphen, à qui était dédié son one-man show d'avant la présidentielle, et José Bové semblent trouver grâce à ses yeux. Au point que certains admirateurs du saltimbanque se demandent s'il n'a pas viré réac.

Guy Birenbaum : Brigade des moeurs

Il est arrivé, tel le chevalier blanc dans sa Saab, pour délivrer la France de ses élites corrompues, droguées et adultères. A la main, la liste noire des coupables, leurs noms, leurs moeurs et leurs relations. Fils caché, flirts, partouzes... Vous saurez tout sur le zizi de nos dirigeants en lisant le nouveau livre de Guy Birenbaum, Nos délits d'initiés (Stock). Sous prétexte de lutter contre l'extrême droite (sujet qu'il connaît bien puisqu'il s'est fait connaître avec un livre sur le Front national), ce nouveau procureur Starr reprend ses bonnes vieilles méthodes de déstabilisation : obsession de la transparence, dénonciation de la conspiration du silence. C'est The Mirror érigé en organe républicain et le rapport de police en argument intellectuel. Saint Just a trouvé un successeur en Birenbaum. Chef de file des incorruptibles, l'éditeur de la collection « Impacts » chez Denoël est bien décidé à semer la terreur. Après avoir publié le Pouvoir intellectuel d'Emmanuel Lemieux, le vrai-faux livre choc du juge Halphen, les cogitations constitutionnelles d'Arnaud Montebourg et le script de la cassette Méry, on attend le nom de la dernière conquête de Sumo, le chien du couple Chirac, objet d'étude préféré de cet inspecteur Gadget.

Gérard Collard : Le père Collard tueur

La petite librairie a son Poujade. Il s'appelle Gérard Collard. Son audience a depuis longtemps franchi le seuil de sa boutique à Saint-Maur-des-Fossés, dans la région parisienne. On a vu sa houppette de Tintin branché dans toutes les émissions littéraires, de « Vol de nuit » à « Parole d'expert ». Le père Collard dispense partout le même discours caricatural : « Le système médiatique donne toujours la parole aux mêmes auteurs. Moi, je défends les sans-grade. » Autoproclamé nouvel arbitre des élégances littéraires, le petit libraire de Saint-Maur use et abuse de formules à l'emporte-pièce pour discréditer les ouvrages considérés comme « élitistes » : « «a ne vaut pas une croûte de reblochon », « Puant de prétention », « C'est bien beau toutes leurs philosophies mais ça ne répond pas à la question fondamentale : Pepsi ou Coca ? » Collard ne dit jamais « livre » mais « bouquin ». «a fait plus peuple. Et il est tellement sûr de son bon goût, Collard, qu'il n'hésite pas à jeter les « mauvais bouquins » - de préférence écrits par des « intellos du Flore » - dans la poubelle de son magasin. Au café des Deux Magots, Collard préfère le café des démagos.

Roger Hanin : La gauche "navarrin"

Craignait-il d'être assimilé à son personnage consensuel de Navarro ? Roger Hanin a retrouvé ces derniers temps les accents de l'épicier d'Au bon beurre. L'heure n'est plus au Grand Pardon, mais au coup de siroccoco. Le comédien, qui a adhéré cette année au Parti communiste, multiplie les déclarations musclées. Ses propos se situent rarement au-dessus de la ceinture. Jospin ? « C'est un homme vraiment méprisable, à qui je ne serrerais pas la main. » Jean d'Ormesson ? « Un petit homme. » L'acteur leur préfère visiblement Joseph Joanovici, le ferrailleur milliardaire qui joua un double jeu sous l'Occupation. A propos de son personnage, qu'il incarna en 2001 pour la télévision, Hanin déclara : « Enfant, j'étais impressionné et passionné par le personnage. Je me suis toujours intéressé aux parias et, pour moi, Joanovici était un héros à qui il fallait rendre justice. » Il est des modèles moins contestables.

«Les Inrockuptibles» : Salon de messages

C'est le journal officiel de la pensée poujado-bobo. Il prétend donner le la de la culture contemporaine. Exemple : Good Bye Lenin !, le film de Wolfgang Becker, encensé par la critique, ne saurait plaire à cette rédaction délicate. Un film « assez malsain », peut-on lire. Wolfgang ou Jean (les Enfants du marais), les Inrocks, ils aiment pas. Ils détestent l'esthétisme et jugent les livres ou les films selon une grille de lecture simple : « Où est le message ? » S'il n'y en a pas, c'est suspect. Cet été, l'hebdomadaire s'est fait l'écho d'une lettre de soutien à Bertrand Cantat, au motif que son attitude à Vilnius ne saurait faire oublier son combat légitime contre les puissants de ce monde et le libéralisme. Depuis plusieurs semaines, dans une rubrique finement intitulée « Agitpop », ils relaient les thèses altermondialistes les plus dures, en dénonçant l'OMC « dotée d'un pouvoir exorbitant, et trahissant un goût prononcé pour le secret ». Vieille rengaine connue depuis les années 30.

Pierre Marcelle : Robespierre Marcelle

Il est loin le temps où Pierre Marcelle cosignait avec l'inclassable Patrick Gofman Les blondes préfèrent les cons. Depuis Marcelle s'est assagi, exerçant ses talents à Libération. Il y a tenu la rubrique « Face aux piles » dont le critère esthétique était simple : si ça se vend, c'est sûrement mauvais. Les piles s'étant usées, il s'est refugié dans une colonne dénommée « Quotidienne » dans le même quotidien avec le même cahier des charges, à peine remanié : si ça exerce une quelconque responsabilité politique, économique, culturelle, religieuse, c'est suspect. Et Marcelle de le dire à la face du monde. Titre pris au hasard : « Oui, justice pourrie... » (octobre 2001). Autre phrase de lui, qui éclaire son propos. Commentant l'attitude de Ségolène Royal ayant répondu à un article de Libération comparant son propos à de la tarte aux fraises par l'envoi de la dite pâtisserie, Marcelle y vit non la réponse de la bergère au berger mais « une autre expression de cette quête de connivence, conscience ou non, à laquelle décidement on ne se résout pas ».

Il lui arrive toutefois de « s'y résoudre », conformément au fameux syndrome dit de « fascination/répulsion » : contempteur des puissances établies, Pierre Marcelle est en réalité aimanté par elles, comme l'insecte par la lumière. Ainsi, on a surpris l'an passé ce Rosbespierre des lettres au dîner en l'honneur du prix Goncourt, organisé par les éditions Grasset, en présence du Tout-Paris des lettres. Incorruptible, de 9 h à 19 h.

Alain Soral : Le pétomane

Quand il était petit, Alain Soral lisait Pilote et rêvait d'Iznogoud, celui qui « veut être calife à la place du calife ». Lui voulait être sage, comme les enfants et Socrate. La chaire de philosophie light étant déjà prise par André Comte-Sponville et Luc Ferry, il s'est tourné vers la pensée hard, celle qui dit « tout haut » dans les médias ce que tout le monde pense « tout bas » dans les bistrots. Il y a pléthore de penseurs sympas ? Il se rêve en affreux, le pétomane de Dutronc qui éructe, persuadé d'avoir des talents de société.

Autodidacte, ancien membre du Parti communiste, coauteur des Mouvements de mode expliqués aux parents, il a fait mille petits boulots. Aujourd'hui on appelle cela se forger une pensée « protéiforme ». Après un film, Confession d'un dragueur (qui aurait mieux fait de rester dans le secret du confessionnal), il signe coup sur coup Jusqu'où va-t-on descendre ? (Abécédaire de la bêtise ambiante) et Socrate à Saint-Tropez, opus publiés aux très chics éditions Blanche dirigées par Franck Spengler (ce qui a valu à Soral un article dithyrambique de Régine Deforges, mère de Spengler : dénoncer le communautarisme n'empêche pas de tolérer le copinage).

L'oeuvre de Soral est un ensemble de morceaux choisis, à ne pas mettre entre toutes les mains. Il dénomme ces apophtegmes délicats des « texticules » : quel talent ! Caressé dans le bon sens près de chez vous, le public raffole. C'est San Antonio au Collège de France : une bonne tranche de rire. On a le droit de ne pas aimer. Soral vitupère, comme on défouraille. Sans viser. Comme on ne peut pas avoir tort tout le temps, parfois il met dans le mille, mais à quel prix. Les dégâts collatéraux sont ravageurs. Comme son humour.

Thierry Meyssan : Imposture effroyable

George W. Bush, Jean-Paul II, Hubert Védrine, René Dumont, Charles Pasqua, Christine Boutin, le complot international selon Thierry Meyssan serait une hydre aux mille visages. Cela fait quinze ans que l'animateur du Réseau Voltaire poursuit son combat, tel Don Quichotte chargeant les moulins, avec comme arme une rhétorique où il est question pêle-mêle d'« ordre moral » de « croisés », de « fascisme », et récemment de « complot interne américain ». Secrétaire national des Radicaux de gauche, habitué des émissions de TV à dominante « sociétale », Meyssan s'est longtemps appuyé sur les thèmes de la « laïcité » et de « la lutte contre l'extrême droite » pour nourrir sa vision du monde, avant d'aller au bout de sa logique conspirationniste en faisant il y a quelques mois cette « révélation », images d'Internet à l'appui : « Aucun avion ne se serait écrasé sur le Pentagone. » L'opération serait une « imposture » montée par « l'appareil d'Etat américain ». Son livre a fait un tabac, flattant les lecteurs avides d'une confirmation qu'« on nous cache tout, on nous dit rien ». Quant aux réactions unanimes de la presse sérieuse pour dénoncer ce « scoop », elle auront probablement alimenté cette certitude : le monde entier cherche à lui nuire.

Karl Zéro : Télé corbeau

Le titre de son émission sur Canal + est déjà tout un programme : « Le Vrai Journal ». Sous-entendu, les autres journaux mentent, la vérité est ailleurs. Et Karl Zéro va la révéler aux téléspectateurs sous-informés, voire manipulés, que nous sommes. Tous les moyens sont bons pour confondre la classe politique : reportages fantaisistes, parodies, truquages, interviews chocs. Rien n'arrête le Fox Mulder de la chaîne cryptée. Pas même la présomption d'innocence. Au printemps dernier, l'animateur a ainsi lu à l'antenne des « aveux » que lui avait adressés Patrice Alègre, mettant en cause des notables toulousains. Manque de chance pour le chevalier Zéro, Alègre s'est ensuite rétracté et l'a accusé d'avoir monnayé sa lettre de dénonciation. « C'est du pur délire ! » s'est plaint Zéro, pris au piège de son propre système.



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